Advaya-Târaka Upanishad (L' Upanishad du Passeur)



 


 

Introduction


 

I L'Advaya-Târaka Upanishad en est un bon exemple, puisqu'elle présente un aspect très particulier du yoga et assure que la connaissance de celui-ci suffit à la réussite du but suprême. D'autres Upanishads, évoquant d'autres aspects du yoga, assureraient la même chose, sans qu'il y ait discordance, le propre d'une célébration étant, par définition, de placer l'objet célébré au-dessus de tous les autres. Signalons que c'est d'ailleurs une constante de la littérature sanskrite : les hymnes védiques, par exemple, fons systématiquement de la divinité dédicataire "le plus grand des dieux, la plus haute déesse", etc. Et un même auteur peut successivement dire : "Tu es le Meilleur" ou même : "Tu es l'Unique" à Indra, puis à Agni, à Varuna, à Mitra, etc. Et il y a là bien davantage qu'un simple artifice littéraire ; il s'agit en fait de la reconnaissance de la multiplicité du rées : les dieux sont nombreux parce qu'ils occupent de nombreux secteurs de la Réalité et chacun d'eux est parfaitement adapté à sa fonction (dhâman) ; il est donc légitime de le saluer comme le Meilleur : il l'est effectivement, à sa place. De la même façon, les chemins spirituels sont nombreux qui conduisent au Salut, et chacun est exactement adapté : on peut donc célébrer celui-ci ou celui-là en disant qu'il est "le plus efficace" car il l'est effectivement, dans son ordre.

II L'Upanishad commence par rappeler (str. 1) qu'elle ne concerne que ceux qui sont bien avancés dans la voie spirituelle. Il s'agit donc d'un enseignement de haut niveau destiné au sâdhaka (disciple), non au novice. Les strophes 2 et 3 expliquent alors qu'il va s'agir dans la suite du texte d'une forme de méditation (dhyâna) s'accompagnant de "visions intérieures". Etant entendu que ces manifestations colorées ne sont que le vêtement, l'apparence, le signe du brahman suprême. Mais les obtenir n'est pas aisé ; on peut y parvenir, dit la strophe 4, de trois manières.

A) D'abord l'expérience "intérieure" (antar-lakhya), exposée dans la strophe 5. Elle consiste à méditer sur la Kundalini, l'Energie (shakti) semblable à un serpent femelle "enroulé, lové" (Kundalini) à la base du corps subtil. Eveillée par le prâna (souffle vital) mis en jeu par la méditation profonde (dhyâna), la Kundalini, monte par le conduit central (sushumnâ), "l'artère du brahman", jusqu'au sommet du crâne. Le signe de la réussite est la vision par le méditant d'une lumière bleue (nîla-jyotih) en haut de son front, accompagnée de l'audition d'un son étouffé (phûtkâra shabda). Il est alors gagné par une joie ineffable, avant-goût de la béatitude éternelle dont joie et l'âme délivrée.

B) Il existe aussi une expérience "extérieure" (str. 6) (bahirlakshya), qui se distingue de la précédente en ceci que les manifestations colorées sont plus diverses et paraissent se situer non pas à l'intérieur du front (ou du coeur), mais en avant de celui-ci, à l'extérieur donc. LUpanishad précise ces visions à quatre, six ou douze doigts en avant du nez. Il y a également d'autres manifestations colorées au niveau du sol et surtout au-dessus de la tête, ces dernières étant les meilleures puisque, nous dit-on, les percevoir c'est gagner l'immortalité (amritatva).

  1. Reste enfin, l'expérience dite "intermédiaire" (madhyalakshya), que décrit la septième strophe. Elle consiste en la perception directe (sans méditation, semble-t-il) d'une lumière surnaturelle qui n'est ni celle du soleil, ni celle du feu, ni celle du ciel diurne. Lumière à la fois multicolore

( chitra) et indivisible (a-khanda), qui n'est autre que la manifestation de l'Ether (âkasha) "sans qualités" (autre nom de la Substance primordiale, identique au brahman, lui aussi "sans qualités"). Cette perception de l'Ether essentiel (paramâlcasha) conditionne celle, corrélative, des cinq Ethers manifestés, correspondant aux cinq domaines de perception et d'action : la vue et le champ de vision, l'ouïe et le champ d'audition, etc. Ainsi le Yogin prend possession à la fois de lui-même (les cinq sens) et de l'univers (les cinq secteurs de la Réalité).

