DEUXIEME PARTIE
Les effets occultes de nos émotions

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Chapitre 9

LA FONCTION DU DÉSIR - Février 1916

Ceux qui ont étudié ce sujet sont au courant des perturbations que produit dans le corps physique une violente frayeur subite ou une grande angoisse. Nous savons que ces émotions troublent la digestion, le métabolisme et les éliminations intestinales; en un mot, elle bouleversent entièrement nos fonctions, au point même d'obliger parfois une personne à s'aliter pour un temps plus ou moins long, suivant la violence du choc et le degré de résistance des organes affectés. Mais il existe un effet occulte tout aussi sérieux, sinon davantage, généralement ignoré; il est donc de la plus haute importance d'étudier les effets occultes de la passion et de l'équilibre, de la colère et de l'amour, du pessimisme et de l'optimisme.

L'étude de la "Cosmogonie des Rose-Croix" nous apprend que notre corps du désir a été construit dans la Période de la Lune.

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Si vous voulez vous faire une image mentale de la façon dont les choses se présentaient à ce moment-lá, prenez l'illustration du fotus tel qu'il est montré dans un livre d'anatomie. On y distingue trois parties principales, le placenta, rempli du sang maternel, le cordon ombilical qui transporte ce courant vital, et le fotus lui-même, qui est nourri depuis son état embryonnaire jusqu'á la naissance. Pour vous reporter à cette Période lointaine, imaginez maintenant le firmament sous la forme d'un immense placenta auquel seraient suspendus des milliards de cordons ombilicaux pourvus chacun de son appendice fotal. A travers la famille humaine entière, alors en devenir, circulait l'essence unique et universelle du désir et de l'émotion, produisant toutes les impulsions à l'action qui sont actuellement manifestes dans chaque phase de l'oeuvre mondiale. Ces cordons ombilicaux et ces appendices fotaux avaient été modelés dans l'humide matière-désir par les émotions des Anges lunaires, tandis que les courants ardents qui s'efforçaient d'éveiller la vie latente de l'humanité alors en formation étaient produits par les ardents Esprits martiaux de Lucifer. La couleur de cette première et lente vibration qu'ils ont mise en mouvement dans cette matière-désir émotionnelle était rouge.

Et tandis que cette teinte de l'agitation (car c'est ce qu'est réellement ce flux incessant de l'activité éternelle, qui, maintenant encore, nous pousse de l'avant sans paix ni trêve) circulait au-dedans de nous, la planète sur laquelle nous nous trouvions alors se mouvait aussi autour du soleil. Ce n'était pas le donneur de vie d'aujourd'hui, mais une incarnation passée de la matière dont est formé notre présent système solaire. Notre course autour du globe qui était notre demeure nous faisait passer de la lumière à l'obscurité et de la chaleur au froid. C'est ainsi que nous avons été stimulé du dedans et du dehors dans un effort continu pour éveiller notre conscience endormie. Cet effort a produit la réaction souhaitée, bien qu'aucun de ces esprits, séparé des autres et emprisonné dans son "sac fotal" individuel, n'ait été capable de percevoir ces impacts pourtant très forts. Néanmoins, les sensations réunies de ces milliards d'esprits ont été ressenties comme un son dans l'univers, un cri cosmique, la première note de l'harmonie des sphères, jouée sur une corde unique.

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Elle n'en exprimait pas moins, dans la mesure voulue, le désir ardent et l'aspiration de la race humaine naissante de cette lointaine époque.

Depuis lors, cette nature-désir a évolué; le côté ardent et martial de la passion et le côté humide et lunaire de l'émotion se sont prêtés à de nombreuses combinaisons. De même que la pensée creuse les circonvolutions du cerveau et les traits du visage, ainsi les passions, les désirs et les émotions façonnent la matière-désir en lignes courbes, en spirales, en remous, en rapides tourbillons ressemblant au torrent de la montagne à son plus fort débit; elle connaît rarement sinon jamais un repos même relatif. Pendant les périodes consécutives de son évolution, cette matière-désir est devenue successivement sensible aux sept vibrations planétaires émanant du Soleil, de Vénus, de Mercure, de la Lune, de Saturne, de Jupiter et de Mars. Pendant ce temps, chaque corps du désir individuel a été tissé selon un modèle unique, mais tandis que la navette de la vie court incessamment d'un côté à l'autre du métier de la destinée, ce modèle se développe, s'améliore et s'embellit, bien que nous puissions ne pas nous en apercevoir. De même que le tisserand travaille toujours à l'envers de sa tapisserie, ainsi nous tissons aussi, sans comprendre complètement le dessin final et sans en voir la beauté sublime, parce qu'il est sur le côté éloigné de nous, la face cachée de la nature.

Mais pour mieux comprendre, prenons quelques-uns de ces fils embrouillés de passion et d'émotion pour voir l'effet qu'ils produisent sur le modèle que Dieu, le Maître-Tisserand, désire nous voir réaliser.

Les anciens mythes ont toujours répandu une lumière éclatante sur les problèmes de l'âme et nous pouvons à ce sujet étudier avec profit certaines parties de la légende Maçonnique. Les maçons forment une société de constructeurs, "tektons" en grec, à laquelle appartenaient Jésus et Joseph, puisque ces derniers sont appelés, dans la Bible grecque, "tektons", constructeurs et non charpentiers comme dans la version orthodoxe.

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Les maçons de Salomon furent les constructeurs du temple mystique conçu par Dieu, le Grand Architecte (arkhétektôn) ou Maître-Constructeur, temple édifié sans bruit de marteau, et dont parle Manson dans cette oeuvre merveilleuse qu'est "Le Serviteur dans la Maison". Il dit que ce n'est pas un amas inanimé de pierres et de bois, mais que c'est une chose vivante. Quand vous y entrez, vous y entendez un son, un son ressemblant au chant d'un hymne admirable, du moins si vous avez des oreilles; et si vous avez des yeux, vous voyez présentement le temple lui-même, mystère de formes indistinctes et d'ombres, s'élançant d'un seul trait de la base au dôme. La construction se poursuit simultanément de l'intérieur et de l'extérieur, tantôt dans de profondes ténèbres, tantôt dans une clarté éblouissante.

Tout véritable maçon mystique sait ce qu'est ce temple et s'efforce de l'édifier en lui-même. L'ancienne légende maçonnique relate l'histoire du Temple de Salomon, la Maison de Dieu construite sans bruit de marteau, et lorsque le maître-maçon Hiram Abiff se préparait à exécuter son chef d'oeuvre, la "mer de fonte", il rassembla des matériaux de toute la terre et les plaça dans une fournaise ardente, car il descendait de Caïn, fils du feu, qui lui, était fils de Lucifer, l'esprit du feu. Hiram Abiff se proposait de composer un alliage de la transparence du cristal, capable de réfléchir la sagesse du monde entier. Mais, poursuit l'histoire, il y avait, parmi les ouvriers, des traîtres - espions des Fils de Seth - descendant par Adam et Eve du Dieu lunaire Jéhovah qui avait une affinité pour l'eau et abhorrait le feu. Ces traîtres avaient versé de l'eau dans le moule dans lequel devait être coulée la mer de fonte, la Pierre Philosophale (en anglais: la Pierre du Philosophe). La rencontre du feu et de l'eau provoqua une formidable explosion. Hiram Abiff, le maître-maçon, ne pouvant plus réaliser l'amalgame des éléments en guerre, assista avec une douleur inexprimable à l'éruption destructrice qui anéantissait le chef d'oeuvre, fruit de ses efforts. Tandis qu'il observait la bataille entre les esprits du feu et de l'eau, son ancêtre Tubal-Caïn lui apparut et lui ordonna de se jeter dans la masse en fusion.

