II m'a été donné de vivre il y a plus de 30
ans une expérience particulière qui a élargi ma conception du monde
et renversé toutes les valeurs de ma vie. Ce fut une expérience
profonde et inoubliable. Elle a touché tous les aspects de mon être
et m'a donné la certitude que la mort n'existe pas. Je n'oublierai
jamais cette expérience.
Elle est en moi et me rappelle la plénitude, la beauté et la paix
immense d'un état qui défie toute description et en comparaison
duquel les recherches exclusives de richesses matérielles, de
renommée, de pouvoir et de gloire paraissent dérisoires et
misérables. Je souhaite que cette expérience puisse sécher toute
larme. Puisse-t-elle aussi démystifier la mort, afin que chante la
vie.
Cela se
passait en 1968.
Trois semaines après la naissance de mon second enfant,
j'ai fait une très grosse hémorragie. J'ai été hospitalisée et
opérée d'urgence. En cours d'intervention (hystérectomie ou ablation
de l'utérus), une seconde hémorragie s'est déclarée. Je suis
descendue entre 2 et 3 de tension et mon coeur s'est arrêté de
battre pendant, m'a-t-on dit par la suite, environ 45 secondes avec
électro-cardiogramme plat.
Et pendant ces 45 secondes, j'ai vécu
un instant d'éternité !
Tout d'abord, je me souviens m'être trouvée à la hauteur du
plafond. J'étais là avec toutes mes pensées, mes émotions, mes
impressions, avec tout ce qui constitue mon être profond. J'ai pris
conscience de voir de tous les côtés à la fois, mais surtout
j'éprouvais un sentiment nouveau et incroyable : celui d'exister en
dehors de mon corps. Je vous assure que c'est quelque chose de
bouleversant de se sentir vivre au-delà de soi.
J'ai pris conscience que j'étais l'habitant de mon corps. Celui-ci
était étendu sur la table d'opération. Je l'ai donc regardé et je ne
l'ai pas trouvé beau. J'étais cadavérique, j'avais des tuyaux qui me
sortaient du nez et de la bouche : je n'étais pas du tout à mon
avantage. Cela n'avait déjà plus d'importance parce que ce corps
n'était pas réellement moi, il n'était que mon véhicule. J'ai
entendu le chirurgien s'exclamer : «Elle me pète entre les mains !»,
ce qui m'a été confirmé un mois après par une infirmière ayant
assisté à mon opération.
Je ne me suis pas trop attardée dans cette salle d'opération, car
j'ai pensé à mon mari et à mon beau-père qui attendaient dans la
salle d'attente. En pensant à eux, instantanément, je me suis
trouvée près d'eux.
J'ai pris conscience de traverser les murs. Tout m'a paru naturel,
parce que sur le coup, on ne pense pas, on est dans l'action tout
simplement. Plus tard je me suis demandé : comment est-ce possible ?
Comment ai-je pu traverser les murs et trouver cette salle
d'attente, car je ne connaissais même pas le chemin qui y
conduisait, n'ayant jamais eu l'occasion de m'y rendre !
Dans cette salle d'attente, j'ai constaté qu'il n'y avait pas de
siège. Mon mari me l'a confirmé plus tard. Je voyais qu'ils
arpentaient la pièce et moi, j'essayais de me manifester à eux, en
vain. Ils ne me voyaient pas. Je ne comprenais pas. J'éprouvais une
sorte de désespérance, celle de ne pas pouvoir communiquer avec ceux
que j'aimais. En désespoir de cause, j'ai posé la main (du corps
plus subtil dans lequel j'étais) sur l'épaule de mon beau-père et ma
main a traversé son corps !
Mais, en même temps, je prenais conscience d'une faculté
nouvelle, celle de pénétrer tout ce qui est.