D) La suite du texte ne concerne plus que les deux formes (l'extérieure et l'intérieure) du târaka-yoga. Ces deux formes, en effet, dit la neuvième strophe, sont semblables à la double image du soleil : celle qui brille là-haut dans le ciel représente le macrocosme ; celle qui brille en nous-même, dans notre "espace intérieur" (shiro-madhya-stha âkashah : "l'Ether situé au milieu de la tête"), représente le microcosme. Le but du yoga étant de permettre la réalisation effective du macrocosme. Le but du yoga étant de permettre la réalisation effective du macrocosme et du microcosme dans l'individu qui le pratique.

E) La longue strophe 10 explique, à ce propos, que le mental (manas) est un instrument nécessaire dans le progrès spirituel. La méditation, en effet, s'accompagne de perceptions visuelles qui peuvent prendre forme (mûrti) ou non (a-mûrti). Mais, insiste l'Upanishad, qu'il y ait ou non des images, et que celles-ci soient extérieures ou intérieures, les facultés mentales restent actives. On les perçoit avec l'oeil intérieur, certes, mais le travail de celui-ci reste lié au fonctionnement du manas (manoyuktena cakshushâ).

F) l'Upanishad s'achève alors (str. 11 et suivantes) par la recommandation : à le faire, on gagne quelques-uns des pouvoirs merveilleux (siddhi) et notamment celui de purifier et de sanctifier l'endroit où l'on séjourne (str. 12). Suit (str. 14 à 18) un hymne au maître spirituel, car il est bien entendu que l'on ne peut pratiquer seul un tel yoga. Enfin, conclusion habituelle (str. 19 et 20) sur les avantages qu'il y a à réciter l'Upanishad.

III II reste maintenant à comprendre ce qu'est exactement l'enseignement donné par l'Upanishad. Le titre en effet n'est pas aussi limpide que l'on pourrait le penser. Il est formé de deux mots, un adjectif, advaya, et un substantif, târaka. Le premier signifie "sans (a-) second (-dvaya)", ou "sans double, sans couple", donc "unique". Parfois utilisé comme substantif, advaya désigne l'Ultime Réalité en tant qu'elle est Unique, donc le brahman (ou le purusha). Quant à târaka, c'est également un adjectif utilisé comme nom et dont le sens est "sauveur", ou plus exactement "celui qui fait traverser (les difficultés, ou les dangers, comparés à un fleuve dangereux)", donc : "passeur". Cette signification apparaît nettement dans l'Upanishad elle-même ou on lit (str. 3) : sam-târayati tasmât târakam iti, "puisqu'il fait passer, on l'appelle le Passeur". Et le contexte explique que l'obstacle à franchir, c'est "le fleuve angoissant de l'existence" (samsâra-mahadbhaya). On est donc en terrain familier puisque c'est un leitmotiv des Upanishads que de présenter le salut comme une délivrance (mukti, moksha) des liens de la transmigration (samsara). De plus, le samsara, qui par définition est multiplicité, s'oppose tout naturellement à l'unité essentielle de l'état principiel, celui auquel il faut faire retour pour être sauvé. On peut donc traduire advaya-târaka par "le Passeur (qui conduit à) la non dualité" ou "le moyen salutaire par lequel on fera retour à l'unité".

On observera cependant que l'Upanishad, dans sa troisième strophe, identifie târaka et brahman, quitte à indiquer immédiatement après que "le Passeur" est en réalité le nom d'une certaine forme de yoga. C'est d'ailleurs ce sens particulier qui prévaudra dans la suite du texte. Il faut donc admettre finalement que târaka est une sorte de nom propre désignant une technique particulière. On songe évidemment aux Yoga-Sûstras de Patanjali, où le mot târaka apparaît une fois (3. 55) comme nom d'une certaine forme de connaissance (tarakam... jnânam) "née du discernement" (vivéka-jam) et "englobant toute la réalité" (sarvavishayam). Qu'une telle connaissance soit "salvatrice" (târaka) découle du fait qu'elle consiste en une vision unifiée (non duelle : advaya) de la réalité : le temps, par exemple, est saisi d'un seul coup, comme un seul et unique instant où se mêlent le passé, le présent et l'avenir. Et les commentateurs de préciser que cette intuition est une lumière intérieure (pratibhâ), celle-là même dont Patanjali avait dit dans les Sûtras précédents qu'elle se situait "dans la tête" (mûrdha-jyotish, 3.33).