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Il fut alors conduit au centre de la Terre où il rencontra son premier ancêtre, Caïn, qui lui donna un mot nouveau et un marteau nouveau qui devaient le rendre capable, lorsqu'il serait devenu habile à les manier, d'allier les deux éléments antagonistes et d'en faire la Pierre philosophale qui est la suprême réalisation humaine.

Il y a dans cette histoire symbolique plus de sagesse que ne pourraient en contenir des volumes entiers sur la croissance de l'âme humaine. Si l'étudiant peut lire entre les lignes et méditer sur ces différentes expressions symboliques, il y gagnera bien davantage que tout ce que l'on pourrait dire, car la vraie sagesse vient toujours du dedans, et la seule mission des livres est de nous mettre sur la voie.

Depuis ces temps anciens, les anges lunaires ont pris particulièrement à charge l'humide et aqueux corps vital composé des quatre éthers, assumant la mission de reproduction et d'entretien de l'espèce, tandis que les esprits Lucifer sont restés spécialement actifs dans le véhicule sec et ardent du désir. La fonction du corps vital est de construire et de sustenter le corps dense, tandis que le corps du désir entraîne l'usure et la destruction des tissus. Il existe ainsi un continuel état de guerre entre ces deux corps, et c'est cette lutte dans les cieux qui produit notre conscience physique sur terre. Au cours de nombreuses existences, nous avons travaillé dans toutes les époques, sous de nombreux climats; et de chacune de nos vies nous avons extrait une certaine somme d'expérience, emmagasinée comme pouvoir vibratoire dans les atomes-germes de nos différents véhicules.

Ainsi, chacun de nous est un constructeur édifiant le temple de l'esprit immortel, sans bruit de marteau; chacun de nous est un Hiram Abiff qui récolte les matériaux pour la croissance de l'âme et les jette dans la fournaise des expériences de sa vie pour y être travaillés par le feu de la passion et du désir. Ces matériaux fondent lentement mais sûrement; les scories sont éliminées après chaque expérience au purgatoire, et la quintessence de la croissance de l'âme est extraite à travers de nombreuses vies.

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Que nous le sachions ou non, chacun de nous se prépare ainsi à l'initiation et apprend à allier les passions fougueuses aux émotions plus délicates, plus douces. Le nouveau marteau ou maillet avec lequel le maître artisan gouverne ses subordonnés est, présentement, la croix de souffrance, et le nouveau mot est la maîtrise de soi.

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Chapitre 10

LES EFFETS COLORÉS DE L'ÉMOTION DANS LES RÉUNIONS DE PERSONNES - EFFET ISOLANT DE L'ANXIÉTÉ - Mars 1916

Voyons maintenant comment le corps du désir se modifie sous l'influence de sentiments divers, tels que désirs, passions et émotions; cela nous donnera le moyen d'apprendre à construire avec sagesse et justesse le temple mystique qui est notre demeure.

Lorsque nous étudions les sciences dites physiques, telles l'anatomie ou l'architecture qui traitent de sujets tangibles, le travail nous est facilité du fait que nous avons les mots qui décrivent les choses dont nous parlons, et pourtant l'image mentale que fait surgir un mot déterminé diffère d'une personne à l'autre. Quand nous parlons d'un "pont", l'un peut imaginer une structure de fer de plusieurs millions de francs, tandis que l'autre pensera à une simple planche jetée sur un ruisseau. La difficulté de communiquer les impressions exactes de notre pensée croît rapidement lorsque nos essayons de transmettre des idées relatives aux forces intangibles de la nature, telles que l'électricité.

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Nous mesurons la force du courant électrique en volts, son volume en ampères et la résistance des conducteurs en ohms, mais le fait est que ces termes ne sont que des mots inventés pour masquer notre ignorance. Tout le monde sait ce qu'est une livre de café, mais le plus grand savant du monde ne conçoit pas plus exactement la nature des volts, des ampères et des ohms, dont il parle d'ailleurs avec beaucoup de science, que l'écolier qui entend ces termes pour la première fois.

Rien d'étonnant, dès lors, que les sujets hyperphysiques soient décrits en termes vagues et souvent trompeurs puisque, ne possédant, dans nos langues physiques, aucun mot capable d'en figurer correctement l'idée, nous manquons des termes voulus pour en faire la description. Même si l'on pouvait filmer le corps du désir et montrer ainsi sur l'écran comment, suivant les émotions, ce véhicule toujours en mouvement change de forme et de couleurs, cela ne donnerait pas une idée exacte à celui qui n'a pu voir ces choses par lui-même, car les véhicules de chaque être humain diffèrent selon la manière dont ils réagissent à certaines émotions. Tel peut éprouver très vivement de l'amour, de la colère, de la haine, de la crainte ou toute autre émotion, alors que tel autre restera absolument indifférent devant des causes identiques.

Dans cet ordre d'idées et à titre de comparaison, l'auteur a souvent regardé attentivement les foules, et chaque fois il s'est trouvé en présence d'une manifestation imprévue et nouvelle, différente de ce qu'il avait observé jusqu'alors. Une fois, un démagogue s'efforçait d'engager une assemblée ouvrière à la grève; il était lui-même très excité, et bien que la couleur fondamentale orange foncé de son corps du désir fut perceptible, elle était, pour l'instant, presque noyée dans un écarlate des plus brillants, et le contour de ce véhicule ressemblait au corps d'un porc-épic armé de piquants. Dans l'auditoire, il y avait un fort courant d'opposition, et à mesure que l'orateur parlait, on pouvait distinguer très nettement les deux camps adverses aux couleurs de leurs auras respectives.

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Une partie de l'assemblée montrait la couleur écarlate de la colère, tandis que dans l'autre, on voyait l'écarlate entremêlé de gris, couleur de la crainte. Chose curieuse, alors que les hommes à la couleur grise étaient en majorité, l'autre courant finit par l'emporter, parce que chacun de ces timorés, craignant d'être seul de son espèce ou du moins en minorité, n'avait pas osé exprimer son opinion ou son vote. Si un clairvoyant avait été présent et était allé trouver chacun de ceux dont l'aura manifestait des signes de dissenssion en lui donnant l'assurance que la majorité pensait comme lui, l'issue aurait été diamétralement opposée. Il en est souvent ainsi dans les affaires humaines, la majorité étant actuellement incapable de voir au-delá des limites du corps physique et de percevoir la véritable condition des pensées et des sentiments d'autrui.