Je n'ai jamais perdu la notion d'être «moi», mais j'avais
l'impression de prendre plus d'espace et je me suis trouvée dans le
coeur de mon mari. Je connaissais toutes ses pensées, mais aussi
l'essence de son être, ce qu'il valait en tant qu'être humain. La
même chose s'est produite avec mon beau-père. Mes beaux-parents
avaient perdu leur premier fils à l'âge de 25 ans. II s'était noyé
en voulant en vain sauver un camarade. Par suite, ils avaient
reporté toute leur affection sur leur second et dernier fils qui
avait 14 ans à cette époque. Quand plus tard il est devenu mon mari,
j'avais l'impression de leur avoir pris leur fils et qu'ils ne
m'aimaient pas pour moi-même, mais seulement selon ma capacité à
rendre leur fils heureux. Et cela me faisait souffrir. Et là, dans
le coeur de mon beaupère, je me rendais compte de toute la
compassion et de toute l'affection qu'il avait pour moi et j'étais
capable de voir au-delà de mes propres projections.
Je me suis ensuite trouvée dans un abîme de ténèbres, de silence.
J'étais seule au monde, dans un néant infini et j'aurais tout donné
pour entendre un bruit et voir quelque chose. Je ne sais pas combien
de temps cela a duré. Peut-être une fraction de seconde ? Le temps
n'existait pas. J'ai pensé : «Ca y est ma fille, tu es morte».
Et pourtant, je n'étais pas morte puisque j'existais.
Une phrase qu'on m'avait enseigné toute petite au catéchisme m'est
revenue à la mémoire: «On vivait jusqu'à la fin des temps, jusqu'à
la résurrection finale». Dans ce contexte, l'idée de vivre dans ce
néant et ces ténèbres m'est apparue insupportable. Quelque chose en
moi a appelé à l'aide et au loin, j'ai vu une lumière. A partir de
ce moment je n'étais plus seule au monde. J'ai été propulsée à une
vitesse prodigieuse vers cette Lumière et, au fur et à mesure que
j'en approchais, elle grandissait jusqu'à occuper tout l'espace. Les
ténèbres s'éclaircissaient, je sentais des présences autour de moi
sans les voir, distinctement, mais surtout une joie inouïe s'élevait
de mon coeur, une joie mille fois plus grande que toutes les joies
que j'ai pu éprouver sur cette terre.
Et je suis rentrée dans la Lumière. Là il n'y a plus de mots ...
Cette lumière était aussi un océan d'Amour, mais de l'Amour pur,
celui qui s'offre et ne demande rien, un Amour soleil et j'étais
l'Amour. J'étais immergée dans un océan d'Amour, totalement
comprise, comblée et aimée telle que j'étais et ceci de toute
éternité et si loin des soucis et des agitations de cette terre ! Je
n'avais plus conscience du temps et de l'espace, mais d'être,
d'avoir toujours été. J'ai compris que j'étais une partie de cette
lumière, que j'étais éternelle.
Dans cette plénitude et aussi cette paix immense, j'ai compris le
sens des mots : «Je suis». C'est comme si, tout en étant moi, je
devenais tout et que je retrouvais ma nature réelle. J'avais
retrouvé ma patrie. J'étais devenu l'Amour et j'étais la vie.
Comment mon Dieu partager cette expérience ? Si chacun d'entre-nous
pouvait la vivre, ne serait-ce qu'un instant, il n'y aurait plus de
misère ni de violence, ni de guerre sur cette planète. Le sens même
de l'existence serait perçu et la beauté serait son accomplissement.
Dans cette lumière, j'ai vu un jeune homme resplendissant de lumière
venir vers moi. Mon coeur a bondi de joie car je reconnaissais mon
frère. Mes parents avaient perdu un jeune enfant de sept mois, alors
que j'avais 11 ans. J'adorais cet enfant, j'étais sa petite maman.
Après son départ, mes parents et moi avons vécu ce chagrin si bien
exprimé par ces vers de Victor Hugo : «Un seul être vous manque et
tout est dépeuplé».
