CHAPITRE V

LA CINQUIÈME SYMPHONIE EN DO MINEUR

Corinne HELINE

(Traduit par Stella Mounier)

 

L'esprit de Beethoven est incarné dans la musique, celui qui a écouté la Cinquième Symphonie a entendu le coeur de Beethoven "( Sir Olivier Lodge).

 La Cinquième Symphonie est le chant des quatre éléments - le Feu, l'Air, l'Eau et la Terre  Son intensité et sa puissance coupent le souffle.  On a dit que des personnes très sensibles de l'époque de Beethoven ont été prises de convulsions en écoutant ses grands courants de véritable feu cosmique.

 Voici comment Wagner décrit " la gigantesque énergie " du premier mouvement de cette symphonie.  " Il (Beethoven) arrête les vagues de la mer et met à nu le fond de l'océan, stoppe les nuages dans leur course, dissipe la brume et laisse voir le pur ciel bleu et la face flamboyante du soleil lui-même.  "

 Dans ses quatre parties, la symphonie chante chaque élément.  Bien que chacune de ces parties soit séparée et distincte l'une de l'autre, elles sont magiquement reliées par un fil d'or d'harmonie.

 Les critiques ont souvent remarqué l'harmonie rythmique des quatre éléments.  Le premier mouvement (Allegro con brio) est adapté à l'élément Feu.  Le second mouvement (Andante con moto) se rapporte à l'Air.  C'est le plus irrégulier des quatre mouvements.  Le troisième mouvement (Allegro) est étroitement relié au premier, bien qu'il n'en soit aucunement la répétition.  Il évoque l'élément eau mystérieux et miroitant.  Puis dans le Final, le corps même de la terre arrive en triomphe pour recevoir, unir et intégrer ce quadruple pouvoir cosmique.

 La Cinquième Symphonie a été composée fin 1807, début 1808.  La Cinquième Symphonie et la suivante, la Sixième, ont d'abord été jouées à Vîenne le 22 Décembre 1808.

 Le mot-clé spirituel de la Cinquième Symphonie est Liberté.

 De toutes les Neuf Symphonies de Beethoven, celle-ci est la mieux connue, la mieux comprise et la plus populaire.  Elle a été " proclamée " impeccable dans sa conception et parfaite dans sa construction.  Un monument grandiose et durable au génie incomparable et à la faculté d'exécution de son auteur.  " C'est une musique qui s'élève au-dessus de l'éphémère de la vie; elle ne se réfère pas à des scènes passées, extérieures, mais apporte une force morale, venant des niveaux cosmiques à renforcer l'être intérieur de ceux qui l'écoutent.  C'est une musique pure, raffinée, abstraite dont le but est de pousser l'âme à se souvenir de sa nature divine et immortelle et d'utiliser ses pouvoirs pour monter plus haut.  Et c'est ce qui arrive vraiment, qu'on en soit conscient ou pas.  Là nous avons une structure tonale qui s'élève en " expression cosmique ". Elle parle de force rédemptrice à l'esprit intérieur parce que ses sons sont si harmonieux à la fois aux activités du Grand Homme de l'univers et à celles au-dedans de sa réflexion dans l'homme microcosmique de la terre.

 Chacun des quatre mouvements est en lui-même une création brillante.  Pris ensemble, ils constituent une oeuvre d'une imposante grandeur.

 Le premier mouvement, Allegro con brio, s'ouvre sur quatre notes qui, comme l'a expliqué Beethoven, sonnent le destin qui frappe à la porte.  Le second mouvement, andante con moto, comporte un note de tristesse, bien que merveilleusement beau, il est de plus mis en valeur par un de ses mouvements de marche que seul Beethoven pouvait concevoir.

 Pris ensemble le premier et le deuxième mouvements sont une véritable explosion de défi volontaire qui devient plus véhément et plus intense jusqu'à ce que les forces résistantes soient vaincues.  Comme l'a exprimé un des commentateurs, les deux premiers-ders mouvements sont le chant d'un Ego fortement déterminé à briser les liens du destin et à s'élever au-dessus de ses limitations.