Or ceci rejoint exactement l'enseignement de l'Upanishad qui insiste particulièrement sur les images colorées que l'adepte perçoit à l'intérieur de lui-même, ou à l'extérieur (en avant de son nez, au-dessus de sa tête, etc.), ou encore à la fois à l'intérieur et à l'extérieur (l'Ether suprême, et les cinq Ethers "subalterne"). Images qui sont la manifestation "intellectuelle" de la lumière pure (shukla-téjas : "l'éclat blanc", str. 10) grâce à laquelle il peut obtenir la "vision des essences" (sattvadarshana, str. 10) donc, le târaka est ce que Patanjali nomme un samyama, c'est-à-dire une pratique à base de concentration mentale (dhâranâ ; on se souvient que l'Upanishad insiste sur le rôle joué par le mental) et de méditation profonde (dhyâna), débouchant sur une certaine forme de samâdhi. Et l'on ne s'étonnera pas que l'Upanishad, en accord en cela avec Patanjali et ses commentateurs, tienne le târaka pour l'un des plus hauts samyamas, dans la mesure où il permet à l'adepte d'acquérir une vision claire de l'Unité.

Il reste cependant à rappeler que le mot târaka implique encore deux autres choses. La première est au tara est le nom donné aux pupilles de l'oeil, ou plus exactement à cet éclat lumineux que l'on perçoit dans les yeux d'autrui ou dans les siens propres quand on se regarde dans un miroir. L'Upanishad y fait certainement allusion (str. 9) lorsqu'elle signale que l'on trouve à l'intérieur des deux yeux les deux images du Soleil et de la Lune. Là encore, le târaka-samyama permettra à l'adepte de réaliser que ces deux images lumineuses (tara) sont à la fois humaines et cosmiques, et donc de discerner, au-delà de l'apparence duelle, l'unité fondamentale sur laquelle il devra méditer après avoir maîtrisé son esprit (mano-yukto dhyâyét, str. 9).

L'autre implication est le sens d'"étoile" qu'a le mot sanskrit tara. L'Upanishad ne cite pas directement le mot (sauf dans une variante, peu sûre, de la strophe 7, où il est question de "l'éclat radieux de l'Etoile"), mais il est impossible que les auteurs n'y aient pas pensé, car il est de tradition en Inde d'interpréter le mot tara par référence au verbe târâyati, "il fait traverser". Il y a donc une déesse Tara, "Etoile salvatrice". De toute façon, il est évident que c'est la notion de "lumière" qui fédère les diverses acceptions du mot târaka tel qu'il est employé dans l'Upanishad. Lumière "intellectuelle" comme aurait dit Platon, lumière de la Buddhi (l'Intelligence supérieure, la Connaissance intuitive) comme disent les Upanishads. Et, bien entendu, cette lumière subtile, également répartie dans tout l'univers, est la manifestation première du brahman (d'où l'identification de târaka et de brahman à la strophe 3) ; ou, si l'on préfère, elle est le signe de sa présence au centre de toutes choses, tant dans le microcosme (l'homme) que dans le macrocosme (l'univers). Dès lors, on comprend que la découverte de cette lumière soit une "connaissance salvatrice" (târakam.. jnânam, Yoga-Sûtras 3.55) et que le moyen de la découvrir soit samyama "sauveur", puisque, selon l'adage, "on devient ce que l'on connaît". En ce sens, il est vrai de dire que le târaka conduit à la non-dualité (advaya). D'où le nom de l'Upanishad qui exalte cette pratique.



Advaya-Târaka Upanishad


1.
Voici l' Upanishad du Passeur qui conduit à l' Unité; nous allons l'exposer pour le bien de celui
qui a dompté ses sens et acquis les six vertus: Paix du cœur, Maîtrise de soi, Arrêt des vains désirs, Patience, Concentration mentale, Confiance.