Mais il était là et il vivait ! Et j'étais heureuse, si heureuse !
Je me suis trouvée dans ses bras. II était solide et moi aussi. Nous
communions totalement par la pensée et les sentiments et je lui ai
«dit» : "Comme papa et maman seraient heureux de te voir ! » II m'a
dit qu'il nous avait toujours suivis et accompagnés dans notre vie.
J'ai compris que les liens d'amour ne meurent jamais. Comment
pouvais-je être certaine que cet être était mon frère ? II y a
évidemment une grande différence entre les traits physiques d'un
bébé et ceux d'un adolescent. Pourtant je sais de façon absolue que
c'était lui. Je pense qu'il s'agit d'une reconnaissance d'âme à âme
...
J'ai rencontré aussi le frère de mon mari, Jacques, que je n'ai
jamais vu sinon sur photo. J'ai été très surprise qu'il m'aimait et
me connaissait bien. II m'a montré les circonstances de son décès,
combien ses parents avaient souffert, en particulier ma belle-mère.
J'ai souhaité ne jamais avoir à connaître une telle épreuve dans ma
vie.
En ce qui concerne certaines situations difficiles, voire
contraignantes, il m'a dit que l'on pouvait transformer toutes les
conditions défavorables autour de nous, qu'il n'était pas nécessaire
de tout accepter mais que nous devions le faire avec amour.
J'ai rencontré également des êtres que je n'ai jamais vus sur cette
terre. Et pourtant je les connaissais et j'éprouvais un bonheur
immense de les revoir. Ils dégageaient tellement de noblesse et de
respect que je me trouvais devant eux comme une petite fille face à
son professeur envers lequel elle éprouverait une grande déférence.
Ils lisaient en moi comme dans un livre ouvert et j'aurais aimé ne
leur montrer que de beaux aspects de moi-même. Je sais qu'ils
m'accompagnent et me guident dans cette vie.
Toutes ces rencontres avaient lieu dans un paysage inondé de
lumière, de beauté et de paix. J'étais dans un très beau jardin. La
nature y était magnifique. L'herbe elle-même était plus verte. II y
avait d'autres fleurs, d'autres couleurs, les sons eux-mêmes
devenaient couleurs. Et cela créait une harmonie, une unité telle
que j'ai compris le sacré de la vie. Tout vivait, un simple brin
d’herbe me ravissait, car j’y voyais toutes les molécules de vie, de
lumière à l’intérieur.
Dans cet état, j’ai pensé qu’au-delà du chagrin de la souffrance
bien humains que nous éprouvons lors du départ de ceux que nous
aimons, nous devrions nous réjouir de savoir qu’ils se sont
retournés au pays ou qu’ils sont en route pour retrouver la vie.
J'ai revécu ma vie à l'envers, de mes 26 ans de l'époque jusqu'à ma
naissance. Près de moi il y avait un Être de lumière, un être que
notre coeur connaît. Je ne peux pas décrire le rayonnement et la
force d'Amour qu'il dégageait. Je me suis aperçue par la suite qu"il
avait aussi beaucoup d'humour. J'ai entendu sa voix qui semblait
venir du fond de l'univers, une voix puissante et douce à la fois,
mais qui n'a rien à voir avec de la sensiblerie. C'est une voix qui
par la force et l'amour vrai qui s'en dégagent, est capable de
restaurer les forces vives d'un individu.
Cette voix m'a demandé : "Comment as-tu aimé et qu'as-tu fait pour
les autres ?».
J'ai senti tout de suite l'exigence de la question. Simultanément,
j'avais la vision d'une multitude d'êtres dont les bras étaient
tendus vers le ciel et qui imploraient. Je savais que ces êtres
souffraient dans leur corps ou dans leurs coeurs et je ressentais
toutes leurs souffrances.
