KARL VON ECKARTSHAUSEN

 

Peut-être avez-vous été intéressés par les lettres à d'ECKARTSHAUSEN traduites des Rays de janvier à juin 1986, et certains d'entre vous souhaiteraient en savoir l'origine.

Le siège directeur d'Océanside a reçu ces lettres d'Allemagne mais n'a aucun renseignement sur leur auteur. Vous avez sans doute remarqué que le titre est ; "Lettres d'un rosicrucien écrites à Karl von ECKERTSHAUSEN et non pas écrites par ECKERTSHAUSEN.

Cependant, l'un des rares livres de d'ECKARTSHAUSEN qui ait été traduit en français s "La nuée sur le sanctuaire" (1802) réunit également les lettres et son contenu en est très voisin.

Antoine FAIVRE, dans son livre de 788 pages "ECKARTSHAUSEN et la Théosophie chrétienne" (librairie Klincksieck - 1969 - Paris) nous dit qu'on n'a jamais publié d'oeuvres complètes de Karl von ECKARTSHAUSEN. "Nous avons affaire à un auteur aimant beaucoup se répéter et prenant plaisir à publier un même texte sous des titres divers. Il lui arrive parfois de présenter les pages d'autrui sans signaler d'une façon très précise qu'il n'en est pas l'auteur. Lorsqu'il explique clairement qu'un écrit n'est pas de lui, il arrive que plusieurs années après, un éditeur le lui attribue. Certains ouvrages anonymes ou signés d'un pseudonyme ne lui avaient pratiquement jamais été attribués alors qu'il en est l'auteur.

Les bibliothèques de Munich sont loin de conserver tous les ouvrages du théosophe. C'est surtout à la bibliothèque de la Faculté Libre de Théologie protestante de Lausanne que va toute ma gratitude. Il y a là un grand nombre de livres de d'ECKARTSHAUSEN, et surtout on y trouve des ouvrages que l'en aurait bien peu de chance de découvrir ailleurs. Toutefois, les rééditions et les traductions sont parfois tellement nombreuses qu'il est impossible au chercheur de tenir chacune d'elles entre ses mains. Si l'on voulait prendre connaissance par soi-même de toutes les éditions allemandes de "DIEU est l'Amour le plus pur" (1790) par exemple, plusieurs années consacrées à cette unique recherche n'y suffiraient pas".

Antoine FAIVRE donne une liste de plus de cent livres attribués à d'ECKARTSHAUSEN. La plupart des titres sont en allemand, traduits parfois du néerlandais, en russe, en suédois, en anglais, hongrois, tchèque , etc...

Voici quelques titres de livres traduits en français, outre les deux mentionnés plus haut s

- Eclaircissements sur la science cachée de la philosophie et les mystères sacrés de la nature (1788)

- La véritable politique des personnes de qualité (1790)

- Le voyage de Kosti du matin vers midi (voyage initiatique) fr.795)

- Les plus récentes découvertes sur la lumière, la chaleur et le feu pour les amateurs de la physique et de la chimie (1798)

- Avis aux amis des recherches secrètes de la nature - ou découvertes intéressantes pour le commencement du 19° siècle (1799)

- Essais chimiques (manuel d'alchimie rosicrucienne) (1801)

SA VIE

Son père, Karl von HAIMHAUSEN",est un noble Bavarois dont l'épouse ne lui a pas encore donné d'enfant après 19 ans de mariage. Le 28 juin 17 52, la fille de son intendant Maria Anna ECICART met au monde un garçon dont Karl se reconnaît le père. Maria Anna a 40 ans à la naissance de son fils, elle est célibataire. Karl von HAIMHAUSEN en a 44. Le fruit de cette union illégitime va porter le prénom de son père et un nom de famille inventé tout spécialement dans lequel on retrouve celui de sa mère -ECKART - et une partie du nom paternel -H/OJSEN- mais jamais une orthographe définitive ne sera précisée. ECKARTSHAUSEN ou ECKHARTSHAUSEN ( Les Rays indiquaient ECKERTSHAUSEN) la plus utilisée étant ECKARTSHAUSEN.