2-3.
Tout en méditant sur le mantra à cinq syllabes: "Je suis la Conscience universelle", l'adepte ferme les yeux complètement ou à demi, et tourne son regard vers l'intérieur de lui-même; il perçoit alors
au-dessus d'un point à hauteur du front, entre les deux sourcils, une masse lumineuse c'est le Brahman suprême, Etre-Conscience-Béatitude à Qui il s'identifie !

Car c'est lui, le Brahman suprême, qui aide à traverser le fleuve angoissant de la vie, avant la naissance, durant l'âge adulte et à l'heure de la mort: d'où son nom de Passeur.

De même, si l'on sait reconnaître que l' Ame vivante et le Seigneur lui-même ne sont que de vaines illusions, et si l'on parvient à rejeter même ce qui se trouve au-delà en disant: "Non ! ce n'est pas Cela ! ce n'est pas Cela !", on perçoit le Brahman comme unique. D'où le nom du Yoga "qui fait passer" et conduit à l' Unité.

4.
Pour parvenir à cette Vérité, il faut utiliser trois formes d'expérience: l'une est intérieure, l'autre est extérieure, la dernière intermédiaire.

5.
Voici l'expérience intérieure: Sushumnâ, l'artère du Brahman, est au milieu du corps subtil; par son éclat, elle ressemble au Soleil et à la Pleine Lune; elle jaillit du Centre de la Base et monte droit
jusqu'à l'ouverture du Brahman; en elle est l' Energie tel un serpent enroulé sur lui même, flamboyant comme mille éclairs, délicate comme une tige de lotus.

Lorsque l'adepte l'a vue, ne serait-ce qu'en esprit, il est délivré des liens de l'existence corporelle,
grâce à la purification que cette vision opère en son être ! Et quand, par le Yoga du Passeur,
l'adepte perçoit en permanence une lumière au sommet de son front, il a atteint la perfection.

Puis, s'il se bouche les oreilles avec l'extrémité de ses index, il perçoit un son pareil à la syllabe Phut; fixant son attention sur ce son, il perçoit alors, en son esprit, une lumière bleue située au milieu de son front et il connaît, grâce à cette vision, une joie que rien ne peut surpasser.

D'autres fois, cette même lumière est vue de l'intérieur du cœur: si l'on veut donc gagner la Délivrance, on devra pratiquer de la sorte l'expérience intérieure !

6.
Et voici maintenant l'expérience extérieure: il devient un yogin véritable, celui qui, en avant de son nez, à quatre, six ou douze doigts, parvient à percevoir l'espace de couleur bleue, frangé d'indigo,
irisé de rouge et d'orange; ou lorsque regardant vers le coin de ses yeux, ou fixant le sol, il perçoit des rayons de lumière, brillant comme de l'or en fusion !

Et celui qui perçoit l'espace à douze doigts au-dessus de sa tête devient immortel !

Oui ! voir le ciel brillant au-dessus de la tête, c'est devenir un yogin véritable et c'est pourquoi il est bon de pratiquer l'expérience extérieure.



7.
Reste l'expérience intermédiaire: l'adepte qui, au lever du jour, perçoit une lumière aussi brillante
que celle du disque solaire, indivisible, mais multicolore et innombrable, pareille à l'éclat changeant du feu et à la profondeur insondable du ciel, cet adepte-là s'identifie à la Lumière elle-même, c'est-à-dire à l' Ether sans qualités ! Lorsqu'il perçoit cette lumière, il s'unit à l' Ether majestueux qui flamboie comme le feu de la fin des temps; il s'unit à l' Ether essentiel dont la radiance dépasse tout;
et à l' Ether solaire qui brille comme mille soleils !

Ainsi, par le Yoga du Passeur perçoit-on les cinq Ethers tant extérieurs d'intérieurs: une telle vision délivre des liens de l'existence corporelle; elle mue le yogin en quelque chose d'aussi pur que l'Ether
et lui procure de la sorte un état que rien ne peut définir !

8.
Le Yoga du Passeur s'exerce donc de deux façons: par la première, on passe le fleuve des vies successives; par la seconde, on acquiert des fruits que la raison ne saurait définir ! Ceci selon l'adage des Anciens: "Sache que le Yoga du Passeur se manifeste sous deux formes: l'inférieure donne le salut, la supérieure ne peut se définir !"