Qu'avais-je fait pour eux ? Je n'avais pas été méchante, mais je
n'avais rien fait de particulier. Cette question exigeait de moi
plus de fraternité, d'ouverture, de disponibilité et même de faire
grandir la vie en moi et en ceux qui m'entourent, de la rendre plus
ardente, plus libre.
Elle exigeait comme l'a dit Emerson : "...de faire tout le bien qui
existe dans l'individu", de l'aider à croître dans tous les aspects
de son être et je comprenais simultanément que cela demandait
beaucoup d'amour, de cet amour fort et éclairé qui libère la vie.
Elle exigeait aussi de moi une croissance, une extraction du
meilleur de moi-même afin que ma transformation et mon
accomplissement puissent aider l'autre à s'accomplir lui-même.
Et je sentais l'humanité comme un seul être dont tous les membres
étaient interdépendants pour leur progrès et leur survie. Je
m'éveillais à une responsabilité toute neuve.
La compréhension de ces deux petites questions si simples en
apparence, ne cesse de s'approfondir avec le temps.
Toute ma vie était là, toutes les joies, les attentes, les espoirs
et les peines qui la constituaient. J'ai retrouvé mes émotions
d'enfant. J'ai redécouvert certains épisodes oubliés. Tous les
mobiles de mes actes étaient à découvert. On ne peut rien cacher.
Tout est inscrit dans le grand livre de la vie. C'était troublant
car, pendant le déroulement de ce bilan, j'étais en même temps celle
qui revivait chaque situation avec toutes les émotions qui
l'accompagnaient et j'étais aussi l'autre partie du moi, celle qui
n'était pas du tout affectée par les émotions et qui était toute
sagesse, connaissance, amour et justice.
C'était cette pure Lumière, cette autre partie du moi, qui évaluait
ma vie. A travers elle tout devenait clair. Je comprenais tous mes
mécanismes psychologiques, de quelle manière je fonctionnais et
appréhendais la vie, tout ce qui me limitait, tous mes manques et
tant de choses plus subtiles que je n'ai pas encore réussi à
traduire en mots. Je prenais conscience du bien et du mal que je
m'étais fait à moi-même sans le soupçonner ainsi que les
répercutions de mes actes et de mes pensées en moi-même, mais aussi
en ceux qui m'entouraient. Lorsque j'avais accompli un acte de
bonté, j'étais dans le coeur de la personne à qui j'avais fait du
bien et je recevais le bien que je lui avais fait. II en était de
même lorsque j'avais été désagréable envers autrui. J'éprouvais en
moi-même les souffrances que j'avais infligées à cette personne et
surtout je prenais conscience des mesquineries qui avaient conduit à
cela.
Comme nous tremblons quand cette grande conscience évalue notre vie
suivant les critères de l'amour absolu et de la sagesse ! C'est là
que nous nous rendons compte de nos manques, de nos misères et de
nos faiblesses ! C'est à ce moment que l'on regrette tout le temps
passé à la recherche de fausses valeurs ! C'est là que l'on regrette
aussi de ne pas avoir vécu "vrai" !
Mais cette prise de conscience s'accompagne aussi de compassion pour
soi car l'on découvre que l'ignorance, la peur, les
conditionnements, les faiblesses nous ont éloignés de ce que nous
sommes et de ce que nous aurions pu accomplir sans elles.
La transformation et la rigueur s'imposent à nous car si l'on
comprend ce qui nous limite, il est difficile de transformer la peur
en confiance, l'égoïsme en altruisme, etc ...
II faut du temps et le vouloir ...
Désormais le désir le plus profond de ma vie est de retrouver
consciemment cet état de liberté et de plénitude que j'ai goûtés
lorsque je suis arrivée "au coeur de moi-même" dans cet espace
intérieur où il n'y a plus ni conflit, ni peur, ni passion, ni
conditionnement, où je n'étais plus prisonnière de mes émotions et
de mes identifications. Quelle merveilleuse liberté dans cet oasis
de paix ! C'est certainement ce qui est le plus important dans cette
expérience car, à partir de ce centre de paix qui, je le sais
désormais, est ma véritable nature, je me rendais compte de tout ce
qui, en moi ou autour de moi, faisait obstacle à cette plénitude.