Une autre fois nous avons visité une assemblée du "Réveil" où plusieurs milliers de personnes s'étaient réunies pour entendre un orateur de grand renom. La vue des auras individuelles, au commencement de la réunion, montrait que la plupart des assistants n'étaient venus lá que par curiosité et pour se divertir. On voyait parfaitement que les pensées, les sentiments et les émotions de chacun se rapportaient à la vie ordinaire, mais chez quelques-uns d'entre eux, une certaine couleur bleu foncé indiquait une attitude soucieuse; ils paraissaient avoir éprouvé quelque déception dans la vie et semblaient très mal à l'aise. Au moment où l'orateur parut, un phénomène assez curieux se produisit. On sait que le corps du désir est généralement en perpétuel mouvement, or à ce moment précis, on aurait dit que l'auditoire tout entier avait retenu son souffle dans une attente contenue: les différents jeux de couleurs dans le corps du désir de chacun s'étaient arrêtés et la teinte de base orange fut clairement perceptible durant un instant; mais bientôt les activités émotionnelles reprirent comme auparavant, tandis qu'on jouait l'introduction. Puis le chant des hymnes commença, ce qui démontra la valeur et l'effet de la musique car, alors que tous étaient unis par le chant de mots identiques sur la même mélodie, les mêmes vibrations rythmiques qui s'élevaient de tous ces corps du désir semblaient se fondre et n'en faire momentanément qu'un seul.

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Cependant, plusieurs personnes se trouvaient en quelque sorte au "banc des railleurs" (en anglais "scoffer'seat", siège des railleurs, à l'arrière de l'église, occupés par les sceptiques, opposés au "amen seat", à l'avant, occupés par ceux qui acquiescent à tout), et refusaient de chanter et de se joindre aux autres. A la vue spirituelle, ils semblaient des " hommes d'acier", revêtus d'une armure de cette couleur, et de chacun d'eux sans exception, émanait une vibration qui disait bien plus clairement que de simples mots n'auraient pu le faire: "Laissez-moi tranquille, vous ne me toucherez pas". Un sentiment intérieur les avait amenés lá, mais ils avaient une peur mortelle de céder, et c'est pourquoi toute leur aura exprimait cette teinte acier caractéristique de la peur qui est une armure de l'âme contre l'intervention extérieure.

A la fin du premier chant, l'unité de couleur et de vibration se rompit très rapidement, chacun reprenant le cours habituel de ses pensées; si la cérémonie s'était arrêtée lá, chacun s'en serait retourné à sa vie intérieure habituelle. Mais le prédicateur, bien qu'incapable de discerner tout cela, savait par expérience que son auditoire n'était pas encore à point; il fit donc chanter toute une série de chants, accompagnés de claquements de mains, de battements de tambours, de gesticulations, où il était secondé par un choeur expérimenté. Tout cela ramena ces âmes dispersées dans les liens de l'harmonie, et peu à peu la foule fut irrésistiblement vaincue par un courant de ferveur religieuse, et l'unité nécessaire à l'effort suivant était établie. Ainsi la musique, les claquements de mains du prédicateur et l'appel émouvant des chants avaient fusionné cet immense auditoire qui, désormais, ne faisait plus qu'un, car les railleurs à l'aura grise, qui se croyaient trop sages pour être bernés, alors que leur émotion était vraiment de la crainte, ne formaient qu'une partie négligeable de la vaste assistance.

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Tous vibraient à l'unisson comme les cordes d'un immense instrument, et le prédicateur, devant eux, jouait en maître artiste avec leurs émotions. Il les faisait passer du rire aux larmes, de la douleur à la honte; de grandes vagues, aussi belles qu'étranges, de couleurs correspondant aux émotions, semblaient survoler toute l'assemblée. Vinrent alors les appels coutumiers, demandant de "se lever pour Jésus", l'invitation au "banc des pénitents", etc., et de tous les rangs de l'auditoire, chacun apporta la réponse émotionnelle clairement perceptible en teintes bleu et or. D'autres chants, d'autres claquements de mains, d'autres gesticulations renforcèrent encore l'unité et firent éprouver à l'assistance un semblant de fraternité universelle et de foi en la paternité de Dieu. Les seuls sur qui la musique ne produisait aucun effet étaient les hommes bardés du bleu acier de la crainte; cette couleur semble en effet presque impénétrable à toute émotion. Bien que les impressions reçues par la majorité n'aient été en somme que passagères, la foule n'en a pas moins bénéficié du "Réveil", à l'exception des hommes à l'armure bleu-acier.

Autant que nous puissions en juger, la crainte intérieure de céder à l'émotion, cette crainte qui est saturnienne et soeur jumelle de l'anxiété, semble nécessiter un choc pour faire sortir de son environnement une personne ainsi affectée et la mettre dans une ambiance nouvelle et de nouvelles conditions, avant que les anciennes puissent être surmontées.

L'anxiété empêche les courants-désir de décrire de longues lignes courbes dans toutes les parties du corps du désir, et sont remplis de remous, et uniquement de remous dans les cas extrêmes. Les personnes plongées dans cet état ne cherchent pas à se rendre actives dans une voie quelconque; elles voient des calamités lá où il n'y en a pas, et au lieu de produire des courants favorisant l'action, ce qui préviendrait la réalisation de ce qu'elles craignent, chaque pensée d'anxiété forme un remous dans le corps du désir, d'où leur inertie.

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Cette situation peut se comparer à l'eau près de se congeler sous l'influence d'une basse de température. La crainte qui se traduit en scepticisme, en critique ou en pessimisme peut être comparée à cette même eau congelée, car le corps du désir de ces personnes est presque figé et rien de ce qu'on peut dire ou faire ne semble pouvoir en changer l'état. Ces êtres sont, pour employer une expression populaire qui leur convient parfaitement, "retirés dans leur coquille", et cette coque saturnienne doit être brisée avant qu'il soit possible de parvenir jusqu'á eux et de les sortir de leur état pitoyable.

Les émotions saturniennes de crainte et d'anxiété sont généralement causées chez la personne qui en souffre par l'appréhension de difficultés économiques ou sociales. Les suggestions les plus diverses peuvent se présenter à son esprit: "Peut-être que mon placement perdra une partie de sa va-leur, ou même toute sa valeur; je pourrais perdre mon emploi et me trouver jeté sur le pavé, mourant de faim; tout ce que j'entreprends tourne mal; mes voisins me calomnient et tentent de miner ma position sociale; mon conjoint ne m'aime plus; mes enfants me négligent", et ainsi de suite. Ces personnes devraient se rappeler une fois pour toutes que chaque fois qu'elles entretiennent des pensées de cette nature, elles contribuent à bloquer les courants du corps du désir et à construire une coque bleu acier, celle de la crainte, dans laquelle elles s'enferment progressivement par l'habitude prise, pour arriver finalement à s'isoler de l'affection, de la sympathie, de l'assistance de tout le monde. Efforçons-nous donc de cultiver la gaieté, même dans les circonstances les plus défavorables, afin de ne pas nous trouver un jour dans une fâcheuse condition ici-bas et dans l'autre monde.