 Ajoutons que le mot destin n'est qu'un autre nom pour désigner la loi cosmique de Cause à Effet.  Ce n'est pas une abstraction froide et détachée.  C'est un pouvoir actif, vivant entremêlé dans la fabrication la vie même.  Ce que l'homme, ou une nation, sèment, ils doivent le récolter avant d'être spirituellement éveillé, l'homme, individuellement et collectivement, s'offense de cette vérité.  Il refuse d'admettre que ses chagrins et malheurs sont la conséquence de ses propres méfaits et erreurs . La colère, l'amertume, le défi et la réfutation qu'endure l'âme consciente sont dépeints dans les deux premiers mouvements de la Cinquième Symphonie.

 Avec le troisième mouvement une grande transformation survient.  Maintenant la musique devient mystérieuse, belle et remplie d'un mysticisme étrange annoncent de vastes profondeurs et des hauteurs insondables encore inexplorées.  Là, graduellement, mais inévitablement, aussi doucement et merveilleusement que les pétales écloses d'une fleur, l'esprit s'ouvre plus pleinement au véritable but et aux mystères de la vie.  Une réalisation nouvelle et plus profonde naît, mais lorsque les lois de la vie sont comprises et harmonieusement appliquées, elles ne sont pas maléfiques, mais bienfaisantes.

 Le troisième, ou Scherzo, a des passages éloquents et ses figures tonales rythmiques revêtent un voile mystérieux et lourd d'un sombre présage.  Il s'insinue dans " l'orgueilleux et fier " Final qui est d'une brillance étonnante se terminant par un presto qui entraîne vraiment l'auditeur avec lui.

 Dans toute musique il n'y a rien de plus sublime que la transition du Scherzo au Final -, cette réalisation naît au-dedans de l'homme éveillé, ou illuminé.  C'est alors avec un chant de réjouissance que l'esprit se tient libre et non entravé pour tout le temps et l'éternité et n'est plus assujetti à la loi karrnique.  La glorieuse musique du Scherzo et du Final sonnent le chant triomphant de celui qui s'est ainsi réalisé.  Cette grande « musique de liberté » est l'héritage divin de toute âme ayant appris à s'émanciper en passant du fini de la vie personnelle à l'infini de l'être éternel.

 Charles O'Connel dit : « dans un sens élargi, ce n'est pas l'expression de la pensée ou le sentiment d'un homme, c'est l'expression d'un mental déchiré, et d'une humanité intriguée, cynique et finalement triomphante.  C'est la voix d'un peuple., d'un monde pitoyable, mais portant en lui les éléments d'une grandeur finale.  Assurément la Cinquième est un appel plus puissant, plus direct et plus universel à la nature humaine que n'importe quelle autre grande musique ».

 Le Final est d'une telle magnificence et d'une telle richesse que peu de pièces en comparaison peuvent être jouées sans être complètement écrasées.

 E.Markham Lee écrit à propos de la Cinquième dans Histoire de la Symphonie : « colossale dans son pouvoir majestueux, romantique dans son essence même et titanique dans ses idées inhérentes, la Symphonie en Do Mineur ressort comme l'une des plus nobles et des plus caractéristiques des oeuvres de Beethoven.  Se trouvant au milieu des Neuf Symphonies, elle est différente des autres et par sa noblesse et sa majesté, elle se tient à distance, avec dignité.  Beethoven a commencé à y travailler juste après l'achèvement de l'Héroïque et le même sérieux et la même ardeur sont apparents. »

 Cette musique puissante, magnifique et même terrifiante décrit la glorieuse liberté que seul peut connaître; l'esprit qui a brisé les chaînes qui le lient à la personnalité et s'est éveillé au ravissement d'un esprit pur et inaltérable.  Cette symphonie est le chant sublime de l'émancipation.  C'est une interprétation musicale du combat épique aux niveaux de l'âme.  C'est un chant de triomphe où l'être émancipé brise les liens du fini et passe victorieusement et triomphalement dans la glorieuse liberté de l'infini. 

 

LE CINQUIÈME MYSTÈRE

 

Le cinquième mystère se rapporte à la cinquième couche, ou Couche Germe de la terre, telle qu'on la désigne en terminologie chrétiennes Dans cette enveloppe de la terre est reflétée la région la plus élevée du monde mental, connu sous le nom de Royaume de la Pensée Abstraite.  C'est à ce niveau, ou plan, que le mental est relié à l'esprit.