II m'a été montré ce que serait ma vie lorsque je reviendrai sur
cette terre. Mais auparavant, "on" m'avait demandé si je désirais
rester ou revenir sur terre. Mon âme voulait rester mais j'ai pensé
à mes deux jeunes enfants qui avaient besoin de leur maman. II m'a
été dit que lorsque je reviendrai, j'oublierai beaucoup de choses
car il le fallait. Malgré mon désir de fixer toutes ces
connaissances en moi, je sais que beaucoup d'entre-elles se sont
effacées. Je n'en ai ramené que des miettes et je le regrette.
Quand je dis "on" m'a montré ou "il m'a été dit", c'est une façon de
dire que je recevais ces informations d'un être (frère, etc ...) ou
tout simplement de la grande Lumière. C'était comme si j'étais dans
une classe d'enseignement sans professeur.
Donc j'ai vu mes enfants grandir et j'étais très fière d'eux. II m'a
été montré que mes beaux-parents et ma grand-mère quitteraient cette
terre presque en même temps et que deux d'entre-eux partiraient à
trois semaines d'intervalle. Cela m'avait frappé. Mon beau-père et
ma grand-mère nous ont quitté 13 ans après cette expérience, à trois
semaines jour pour jour d'intervalle et ma belle-mère transitait
l'année suivante... J'avais révélé ces informations à mon mari et à
mes parents, ce qui les avait fort troublés.
Je me rappelle aussi avoir été en possession d'une grande
connaissance. En 45 secondes (mais le temps n'existait pas) j'ai
vécu des millénaires. Je me rappelle avoir vu des géants, des
sacrifices humains. J'avais toute une information sur les
civilisations disparues dont !'Atlantide et sur Jeanne d'Arc aussi.
Je sais que j'ai su, mais j'ai oublié l'information. L'on me disait
que Dieu était la force, la vie et le mouvement, que la vie existait
partout dans l'univers, qu'à l'intérieur de notre terre il existait
de grandes cavités, que notre planète était une planète non sacrée,
que le Christ, Bouddha et Mahomet travaillaient ensemble à la
régénération de la terre, que lorsque je mourrai, on ne me demandera
pas à quelle religion, quelle philosophie ou race particulière
j'appartiens, mais comment j'ai aimé et ce que j'ai fait pour les
autres et que seule la qualité d'être d'un individu est importante.
L'on m'a dit également que tout ce
qui allait dans le sens de l'unité était bien et que ma vie, par rapport
à l'éternité, correspondait à un battement de cils dans ma propre vie.
J'étais capable dans cet état de renoncer à toute revendication, à toute
condition au bonheur et à "être", tout simplement.
II m'a été montré aussi le futur de l'humanité. J'ai vu que notre terre
serait l'objet de grands bouleversements et que nous traverserions de
grandes épreuves, de grandes tribulations, car, nous avions une
technologie avancée, beaucoup de science, mais peu de fraternité et de
sagesse. Et l'on me montrait tout ce qui risquait d'arriver SI on ne
changeait pas. J'insiste sur le si car il est déterminant.
L'on me disait que nous étions à la croisée des chemins et que rien
n'était inéluctable, tout dépendait de notre capacité à aimer et à agir
avec sagesse. J'ai senti néanmoins l'extrême urgence d'une grande
transformation individuelle et planétaire de l'humanité et la nécessité
d'instaurer !a paix et la tolérance en nous et autour de nous, pour
vivre en harmonie et dans le respect de ce qui vit.