Il est facile de se montrer affable
Lorsque la vie s'écoule paisiblement
Mais le vrai sage est celui qui sourit
Quand tout va de mal en pis.

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Chapitre 11

EFFETS DE LA GUERRE SUR LE CORPS DU DÉSIR

COMMENT LE CORPS VITAL EST AFFECTÉ PAR LES DÉFLAGRATIONS DES ARMES LOURDES - Avril 1916

Au début de la Grande Guerre (Guerre de 1914-1918), les émotions atteignaient en Europe une violence inouïe, aussi bien parmi les "vivants" que parmi les tués lorsqu'ils revenaient à eux. Ce réveil prenait beaucoup de temps à cause des canons de gros calibre, mais nous en parlerons plus loin. L'atmosphère entière des pays belligérants étant en ébullition, émettait des courants de colère et de haine; semblable à un nuage rouge foncé, cette ambiance s'étendait autour de chaque être humain et au-dessus de la terre. Il y avait, pareils à des voiles de deuil, des traînées de couleur sombre qui se produisent toujours lors de désastres soudains, lorsque la raison est paralysée et que le désespoir étreint le coeur. Sans aucun doute, cet état de choses provenait du fait que les nations intéressées se rendaient compte qu'elles subissaient une catastrophe dont il leur était impossible de saisir toute l'étendue.

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Les corps du désir de la majorité des gens étaient traversés par de longues vagues de pulsations rythmiques qui tourbillonnaient avec une grande rapidité, disant plus clairement que des paroles n'auraient pu le faire: "Tuez, tuez, tuez donc!" Lorsque deux ou trois personnes se réunissaient ou qu'un groupe se formait pour discuter de la guerre, les pulsations rythmiques, qui indiquaient un dessein bien arrêté d'agir et d'oser, cessaient; les pensées et la surexcitation produites par la discussion ou le discours se traduisaient en projections coniques qui rapidement s'élevaient à une hauteur de 15 à 20 centimètres, puis éclataient en émettant une langue de feu. Certaines personnes produisaient simultanément un grand nombre de ces jets volcaniques mais d'autres, un ou deux seulement. Lorsqu'une de ces bulles avait éclaté dans un endroit du corps du désir, une autre apparaissait ailleurs, pendant toute la durée de la discussion, et des flammes en sortaient, colorant d'écarlate le nuage qui s'étendait au-dessus du pays. Lorsqu'une foule se dispersait ou que des amis se séparaient à l'issue d'une discussion de ce genre, le bouillonnement diminuait, les éruptions devenaient moins fréquentes, puis finalement cessaient pour faire place à nouveau aux longues pulsations rythmiques initiales.

Les manifestations de cette nature sont actuellement rares, même si elles existent encore; pour le plus grand nombre de belligérants, la colère explosive contre l'ennemi a cessé d'exister. On peut voir de nouveau la couleur de base orange de l'aura des peuples occidentaux; officiers et soldats semblent en être venus à considérer la guerre comme un jeu où chacun cherche à l'emporter en finesse sur l'autre. Elle est devenue un moyen d'exercer leur ingéniosité; toutefois, quelques frères lais de l'Ordre Rosicrucien pensent que la condition de colère réapparaîtra sous une forme modifiée quand cesseront les hostilités et que commenceront les négociations de paix.

Cette forme d'émotion, qui peut être appelée colère abstraite, diffère grandement de ce que l'on observe dans le cas d'une querelle ou d'une rixe dans la vie privée. Vue du côté occulte de la nature, une rixe montre que les hostilités existent avant que les coups ne soient échangés. Des formes de matière-désir dentelées, aiguës comme des poignards, se projettent les unes contre les autres comme des lances, jusqu'á ce que la furie qui les produisait se soit épuisée. En revanche, dans la colère patriotique, il n'y a pas d'ennemi personnel; les formes de matière-désir sont donc plus émoussées et font explosion sans quitter la personne qui les a produites.

Les hommes à l'aura bleu acier, si communs dans la vie civile où ils se créent des soucis pour des choses qui ne se produisent jamais et cristallisent ainsi autour de leur personne une armure saturnienne, étaient absents dans les armées. L'auteur suppose que la brutale obligation de partir pour le front a produit le choc qui a brisé la coque dans laquelle ils s'étaient enfermés; d'autre part, l'accoutumance au danger a fini par en produire le mépris. Il est indéniable que la guerre a grandement aidé ces personnes, car rien n'est plus opposé aux progrès de l'âme que la crainte et l'anxiété continuelles.

Autre fait remarquable: bien que les hommes engagés dans la guerre souffrent d'affreuses privations, le plus grand nombre n'en cultive pas moins une douce teinte bleu ciel qui révèle l'espérance, l'optimisme et un commencement de sentiment religieux de caractère altruiste. Ceci nous indique que le sentiment universel de la camaraderie (universal fellow-feeling) qui ne fait aucune distinction de croyance, de couleur ou de nationalité, se développe dans le coeur humain.

Au commencement de la guerre, les corps du désir des combattants tourbillonnaient à une vitesse vertigineuse; on remarquait aussi que, tandis que les gens mourant de maladie, de vieillesse ou d'accident dans la vie ordinaire reprennent conscience dans un délai variant de quelques minutes à quelques jours, les victimes de la guerre, dans un grand nombre de cas, restent privés de conscience pendant plusieurs semaines. De plus, il est surprenant de constater que les morts presque déchiquetés semblaient revenir à eux beaucoup plus vite que des milliers d'autres tués qui n'avaient que des blessures insignifiantes.

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Cette énigme n'a pu être résolue qu'après plusieurs mois. Mais avant d'étudier les causes de ce phénomène nous devons prendre acte d'un autre fait: lorsque les hommes morts en état de colère se réveillaient dans les mondes invisibles, ils commençaient généralement à se battre à nouveau avec leurs anciens ennemis et, jusqu'á ce que la grande oeuvre éducatrice entreprise par les Frères Aînés et leurs Aides Invisibles ait porté des fruits, ils erraient ça et lá, le corps mutilé et dans une grande angoisse à cause des êtres chers qu'ils avaient laissés derrière eux. Actuellement, de tels cas sont extrêmement rares et vite résolus. En effet, on enseigne, dans les mondes invisibles, que la pensée est capable de créer un nouveau bras, membre ou visage; d'autre part, la haine patriotique a disparu, et les "ennemis" qui connaissent la langage de leurs anciens adversaires fraternisent fréquemment à leur avantage mutuel. Le nuage rouge de la haine se dissipe, le voile sombre du désespoir s'est évanoui, et l'on ne voit plus d'explosion volcanique de colère, ni chez les vivants, ni chez les morts. Cependant, pour autant que l'auteur soit capable de lire les signes des temps dans l'aura des nations, il y découvre le dessein arrêté de jouer le jeu jusqu'au bout. On remarque cet état d'esprit même dans les foyers qui sont privés de plusieurs de leurs membres, et bien qu'un grand regret persiste envers les amis disparus, il ne subsiste point de haine envers l'ennemi terrestre. Ces sentiments sont partagés par les amis dans l'au-delá, dont beaucoup percent le voile, car l'intensité de ces sentiments est telle qu'elle va jusqu'á éveiller chez les "morts" le pouvoir de se manifester en attirant de la matière éthérique et gazeuse, souvent prélevée sur le corps vital d'un ami "sensitif", comme le fait un esprit à matérialisation qui se sert du corps vital d'un médium en état de trance. Alors, les yeux aveuglés de larmes s'ouvrent fréquemment en réponse à l'appel nostalgique d'un coeur aimant, et les êtres chers, maintenant dans le monde spirituel, sont visibles face à face, coeur à coeur.