 Il est connu que l'origine de la vie se trouve dans le germe.  Mais il n'est pas généralement compris que l'origine de la pensée se trouve également dans le germe.  Dans le Germe, ou cinquième couche terrestre sont engrangées les pensées générées par tous les hommes.  Si une personne pense intensément et longtemps une idée spécifique, une pensée germe de même nature s'implantera dans ce royaume.  Là, elle germera et donnera son fruit.  Tels sont les effets du pouvoir créateur du mental, non seulement la personne qui crée un tel germe en récoltera les fruits, mais d'autres seront également influencés ou affectés à des degrés divers selon leur a affinité avec ce que le germe produit.  Ainsi, par exemple, lorsqu'un personnage aussi puissant qu'Alexandre le Grand, ou Napoléon, fixe son mental à conquérir le monde, les résultats qui ressortent du germe généré affectent les personnes de même nature durant les siècles à venir, le germe original se multipliant plusieurs fois.  Naturellement la loi agit de la même manière pour ceux qui ont des pensées nobles et élevées.  La bonne pensée-germe, générée par Saint François d'Assise, par exemple, n'a jamais cessé de porter ses fruits et continue de les porter avec ce qui a été semé dans notre monde par un saint moderne, Mahatma Ghandi.

 Quand un homme est sur le point de commencer un nouveau pèlerinage sur la terre, il est amené à cette cinquième couche terrestre pour commencer la construction de ses nouveaux moules-germes.  De la façon dont il vit aujourd'hui, l'homme construit pour demain.  C'est dans le Cinquième Mystère qu'il apprend à lire dans la Mémoire de la Nature l'enregistrement des vies passées et d'en suivre la trace dans les moules germes.

 Il y a une ligne de démarcation entre les cinq premiers des Neuf Mystères Mineurs et les quatre derniers.  Dans les cinq premiers mystères le participant récapitule et amène à perfection le travail qui a été donné au début de l'apprentissage.  Ceci comprend la purification et le contrôle de la nature désir et la spiritualisation du mental qui le rend réceptif et obéissant aux injonctions de l'esprit plutôt que d'être assujetti aux penchants et aux impulsions de la personnalité.

 Lorsque l'homme passe par le cinquième des Mystères Mineurs, le Christ au-dedans est éveillé et gouverne ses actions.  Quand il passe dans les quatre derniers Degrés plus élevés, le Christ au-dedans s'épanouit pleinement.  Désormais c'est l' Homme-Dieu qui participe aux rites initiatoires sacrés.

 La Cinquième est généralement connue comme Symphonie de la Victoire.  Cette désignation est plus significative dans son interprétation spirituelle.  Elle implique plus que la victoire de l'homme sur l'homme, ou de la nation sur la nation, car elle se réfère à la conquête du soi.  Le plus sage de tous les

sages biblique connaissait bien cette conquête lorsqu'il a dit celui qui sait se contrôler est plus grand que celui qui prend une cité.  "

 Le Cinquième Mystère marque une période de transition dans la vie de l'esprit.  C'est là que les derniers liens de la vie personnelle sont brisés afin que l'esprit puisse s'élever fibre sur les hauteurs Elyséennes.  Cette période de transition marque l'émergence du temps avec l'éternel et du fini avec l'infini.  Saint Paul décrit ce changement capital comme : changer le vieil homme en nouveau.

 Dans cette magnifique Cinquième Symphonie, Beethoven décrit cette période de transition où l'attrait de la chair est rompu et le pouvoir de l'esprit règne suprême.  L'être ne pourra jamais comprendre pleinement et apprécier la force de l'impact formidable de la Cinquième Symphonie tant qu'Un ne sera pas qualifié de l'interpréter spirituellement.  C'est celui-ci qui, en esprit, se tient sur les rives d'un vaste océan inexploré, rendu lumineux par l'émerveillement du mystère, avec un sentiment d'effroi et aussi de beauté devant le nouveau et l'inexploré, alors qu'au-dessus on entend des myriades de voix célestes chantant triomphalement.  On se trouve maintenant au seuil de la Vie Etenelle qui finalement conduit à l'union avec le plus béni des Etres qui est la Lumière du Monde.