9.
A l'intérieur des deux yeux, se trouve la double image du Soleil et de la Lune: grâce à ce Yoga à deux formes l'adepte obtient de percevoir que les deux disques qu'il contemple dans l'espace au fond de sa tête sont identiques, en vérité, aux deux astres du macrocosme. Maîtrisant son esprit,
il devra méditer sur cette vision unitaire, car celui qui ne comprend pas que microcosme et macrocosme sont un seul et même univers ne parviendra jamais à surmonter l'illusion sensorielle.

C'est pourquoi, en définitive, la forme intérieure du Yoga du Passeur est celle qu'il vaut mieux réaliser.

10.
Celle-ci est double, elle aussi: avec ou sans image mentale. Toute perception d'origine sensorielle
s'accompagne en effet d'image mentale; en est dépourvue la perception localisée au-delà de l'espace
compris entre les deux sourcils. De toute façon, lorsque l'on recherche la perception d'images, même intérieures, les facultés mentales restent nécessaires.

Ainsi, grâce au regard intérieur accompagné des facultés mentales, l'adepte perçoit le Brahman,
fondement de toute réalité, sous la forme d'une lumière pure par quoi se manifeste la triade: Etre, Conscience, Béatitude.

C'est ce Brahman que contemple l'adepte, grâce à son regard intérieur associé à ses facultés mentales !

Ainsi de la perception sans image, car c'est par le regard de la pensée que l'on perçoit l'espace subtil
et les diverses sortes d' Ether. La vision des essences n'est possible que par le seul regard de la pensée, tant dans la perception extérieure que dans la perception intérieure;

s'il réalise l'union de son âme avec ce regard mental l'adepte obtiendra à jamais une vision des essences totale, parfaite, définitive.

C'est pourquoi la perception intérieure, avec ou sans image, doit s'accompagner de l'usage des facultés mentales, dans la pratique du Yoga du Passeur.

11.
Concentrant donc son regard sur l'ouverture subtile du front, un peu au-dessus du point situé entre les deux sourcils, l'adepte y voit une lumière: celle-là même qui émane du Passeur !

Il hausse ensuite ses sourcils, unissant avec effort cette lumière à ses facultés mentales et au Yoga lui-même: c'est là ce que l'on nomme "perception intérieure avec image mentale". Quand à celle qui en est dépourvue, elle consiste en la perception d'un fort rayon lumineux au niveau du palais: s'il contemple ce rayon lumineux, l'adepte acquiert des pouvoirs tels que celui de réduire sa taille ou de l'augmenter à sa guise, etc.

12-13
Et que ce soit dans l'une ou l'autre forme, contempler la lumière intérieure sans cligner des yeux
constitue ce que l'on nomme le Geste de Shiva. Il sanctifie l'endroit où il se tient, il délivre l'univers de toute souillure l'adepte qui est parvenu à ce stade de réalisation.

Et qui, par chance, rencontre et vénère un adepte parvenu à ce stade est libéré des liens du péché.
Un tel yogin assume la forme même de la lumière qu'il perçoit par sa vision intérieure, car son regard, guidé par le Maître suprême, perçoit le Soleil rayonnant, puis l' Intelligence cachée dans la caverne du cœur, enfin l' Esprit Quatrième au-delà des seize qualités.

14-18
Pour pratiquer un tel Yoga, il faut être guidé par un guru qui soit versé dans les Védas, dévot de Vishnu, bienveillant; qui connaisse bien le Yoga et le pratique à fond; qui ait l'âme formée par le Yoga, purifiée par le Yoga !

Seul un tel précepteur, dévoué à ses propres maîtres et vrai serviteur du Seigneur mérite le nom de Guru.

Mais Gu c'est les ténèbres, et Ru c'est la lumière qui les repousse et les disperse, ainsi le guru vainc-t-il l'ignorance ! Le maître est le Brahman. Il est le Chemin qui y mène. Il est le Savoir essentiel
et le Refuge inviolable. Le maître est la Carrière, il est l'enjeu suprême; lui seul enseigne l' Absolu
et pour cela domine tout !

19-20
L'adepte qui récitera même une seule fois cette Upanishad du Passeur obtiendra la Libération ! Et lavé de tous ses péchés, même de ceux qu'il a commis dans ses vies antérieures, il verra se réaliser
tous ses désirs, toutes les fins de l'existence humaine !

Telle est l' Upanishad.