ECKARTSHAUSEN donc, né bâtard, après avoir reçu une éducation soignée, va devenir l'un des écrivains les plus féconds de toute l'Albmagne. Il va mériter l'estime de HERDER, l'amitié de SAILER et de JUNG-STILLING, l'attention de GOETHE, SCHILLER, BAADER et SAINT-MARTIN, en attendant de devenir l'un des auteurs préférés du tsar Alexandre 1°. Il sera surtout l'une des figures les plus importantes de la Théosophie chrétienne occidentale. Sa famille paternelle met tout en oeuvre dans ses premières années pour faire le silence autour d'un évèpement sans doute fort peu désiré.

Le thème du bâtard ne va pas cesser de le hanter. Sa première oeuvre publiée à 26 ans s'intitule "Le préjugé du rang et de la naissance". Cinq ans plus tard paraît un conte intitulé "Le bâtard". En 1786 il écrit "Raynald ou l'enfant de la nature et de l'Amour" dont le héros est fier d'être bâtard et s'en vante.

Son père, avant sa mort en 1775 a fait les démarches nécessaires à la "légitimation" de son fils qui est anobli en 1776. La même année, Karl obtient le poste de Conseiller Aulique bavarois, distinction plus honorifique que pratique, mais étroitement liée aux activités judiciaires auxquelles il se consacrera quelques années à partir de 1779.

Il prend très au sérieux les quelques responsabilités qui lui incombent dans ce domaine. Sa grande charité, l'amour qu'il porte à ses semblables, son désir de soulageras malheureux s'expriment -entre autres témoignages- en 1783, dans une pièce qu'il intitulera précisément "Le Conseiller Aulique". Il y fera dire à l'un de ses personnages que cet emploi serait bien triste s'il ne fournissait maintes occasions de faire du bien au xhommes.

En 1777, il est admis à l'Académie des Sciences de Munich dont il sera un membre assidu jusque vers 1800. En 1778 il se marie avec la fille d'un capitaine alsacien, mais elle meurt deux ans plus tard en mettant au monde un enfant qui meurt également. Il se remarie avec la fille du médecin personnel du Prince Electeur dont il aura de nombreux enfants.

En 1782, le pape Pie VI se rend à Munich. C'est ECKARTSHAUSEN qui en tant que membre de l'Académie des Sciences est charqé du discours d'accueil. Il traite "De l'influence de la religion sur les Sciences et des sciences sur la Religion". Il remet lui même au pape le texte de son discours. Le pape exprime sa satisfaction.

Au cours de la période 1171-1186, ECKARTSHAUSEN cherche encore sa voie. Il écrit facilement dans des domaines divers. Depuis la publication en 1788 du premier volume des Eclaircissements sur la Magie, jusqu'à sa mort en 1803, on peut dire que sa mystique spéculative commence à s'exprimer. Cette oeuvre philosophique ne va pas sans tribulations.

Sa situation matérielle n'a jamais été très confortable. La lettre qu'il envoie à l'Electeur, à la mort de sa 2° femme, nous révèle ses problèmes matériels les plus urgents. En 1801, ne parvenant guère à payer ses dettes, il discute, sollicite, cherche des compromis. Depuis quelques années, on lui a retiré une partie de son traitement. Comment, dès lors, vivre avec une femme et cinq enfants ? (l'Académie ne lui verse pas de pension, bien qu' il y ait été très actif).

Heureusement ses activités d'écrivain auxquelles il consacre maintes nuits lui permettent d'améliorer un peu cette situation. L'Académie n'approuve pas toutes les idées d'ECKARTSKAUSEN. Il a cependant des admirateurs. Esprit assez universel, il a une conscience aîgue gue des problèmes de son temps. Il s'efforce de répandre des idées modernes dans la mesure où elles lui semblent favoriser un idéal de généreuse fraternité.

ECKARTSHAUSEN était-il franc-maçon ? A-t-il fait partie d'une loge de Gold und Rosenkreuzer ? Il cite volontiers Francis BACON le ton qu'il prend parfois pour nous entretenir des plus hauts mystères rappelle les ouvrages d'ANDREAE et les premiers manifestes rosicruciens du début du XVII° siècle, mais d'après Antoine FAIVRË, cela n'implique pas son appartenance à l'un de ces ordres.

Pourtant, ECKARTSHAUSEN nous parle, dès 1792, d'un enseignement reçu qui lui aurait été dispensé par un homme "plein de sagesse et de bonté". Il affirme, d'autre part, dans "La nuée sur le sanstuaire" que les membres de la "communauté de Lumière" ne constituent pas une société secrète.