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C'est lá la méthode naturelle pour cultiver le sixième sens, dont l'acquisition nous rendra finalement tous capables de reconnaître que l'homme est un esprit immortel et que la continuité de la vie est un fait dans toute la nature.

Pour comprendre la lenteur avec laquelle certains morts de la guerre revenaient à eux dans les mondes invisibles, il convient d'abord de reprendre d'une manière plus approfondie, l'étude des quatre éthers du corps vital faite dans la "Cosmogonie des Rose-Croix".

Les atomes des éthers chimique et vie, réunis autour du noyau de l'atome-germe (du corps vital) placé dans le plexus solaire, sont de forme prismatique et disposés de telle façon que lorsque l'énergie solaire pénètre dans notre corps par la rate, le rayon réfracté est rouge, couleur de l'aspect créateur de la Trinité, c'est-á-dire Jéhovah, le Saint-Esprit, qui gouverne la Lune, astre de la fécondation. C'est pourquoi le fluide vital solaire qui entre dans le corps humain par la rate se teinte d'une couleur rose pâle, souvent observée par les clairvoyants, lorsqu'il court le long des nerfs comme l'électricité le long des fils d'une installation électrique. Ainsi chargés, les éthers chimique et vital assurent l'assimilation qui entretient le corps, et la fécondation qui perpétue la race.

Durant la vie, chaque atome vital prismatique pénètre un atome physique et le fait vibrer. Pour vous faire une idée de cette combinaison, imaginez un petit panier en forme de poire, dont les parois seraient constituées par des fils métalliques en spirales courant obliquement d'un pôle à l'autre; ce sera l'atome physique: sa forme est presque identique à celle de notre Terre. L'atome prismatique vital y est inséré au sommet, qui est la partie la plus large, correspondant au pôle nord, et la pointe du prisme pénètre ainsi l'atome physique jusqu'au point le plus étroit qui correspond au pôle sud, le tout ressemblant à une toupie en marche, animée d'un mouvement oscillatoire et vibratoire. C'est de cette manière que notre corps est vivifié et capable de mouvement.

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(Il est à remarquer que notre Terre est, de manière identique, baignée par un corps d'éther cosmique et que les phénomènes appelés Aurore Boréale et Aurore Australe sont des courants éthériques faisant le tour de la Terre des pôles à l'équateur, comme le font les courants dans l'atome physique).

Les éthers-lumière et réflecteur sont les voies utilisées par la conscience et la mémoire. Ils sont quelque peu ténus chez l'individu moyen et n'ont pas encore pris une forme définie; ils interpénètre l'atome comme l'air interpénètre une éponge, et forment une légère atmosphère aurique autour de chaque atome.

A la mort, une séparation a lieu; l'atome-germe se retire de la pointe du coeur le long du nerf pneumo-gastrique saturnien, à travers les ventricules, puis quitte le crâne (Golgotha) en passant par les sutures entre les pariétaux et les occipitaux. Tous les atomes du corps vital sont libérés de la croix du corps physique par le même mouvement en spirale qui dégage tous les atomes prismatiques d'éther de leur enveloppe physique.

Selon les circonstances du décès, cette opération se fait avec plus ou moins de violence. Une personne âgée dont la vitalité a lentement décliné peut s'endormir et se réveiller de l'autre côté du voile sans avoir la moindre conscience de la manière dont s'est effectué le changement; une nature religieuse et pieuse qui s'est préparée par la prière et la méditation sur l'au-delá, peut également passer très facilement dans l'autre monde. Le décès par congélation paraît être, selon l'auteur, la mort accidentelle la plus aisée qui soit, ensuite viendrait la noyade accidentelle.

En revanche, chez une personne jeune et en bonne santé, surtout si son esprit est orienté vers l'impiété ou l'athéisme, l'atome éthérique prismatique interpénètre tellement l'atome physique qu'une violente torsion est nécessaire pour séparer le corps vital. Quand la séparation du corps physique d'avec les véhicules supérieurs est accomplie et que la personne est morte, les éthers-lumière et réflecteur se séparent de l'atome prismatique.

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C'est cette substance qui, comme le décrit la "Cosmogonie des Rose-Croix", est modelée en images de la vie écoulée, qui se gravent sur le corps du désir, lequel commence alors à ressentir les peines et les joies éprouvées dans la vie qui vient de prendre fin. Quant à la partie du corps vital qui est composée des atomes prismatiques des éthers chimique et vital, elle retourne au corps physique et plane au-dessus de la tombe jusqu'á ce qu'elle se décompose en même temps que lui.

Passons maintenant au point capital de notre explication: l'éther est une matière physique, et si les soldats tués d'un coup de fusil au cours d'un engagement peuvent être observés par des clairvoyants qui les voient un peu étourdis, mais néanmoins conscients, par contre, les terribles déflagrations des gros calibres ont pour effet de disperser pêle-mêle les atomes éthériques et, non pas d'éparpiller, mais de briser l'enveloppe aurique des éthers-lumière et réflecteur, base de la perception sensorielle et de la mémoire. Jusqu'au moment où cette enveloppe se reconstitue en sa relativité originelle, l'homme reste étourdi, dans un état presque comateux qui dure souvent des semaines. Dans de telles conditions, la fine substance éthérique ne se prête pas à la formation des images de la vie écoulée; elle est pour ainsi dire figée.

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Chapitre 12

NATURE DES ATOMES ÉTHÉRIQUES - NÉCESSITÉ DE L'ÉQUILIBRE - Mai 1916

Pendant que l'Ego, en voie de renaissance, traverse la Région de la Pensée Concrète, le Monde du Désir et la Région éthérique, il recueille dans chacun de ces mondes une certaines quantité de matériaux. La qualité de ces matériaux est déterminée par l'atome-germe, selon le principe de l'attraction des semblables, et leur quantité dépend des besoins de l'archétype que nous avons construit nous-mêmes au deuxième Ciel. La quantité d'atomes éthériques prismatiques qu'un esprit s'est ainsi appropriée est utilisée par les Anges de Justice et leurs agents à construire une forme éthérique qui est placée dans le sein de la mère, puis graduellement revêtue de matière physique qui forme le corps physique du nouveau-né.