Mais il est vrai qu'il y a 32 ans, alors que tout était florissant, j'ai
vu dans mon expérience le chômage s'étendre sur la terre entière, une
peste ravager elle aussi la terre, irruptions volcaniques, intempéries,
etc ... et bien d'autres catastrophes. Mais je ne suis pas venue
apporter la sinistrose. Je connais trop bien le rôle de la pensée et je
sais que ces événements n'arriveront que si nous continuons à vivre en
bafouant les lois de l'Amour et de la Conscience.
J'ai vu aussi que j'avais déjà vécu sur cette terre. L'on me montrait
certaines tranches d'autres vies et le lien qui les unissait toutes.
L'on me disait que l'on revenait sur terre tant que l'on n'avait pas
acquis assez d'amour et de sagesse, que tout était une question
d'évolution. Dans cet état, cela me paraissait évident.
Plus tard, lorsque je suis revenue dans mon corps, ce souvenir m'a
beaucoup troublée, mais je suis intimement convaincue que ce concept de
vies "successives" ne doit diviser personne car l'important n'est pas de
s'accrocher à une croyance ou à une conviction mais de se transformer.
Au niveau de l'absolu, au-delà de l'espace et du temps, il n'y a que la
vie, la Grande Vie ... Mais dans notre dimension limitée où s'inscrit le
temps et l'espace, nous ne prenons conscience que d'un segment, que
d'une partie de cette vie se déployant entre la naissance et la mort et
nous pensons que cette petite vie est tout ce qu'il y a à connaître. Et
pourtant ...
J'ai aussi le souvenir d'être allée de plan en plan. C'est même beaucoup
plus subtil que cela. J'avais l'impression de pénétrer profondément dans
ma conscience et cela se manifestait par une lucidité et une
compréhension intérieures qui allaient en croissant et aussi
extérieurement par beaucoup de lumière et de beauté. 1e me suis trouvée
dans une ville de lumière, d'or et de pierres précieuses. C'était la
gloire des gloires.
Je me sentais transportée et élevée au plus haut niveau. J'ai compris
encore plus profondément le sens des 26 ans que j'avais passés sur terre
et ce que j'avais fait de cette opportunité.
Puis il m'a été montré que j'aurai beaucoup d'épreuves et de souffrances
dans le temps qu'il me restait à vivre sur cette terre. Je me suis vue
pleurer bien des fois et j'ai demandé le pourquoi de ces épreuves. Et
l'on m'a dit que je les avais acceptées avant de naître, car, grâce à
elles, je grandirai.
J'ai supplié que me soient alors données toutes les expériences et
épreuves qui me seraient nécessaires pour arriver au but et ceci en une
seule vie, car je ne voulais plus revenir à nouveau. Je comprenais que
l'enfer était sur terre et j'étais prête aux plus grands renoncements et
aux plus grands sacrifices pour ne plus avoir à y revenir. Mais on m'a
fait comprendre qu'on ne pouvait me donner à porter plus que ce que mes
épaules ne pouvaient supporter.
II peut paraître extravagant ou contre-nature de désirer cela. Dieu
merci, je ne suis pas masochiste. J'aime la vie. Mais dans cet état de
conscience sublime, je n'avais plus qu'un seul désir : celui d'arriver
le plus vite possible au but, celui de me fondre dans cette splendeur.
Sur terre, devant l'épreuve, la souffrance ou la maladie, on s'insurge,
on se révolte. De "l'autre côté", l'on en comprend le pourquoi et l'on
en voit les résultats. Et tout s'éclaire ...
Et l'on m'a montré un mur de pierres précieuses et l'on m'a invité à
être une de ces pierres.
J'ai vu venir à moi un être très beau. II m'est impossible de dire si
cet être était un homme ou une femme, car il était viril et féminin à la
fois.
J'avais l'impression de le connaître depuis la nuit des temps. Je
voulais me fondre en lui. Je lui ai dit :
"Je veux me marier avec toi ...".
