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Lorsque l'Ego arrive dans le Monde Physique, c'est, en un
sens, une cause de réjouissance puisque nous nous réjouissons
de la naissance d'un enfant, car ce monde nous procure à la fois
l'expérience et les matériaux pour la croissance de l'âme.
Cependant en considérant cela d'un autre point de vue, lorsque
l'Ego vient en ce monde et entre dans la prison du corps dense,
il est dans la condition la plus limitée qui soit imaginable;
aussi, se réjouir au moment de la naissance d'un enfant et se
lamenter lorsqu'il est libéré par la mort équivaut, en
réalité, à se réjouir lorsqu'un ami est jeté en prison et à
se lamenter bruyamment lorsqu'il est mis en liberté.
De plus, nos devoirs à l'égards de nos bien-aimés qui ont
quitté la vie terrestre ne sont pas terminés lorsqu'ils ont
rompu leurs attaches physiques. Nous avons une responsabilité à
leur égard par delà la tombe. Notre attitude après la mort de
nos êtres chers continue à les affecter, car ils ne quittent
pas immédiatement les lieux où ils ont vécu. Beaucoup d'entre
eux restent dans la maison qu'ils ont habitée ou à proximité
de
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elle-ci pendant un certain nombre de mois après qu'ils ont
quitté leur corps physique, et peuvent en ressentir
l'atmosphère de façon même plus aiguë que durant leur vie
terrestre. Si nous pleurons, soupirons et nous lamentons à leur
égard, nous les chargeons du fardeau de tristesse que nous
traînons avec nous, ou alors nous les attachons à la maison
dans leurs efforts pour nous consoler. Dans chacun des cas, nous
sommes un obstacle et une pierre d'achoppement sur le chemin de
leur progrès spirituel. Ceci peut être pardonné à ceux qui
sont ignorants des faits concernant la vie après la mort, alors
que les personnes qui ont étudié la Philosophie Rosicrucienne
ou d'autres enseignements analogues, encourent une très grave
responsabilité lorsqu'elles se laissent aller à de telles
pratiques.
Nous savons très bien qu'il est d'usage de porter le deuil et
que les gens ne sont pas respectables s'ils ne revêtent pas des
habits noirs en témoignage de leur douleur. Heureusement les
temps changent et une manière de voir plus éclairée se fait
jour à ce sujet. Le passage dans l'autre monde est déjà une
question suffisamment sérieuse en elle-même, nécessitant tout
un processus d'adaptation à un milieu inaccoutumé. L'Esprit qui
s'en va ne doit pas être handicapé davantage encore par le
chagrin et l'angoisse des êtres chers qu'il continue à voir
évoluer autour de lui. Quand il les voit entourés par un nuage
noir et habillés de vêtements de même couleur, cultivant leur
peine pendant des mois ou des années, le résutat ne peut
qu'être déprimant pour lui.
Combien préférable est l'attitude de ceux qui, ayant
étudié les Enseignements Rosicruciens, ont à coeur de les
mettre en pratique. Leur attitude est réconfortante, secourable,
pleine d'espoir et d'encouragement. Ils ne
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ressentent pas de douleur égoïste de sorte que l'Esprit qui
s'en va reçoit tout l'encouragement possible. En général, les
membres de la famille sont vêtus de blanc aux funérailles, qui
se passent dans une atmosphère réconfortante et bienveillante.
La pensée de ceux qui restent n'est pas: «Que vais-je devenir
maintenant que je l'ai perdu? Le monde est vide pour moi». Elle
est au contraire: «J'espère qu'il se trouvera rapidement à
l'aise dans les nouvelles conditions qui sont désormais les
siennes, et qu'il ne sera pas attristé à la pensée de ceux
qu'il laisse derrière lui. Nous prions avec ferveur pour son
bien-être, et pour qu'il puisse apprendre complètement les
leçons de cette vie grâce à ses expériences au Purgatoire et
au Premier Ciel.
Ainsi, grâce à la bonne volonté, l'intelligence, l'absence
d'égoïsme et l'amour des amis restés ici-bas, l'Esprit qui
s'en va est capable de se faire aux conditions qui sont nouvelles
pour lui, dans des circonstances très favorables; et nous ne
saurions mieux faire que de diffuser cet enseignement le plus
largement possible. C'est nous qui sommes perdants si nous sommes
aveugles aux mondes superphysiques, mais pour tous ceux qui
veulent se donner la peine d'éveiller leurs facultés latentes,
l'«ouverture» du sens approprié n'est qu'une question de
temps. Lorsque ce moment sera venu, nous verrons que les
soi-disant «morts» vivent tout autour de nous et que, en fait,
«il n'y a pas de mort», comme le dit John Mc Creery dans ce
magnifique poème:
Il n'y a pas de mort. Les étoiles se couchent
Pour se lever sur un autre rivage.
Et dans la brillante couronne de joyaux du ciel
Elles brillent à jamais.
Il n'y a pas de mort. Les feuilles des forêts
Convertissent en vie l'air inerte;
Les rocs se désagrègent pour nourrir
La mousse affamée qu'ils portent.
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Il n'y a pas de mort. La poussière foulée
Se changera sous les averses d'été
En grain doré ou en fruit mûr
Ou en fleur couleur d'arc-en-ciel.
Il n'y a pas de mort. Les feuilles peuvent tomber,
Les fleurs se faner,
Elles attendent seulement, dans les heures d'hiver
La douce et chaude brise de mai.
Il n'y a pas de mort, bien que nous soyons tristes
Quand les belles formes familières
Que nous avons appris à aimer
Sont enlevées à nos bras serrés.
Bien qu'avec un coeur déférent et brisé
En vêtement de deuil, d'un pas silencieux
Nous portions au repos leur poussière insensible,
Et disons qu'elles sont mortes,
Il n'y a pas de mort. Elles ont seulement passé
Au-delà du brouillard qui nous aveugle ici,
Dans la vie nouvelle et plus large
D'une sphère plus sereine.
Elles ont seulement laissé leur vêtement d'argile
Pour revêtir une robe de lumière,
Elles n'errent pas au loin,
Elles ne sont ni «perdues», ni «parties».
Bien qu'invisibles à nos yeux mortels
Elles sont ici et nous aiment encore;
Et n'oublient jamais
Les êtres chers laissés derrière elles.
Quelquefois, sur nos fronts enfiévrés,
Nous les sentons comme une brise apaisante.
Notre esprit les voit et notre coeur
Se réconforte et se calme.
Oui, toujours près de nous, bien qu'invisibles,
Vont nos esprits chers et immortels,
Car tout l'Univers sans limite de Dieu
Est Vie - Il n'y a pas de «morts».