Une petite partie seulement de l'éther recueilli par l'Ego trouve son emploi immédiat; le reste du corps vital de l'enfant, ou plutôt la matière avec laquelle ce véhicule sera complété plus tard, se trouve ainsi en dehors du corps physique.

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C'est pourquoi le corps vital d'un enfant dépasse beaucoup plus la périphérie du corps dense que ne le fait celui d'un adulte. Pendant la période de croissance, cette réserve d'atomes éthériques est utilisée pour activer le développement de tous les organes et membres du corps jusqu'au moment où, l'âge adulte étant atteint, le corps vital dépasse seulement de deux et demi à quatre centimètres le corps physique.

La science a établi que les atomes de notre corps physique se renouvellent sans cesse, de sorte que tous les matériaux qui composent aujourd'hui notre véhicule disparaîtront dans quelques années, mais chacun sait que les cicatrices et autres défauts de la peau subsistent de l'enfance à la vieillesse. Cela tient à ce que les atomes prismatiques d'éther qui composent notre corps vital restent inchangés du berceau à la tombe. Ils occupent toujours la même position relative, c'est à dire que les atomes prismatiques d'éther qui font vibrer les atomes physiques des orteils ou des doigts ne se déplacent pas dans les mains, les jambes ou quelque autre partie du corps, mais restent exactement à leur place initiale. Une lésion des atomes physiques entraîne une empreinte similaire sur les atomes prismatiques d'éther, et la nouvelle matière physique qui se moule par-dessus continue à présenter une forme et une structure semblables à celles qui existaient à l'origine.

Les remarques qui précèdent s'appliquent seulement aux atomes prismatiques d'éther qui correspondent aux solides et liquides du monde physique du fait qu'ils prennent une forme définie et qu'ils la maintiennent. Mais en plus, à son degré actuel d'évolution, tout être humain a une certaine quantité d'éther-lumière et d'éther réflecteur, véhicules de la perception sensorielle et de la mémoire, qui se mêlent à son corps vital. On peut dire que l'éther-lumière correspond aux gaz de notre monde physique; quant à l'éther réflecteur, la meilleure définition qui puisse en être donnée est de l'appeler hyperéthérique: c'est une substance très subtile, d'une couleur bleuâtre analogue à la partie centrale d'une flamme de gaz. Cette substance paraît transparente et semble laisser voir tout son contenu, mais elle n'en cache pas moins tous les secrets de la vie, parce qu'elle contient les annales de la Mémoire de la Nature.

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Les éthers-lumière et réflecteur, d'une nature diamétralement opposée à celle des atomes prismatiques d'éther qui sont stationnaires, sont volatiles et migrateurs. La quantité plus ou moins grande de cette matière que possède un être humain est un acquis; c'est le fruit de ses expériences ici-bas. A l'intérieur du corps, elle se mêle au courant sanguin, et lorsqu'elle s'est accrue jusqu'á la limite de saturation du corps, par le service et le sacrifice à l'école de la vie, on peut la voir à l'extérieur de celui-ci sous les couleurs bleu et or du corps de l'âme. Etant l'indice de la plus haute spiritualité, le bleu se réduit à un petit volume et peut être comparé au centre d'une flamme de gaz, tandis que la teinte or compose la plus grande partie du corps de l'âme et correspond à la lumière jaune qui entoure le centre. La couleur bleue n'apparaît pas au-dehors du corps physique, excepté chez les grands saints; seul le jaune est habituellement perceptible.

Au moment du décès, cette partie du corps vital se grave sur le corps du désir avec le panorama de la vie qu'il contient. La quintessence de toute l'expérience acquise dans notre vie est finalement enregistrée sur l'atome-germe comme conscience ou vertu, nous exhortant à éviter le mal et à faire le bien dans une existence ultérieure. Ainsi, la qualité de l'atome-germe se modifie de vie en vie. La quintessence du bien, extraite de la partie migratoire du corps vital dans une existence, détermine la qualité des atomes d'éther prismatiques stationnaires dans celle qui va suivre. Le maximum atteint dans une vie devient le point de départ dans la suivante; ainsi, nous gravissons graduellement les échelons de l'évolution vers la divinité.

D'après ce qui précède, il est évident que le corps vital est le véhicule des habitudes; tous les parents savent que pendant les sept premières années de l'enfance, alors que ce véhicule est en voie de formation, les enfants contractent leurs habitudes. La répétition est, en effet, la tonique du corps vital, et les habitudes dépendent de la répétition.

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Il n'en est pas de même du corps du désir, véhicule des sentiments et des émotions, qui changent en permanence, d'un moment à l'autre. Bien que l'éther qui constitue le corps de l'âme soit constamment en mouvement et se mêle au courant sanguin comme nous l'avons vu, ce mouvement est relativement lent, comparé à celui des courants du corps du désir; on peut dire que cet éther se meut comme un escargot, comparé à la lumière.

Les points mis en relief dans ce qui précède peuvent se résumer ainsi:

La matière-désir se meut a une rapidité comparable seulement à celle de la lumière.

Les deux éthers supérieurs voyagent aussi à une grande vitesse, mais beaucoup plus lentement que la matière-désir.

Les atomes prismatiques d'éther qui composent les éthers inférieurs sont stationnaires, mais leur taux vibratoire est élevé.

Les atomes denses sont aussi immobiles que le cristal dans le roc.

Quoi qu'on puisse nous dire ou dire de nous, les paroles des autres n'ont pas, en elles-mêmes, le pouvoir de nous faire du mal; c'est notre propre attitude mentale devant leurs propos qui, seule, détermine l'effet en bien ou en mal qu'ils produiront sur nous. En but à la persécution et à la médisance, Paul affirmait "rien de cela ne me trouble" (Actes 20:24 : manque dans certaines versions françaises). Tous ceux qui aspirent à l'avancement spirituel doivent cultiver l'équilibre, sans lequel le corps du désir se laisse aller à toutes sortes d'écarts, ou bien se fige, selon la nature des émotions: souci, colère, crainte, découlant de nos rapports avec autrui. Nous savons que si le corps physique est notre véhicule d'action, le corps vital lui confère le pouvoir d'agir, le corps du désir le stimule à l'action, tandis que l'intellect nous a été donné pour servir de frein à l'impulsion. La "Cosmogonie des Rose-Croix" nous enseigne que les formes-pensées venant, soit de l'intérieur soit de l'extérieur, sont sans cesse projetées vers le corps du désir afin de faire naître un sentiment qui incite à l'action, mais que la raison devrait gouverner la nature inférieure et laisser au Moi supérieur la liberté d'exprimer ses aptitudes divines.