" On ne doit se représenter, par cette communauté, aucune société secrète se rassemblant dans de certains temps, se choisissant ses chefs et ses membres et se fixant certains buts. Toutes les sociétés, quelles qu'elles soient, ne viennent qu'après cette communauté intérieure de la Sagesse ;elle ne connait aucune des formalités qui sont l'ouvrage des hommes. Celui qui est mûr s'ajoute à la chaîne, peut-être, souvent quand il s'en doute le moins. Chercher à atteindre la maturité doit être l'effort de celui qui aime la Sagesse. Dans cette communauté sainte est le dépôt originel des sciences, les plus antiques du genre humain. Elle unit à ses propres forces supérieures, et comprend des membres de plus d'un monde."

La correspondance d'ECKARTSHAUSEN avec SAILER et SCHMID, à partir de 1796 jusqu'à sa mort, nous fournit des détails biographiques concernant sa vie quotidienne s déménagement, maladie, dattes etc.. et également certaines de ses expériences mystiques. Il s'est senti troublé par un esprit tendant" à le convaincre qu'il se trouvait au bord de la folie ; là-dessus, il fut contrarié de divers côtés puis "triste jusqu'à la mort". Il avait parfois l'impression d'entendre un éclat de rire moqueur ? il voyait alors son passé sous les traits les plus noirs : ce qu'il avait fait de bien se présentait comme de la faiblesse, ce qu'il avait fait de juste, comme de l'égoïsme ; sa douceur même n'était plus qu'un trait caractériel.

Mais, ECKARTSHAUSEN réalisa que cette voix là n'était pas celle de l'amour; et ce qui n'est pas amour ne vient pas de DIEU. Il se mit à invoquer JESUS, son esprit trouva le repos. Alors réapparurent les vérités qui lui avaient été montrées tout d'abord. Son âme fut calme. C'est seulement lorsque la mer n'est pas agitée qu'elle accueille dans sa pureté les rayons du soleil. En 1802 il semble avoir trouvé un apaisement définitif, malgré les ennuis que lui procure la vie profane. Il est fatigué de devoir toujours lutter pour subsister, mais il croit avoir atteint le terme de ses épreuves. On a l'impression qu'il devine sa mort prochaine.

Voici un extrait d'un témoignage d'Eugène CANSELIET sur lui :" Karl von ECKARTSHAUSEN se range en bonne place, parmi les auteurs qui ont le mieux fait sentir que la science ne peut être sans la philosophie, ni surtout sans la foi. Substantif par lequel nous ne sauriens entendre l'aveugle et vaniteuse croyance aux possibilités du génie humain, faussement merveilleuses et sans limites, seulement en apparence. La Foi demeure indivisible comme la vérité dont elle est la prescience. Elle doit être scientifique et religieuse, spécialement au sens profond de l'adjectif latin religiosus, qui dote de conscience. Telle apparaît, en bref, la doctrine de d'ECKARTSHAUSEN qui est celle de"l'alchimie, ainsi conduite jusqu'à mi-chemin de l'illumination uniquement spirituelle des Saints... Est-il possible de penser, d'admettre raisonnablement, que Kar von ECKARTSHAUSEN ait expérimenté, dans le laboratoire, la discipline, les théories philosophiques qu'il avait établies à la lumière et sous l'égide de l'ancestrale tradition? Nous le croyons, pour notre part, devant les lignes qui terminent "Les essais chimiques" - cet opuscule opératoire du savant théosophe de Germanie - et qui nous parlent de la matière brute, génératrice de la Pierre des Sages".

Pour finir, voici un poème d'André SAVORET (Esotériste chrétien auteur de nombreux essais sur l'alchimie, les mythes, la psychanalyse...) publié en 1959 :

A Karl von ECKARTSHAUSEN

Quoique n'étant point Rose-Croix, - Ni de fait, ni de parrainage -Il me vient de te rendre hommage Tous les deux nous savons pourquoi...

Si bien pauvre est mon témoignage Et si mes vers sont maladroits, D'une estime, fondée en droit, Ton âme ne peut prendre ombrage.

Sage possesseur de la pierre, Tu ne connus point le désir D'oeuvrer afin de t*enrichir.

Et, Chrétien, choisis de mourir Selon la norme coutumière, Sans longévité légendaire.