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Nous savons aussi que la pensée habituelle a le pouvoir de modeler même la matière physique, car la nature d'un sensuel est facile à discerner sur ses traits qui sont aussi grossiers et épais que ceux de l'idéaliste qui suit ses penchants spirituels sont fins et délicats. Le pouvoir de la pensée est encore plus grand dans sa puissance à modeler les véhicules subtils. Nous avons déjá vu que la crainte et les soucis peuvent paralyser le corps du désir de celui qui a pris cette habitude; et il est bien certain qu'en cultivant un état d'esprit optimiste en toutes circonstances, nous pouvons accorder notre corps du désir à toute tonique désirée. Après un certain temps, cela devient une habitude. Reconnaissons qu'il est difficile de maintenir le corps du désir dans une voie définie, et l'effort doit être fait par tous ceux qui aspirent à avancer spirituellement.

En ce qui concerne l'effet de cette polarisation au point de vue occulte, on peut en apprendre beaucoup par certaines coutumes de sociétés dites secrètes. Comme chacun sait, ces organisations placent toujours à la porte un gardien qui a pour consigne d'interdire l'entrée à quiconque n'est pas en possession du mot de passe et des signes de reconnaissance; cela fonctionne très bien dans la mesure où les personnes concernées agissent seulement dans leur corps physique; mais les secrets de ces organisations n'en sont pas pour ceux qui sont capables de s'y rendre dans leur corps vital. Il en va tout autrement dans un véritable ordre ésotérique tel que celui des Rosicruciens, par exemple. Aucun gardien n'est en faction à la porte de ce Temple lorsque, chaque nuit, la Messe Mystique de Minuit est célébrée. La porte est grande ouverte à tous ceux qui ont appris à prononcer le "Sésame, ouvre-toi". Mais ce n'est pas un mot de passe verbal; l'initié qui désire assister à ce service doit savoir comment accorder son corps de l'âme au taux de vibration particulier de cette nuit-lá.

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En outre, cette vibration est différente pour chaque nuit de la semaine; ceux qui, par exemple, ont appris à se mettre en accord avec la tonique du samedi consacré aux réunions du premier degré ne peuvent pénétrer dans le Temple avec ceux qui se réunissent le dimanche, le lundi, le mardi, etc.

La loi cosmique qui règle ce qui vient d'être dit s'applique aussi à la maîtrise et à l'effet de nos pensées, de nos sentiments et de nos émotions. Paul dit bien que nous sommes le Temple du Dieu vivant, qui est notre Moi supérieur. Nous avons aussi créé autour de nous une aura subtile sous la tutelle des Hiérarchies divines qui gouvernent les sept planètes Saturne, Soleil, Lune, Mars, Mercure, Jupiter et Vénus. L'Univers ou Grand Monde, est appelé en langage mystique la Lyre à sept cordes d'Apollon. Notre organisme individuel, ou microcosme, est une réplique ou image de Dieu, et il nous appartient d'éveiller en nous-même un écho de cette musique des sphères. Beaucoup d'entre nous ont malheureusement appris à répondre trop souvent aux vibrations saturniennes du chagrin, de la tristesse, de la crainte, des soucis, qui entraînent la cristallisation de notre corps du désir; et il y aurait pour tous un avantage durable à cultiver les vibrations spirituelles du Soleil, remplissant ainsi notre vie d'optimisme et de lumière solaire qui dissiperont la dépression et le découragement, mis désormais dans l'impossibilité d'embrumer notre aura.

L'équilibre est de première nécessité pour l'avancement spirituel, et tous ceux qui y aspirent devraient adopter la devise de Paul: "Rien de cela ne me trouble".

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Chapitre 13

EFFETS DU REMORDS - DANGERS DES BAINS TROP FRÉQUENTS - Juin 1916

Parmi nos étudiants, beaucoup pratiquent les exercices spirituels indiqués par les Frères Aînés en vue d'activer la croissance de l'âme, même s'ils ne se sentent pas encore enclins à entrer dans le Sentier; peut-être est-il utile d'examiner l'effet occulte accompagnant ces émotions.

Au cours de la rétrospection, lorsque l'aspirant à la vie spirituelle revoit les divers évènements de la journée en sens inverse, il rencontre un incident au cours duquel il a fait tort à l'un, manqué d'aider un autre ou, d'une manière quelconque, n'a pas vécu conformément à ce qu'il considère comme son idéal de conduite; on lui enseigne à cultiver un intense remords, dans le but d'effacer l'enregistrement que l'acte a gravé sur l'atome-germe du coeur, où il resterait imprimé jusqu'á ce qu'il soit effacé par les souffrances du purgatoire, à moins d'être enlevé par un moyen qui permet d'assumer l'acte, tel cet exercice.

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Au purgatoire, le processus de purification s'effectue par la force centrifuge de répulsion qui tire et déchire la matière-désir dans laquelle l'image est formée par-dessus son moule éthérique. A ce moment même, l'âme souffre exactement comme elle a fait souffrir les autres, par suite de la condition très particulière des régions inférieures du monde du désir où est situé le purgatoire. Quelques voyants, incapables de se mettre en contact avec les régions supérieures, considèrent le Monde du Désir comme illusoire; ils ont raison en ce qui concerne les régions inférieures, où tout apparaît inversé comme dans un miroir. Cette particularité n'est pas sans objet; rien n'est vain dans le royaume de Dieu, tout concourt à un but des plus sages. Ce renversement place l'âme qui a péché dans la situation de sa victime, de sorte que lorsque se déroule, sur l'écran de sa vie passée, une scène où elle a lésé quelqu'un, cette âme ne reste pas simplement spectatrice de la scène évoquée, mais prend à ce moment, la place de la victime du mal. Elle ressent ainsi la douleur ressentie par la personne lésée, car la force centrifuge de répulsion mise en oeuvre pour enlever l'image sur le corps du désir de l'auteur de l'injustice doit, pour le moins, égaler la haine et la colère de la victime qui, à l'époque en ont gravé l'image sur l'atome-germe.

Pendant l'exercice de rétrospection, l'aspirant s'efforce de reproduire les faits dans leur réalité; il essaie de visualiser les scènes où il a mal agi, et le remords qu'il cherche à éprouver doit, nous l'avons dit, être au moins égal au ressentiment provoqué chez l'offensé. Ainsi s'effacera l'enregistrement du tort commis, exactement comme le fait la force centrifuge de répulsion en effectuant l'éradication du mal au purgatoire, dans le but d'en extraire la qualité d'âme que nous appelons Conscience qui exerce un effet dissuasif aux heures de tentation. Utilisée ainsi, l'émotion du remords débarrasse, purifie le corps du désir des mauvaises herbes et de l'ivraie; elle laisse se développer de nombreuses vertus qui s'épanouissent en progrès spirituels et multiplient les occasions favorables de service dans la vigne du Maître.

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Mais de même que la force latente contenue dans la poudre et autres substances explosives peut être employée pour contribuer aux plus grand progrès de la civilisation ou pour surpasser les actes barbares les plus sauvages, ainsi on peut mésuser de l'émotion du remords à tel point qu'elle devient nuisible pour l'âme et une entrave au lieu d'une aide. Si nous cultivons sans cesse la tendance au remords, nous gaspillons un grand pouvoir qui pourrait être utilisé aux buts les plus nobles de la vie, car l'abandon constant aux regrets affecte le corps du désir à peu près de la même manière que l'abus des bains nuit au corps physique.

Nous avons établi précédemment que l'eau a une grande affinité pour l'éther et l'absorbe avec avidité. Lorsque nous prenons un bain dans des conditions normales, l'eau débarrasse notre corps vital d'une grande quantité d'éther usé et toxique, pourvu que nous n'y restions qu'un temps raisonnable. Après le bain, le corps vital se trouve quelque peu affaibli, et nous éprouvons une sensation de lassitude; mais si nous sommes en bonne santé et que nous n'avons pas trop prolongé le bain, la déficience est bientôt comblée par le courant de force qui pénètre dans le corps par la rate. Lorsque ce flux d'éther frais a remplacé la substance viciée enlevée par l'eau, nous ressentons un renouveau de vigueur que nous attribuons au bain, sans comprendre exactement les faits tels qu'ils viennent d'être expliqués.

Par contre, pour les personnes qui ne sont pas en parfaite santé, l'habitude du bain quotidien, ou même encore plus fréquent, finit par dépouiller le corps vital de tout l'éther en excédent. L'apport d'éther entrant par la rate diminue aussi par suite de la perte de vigueur de l'atome-germe du corps vital situé dans le plexus solaire et de l'affaiblissement de ce corps.

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Ainsi, ces personnes n'arrivent pas à se rétablir entre ces déperditions d'énergie répétées, et leur santé physique s'en ressent; elles perdent en permanence leurs forces et sont sujettes à devenir complètement impotentes.

"En bas comme en haut", dit l'aphorisme d'Hermès, énonçant ainsi la grande loi d'analogie, clé de tous les mystères. Lorsque, pendant l'exercice de rétrospection du soir, nous utilisons la force centrifuge du remords pour arracher de nos coeurs les mauvaises actions, l'effet est semblable à l'action de l'eau qui, au cours du bain, enlève l'éther usé et toxique de notre corps vital et fait ainsi place à un flux d'éther pur qui favorise la santé. Quand le mal a été consumé dans le feu sacrificatoire du remords, la substance toxique enlevée fait place à un flux de substance-désir qui est moralement plus saine et fournit un meilleur terrain aux actes nobles. Mieux nous sommes purifiés par ce remords, plus grand est le vide produit et meilleure est la qualité de la nouvelle substance que nous attirons dans nos véhicules subtiles.

Par contre, si nous nous laissons aller des journées entières aux regrets et aux remords, nous allons au-delá des effets du purgatoire, où le temps se passe à déraciner le mal, mais la conscience se détourne de chaque empreinte à mesure que celle-ci a été détruite par la force de répulsion. Il en va différemment ici- bas, où l'interpénétration du corps du désir et du corps vital nous permet de faire renaître une image dans notre mémoire aussi souvent que nous le voulons. Et tandis qu'au purgatoire le corps du désir se dissout graduellement par l'expurgation du panorama de la vie, il vient s'ajouter, sur le plan physique une petite quantité de matière-désir pour remplacer celle qui a été expulsée par le remords. Ainsi, le remords et le regret, lorsqu'on s'y abandonne par trop, produisent sur le corps du désir le même effet que les bains trop fréquents sur le corps vital. Ces deux véhicules épuisent leur force par une épuration excessive, et c'est pourquoi il est aussi dangereux pour la santé morale et spirituelle de se laisser aller inconsidérément aux sentiments de regret et de remords, qu'il est préjudiciable au bien-être physique de prendre des bains trop fréquents. Agissons donc avec discrimination dans les deux cas.

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Dans notre exercice de rétrospection, nous devons nous donner de toute notre âme aux sentiments de regret et de remords, nous efforcer de verser des larmes de feu qui brûlent jusqu'au plus profond de notre être, et faire le processus de purification aussi complet que possible, afin que, par cela même, nous croissions en grâce. Mais, après avoir terminé l'exercice, il faut, ainsi que nous le faisons au purgatoire, considérer les incidents de la journée comme clos et les oublier entièrement, sauf ce qui a trait à une restitution, une excuse à faire ou tout autre acte propre à satisfaire aux exigences de notre conscience. Et ayant ainsi acquitté notre dette, notre attitude doit être d'un optimisme infaillible. "Si vos péchés sont comme le cramoisi, ils deviendront blancs comme neige. Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous?" (Isaïe 1:18, Romains 8:31). Cette attitude nous fait mourir chaque jour à la vie du vieil homme pour renaître le lendemain dans un renouveau de vie spirituelle, puisque notre corps du désir ainsi rénové est prêt à servir un idéal plus élevé que la veille (2 Pierre 3:8, Psaume 90:4)).

Et alors que nous parlons du regret et du remords dans leurs rapports avec le problème de la croissance de l'âme, et leurs effets sur nos corps subtiles, nous pouvons aussi mentionner avec profit l'effet du regret dirigé dans d'autres directions. Il y a des gens qui vivent avec le regret comme avec un aimable compagnon, qui ne les quitte ni le jour ni la nuit. Ils le prennent avec eux au bureau, à l'atelier, aussi bien qu'á l'église ou aux repas. Ils le choient comme leur bien le plus précieux et ne voudraient, pour rien au monde, vivre sans regretter ceci ou cela.

De même que le vampire aspire le corps vital de ses victimes et s'en nourrit, ainsi les pensées continuelles de regret et de remords deviennent un élémental de matière-désir qui agit à la façon d'un vampire, suce la vitalité de la pauvre âme qui l'a formé et, du fait de l'attraction des semblables, encourage la continuation de cette habitude morbide.

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Nous n'aidons pas nos chers disparus par des regrets que nous nous plaisons à considérer comme la preuve de notre fidélité, alors que nous leur nuisons. Ils ont quitté l'actuelle sphère d'expérience et avancent vers d'autres plans où des leçons différentes doivent être apprises, et nous les retardons par nos pensées, car ils sont très proches de nous pendant les premiers temps de leur séjour dans l'autre monde; nous leur devons de n'avoir pour eux que des pensées d'encouragement et de tendresse au lieu de regrets égoïstes qui leur font du tort, et à nous aussi. Le regret constitue d'ailleurs un obstacle à tout développement spirituel, car aussi longtemps que l'élémental-pensée ainsi créé s'attache à nous comme un vampire, nous ne pouvons avancer sur ce rude sentier.

Comme le vautour se nourrit de la chair des carcasses en putréfaction, aussi odieux sont les vains regrets qui vivent de la contemplation morbide du passé et de ses erreurs. Il est de notre devoir de les chasser de notre mental, comme nous chasserions un vautour de notre habitation s'il cherchait à en gagner l'entrée.

Cultivons donc plutôt une attitude d'optimisme en toutes choses car toute chose concourt au bien. Dieu est au gouvernail, rien ne peut aller vraiment mal, et tout finira pour le mieux en temps voulu.

 

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