Et je prenais conscience que cet être était moi, mais moi à la fin des
temps, moi totalement réalisée. Ce fut une grande leçon d'humilité car
je mesurais tout le chemin qui me restait à parcourir pour être ce que
je suis ... Je comprenais que le temps n'était que la distance qui me
séparait de moi-même et que j'étais déjà cela dans la mesure où j'étais
capable de vivre à la pointe de mon âme. Mon incapacité à vivre la
plénitude de ce que je suis attire les expériences qui me sont
nécessaires pour acquérir ce qui me manque. "C'est la blessure qui
guérit" comme l'a si bien dit un expérienceur suisse.
Mon frère et moi, nous nous sommes fait nos adieux. II m'a conseillé de
ne pas parler de cet;e expérience à mon réveil et d'attendre 17 ans
avant d'en témoigner car, avant ce temps, elle serait considérée comme
un traumatisme consécutif à un choc opératoire.
Je ne me rappelle pas être sortie de mon corps, mais je me rappelle
l'avoir réintégré en passant par ma tête et m'y être glissée comme dans
une chaussette.
Et pour moi c'est cela le drame de l'existence. Fini la plénitude, fini
la liberté, fini le fait de se sentir un et tout à la fois. L'on rentre
dans son corps comme si l'on rentrait dans une boite. On oublie que les
autres sont nous et l'on se fait du mal les uns les autres ...
On a dû me réveiller rapidement par une paire de claques.
A mon réveil, j'avais dans les oreilles une musique sublime, une
symphonie d'une grande amplitude, d'une grande douceur et qui me faisait
fondre d'amour.
J'ai essayé plus tard de retrouver cette musique en écoutant de la
musique sacrée et des classiques, mais en vain. Mais derrière cette
musique, à l'arrière plan, il y avait un accomplissement, une paix
infinie, une plénitude, une connaissance que j'aurais voulu garder
toujours en moi.
Je ramenais une parcelle d'éternité et le sentiment d'avoir compris
toutes choses. Tout était bien ...
Mais en m'éveillant, la douleur s'est éveillée aussi, (j'étais ouverte
du nombril au pubis) et toute l'expérience s'effaçait. Je ne pouvais pas
la retenir. Je n'en ai ramené qu'une infime partie ...
Aujourd'hui, je ne peux que constater à quel point cette expérience est
désormais le centre, le moteur de ma vie. II n'y a pas une journée,
peut-être pas une heure, sans que son souvenir ne se manifeste et je
sais que la fréquence de manifestation de ses réminiscences n'est pas de
nature obsessionnelle.
Cette expérience fait partie de moi, elle repose en moi ... Elle me
remplit et me nourrit. Elle est là comme une force, un point d'ancrage
autour duquel tout gravite. Elle est un point de référence pour toutes
mes pensées, émotions et activités.
Je la ressens comme une densité, comme un plan subtil au creux de la
poitrine qui à la fois, m'ancre sur la terre, me relie au ciel et ne
demande qu'à grandir avec souvent une telle force que cela en est
parfois presque douloureux.
C'est peut-être cela le plus beau prolongement de cette expérience : la
sensation d'une "Présence". Cette Présence est la révélation de mon
expérience. Elle est le poids de mon essence retrouvée.
C'est pour moi un tâche ardue que de tenter d'exprimer l'impact d'une
telle expérience dans ma vie de tous les jours. II ressemble a une lame
de fond qui parcourrait les plages de mon être pour balayer ce qui n'est
pas "Cela". C'est du domaine du subtil et pour la plus grande partie, de
l'incommunicable puisque que cela a trait à des mouvements de l'âme.
Ce que je peux dire c'est que je sais maintenant que la vie ne se limite
pas à celle que nous connaissons sur cette terre, qu'il y a une autre
réalité, un monde de lumière et d'amour pur qui est notre véritable
patrie et que nous retrouvons avec une telle joie, si vous saviez avec
quelle joie !
Je sais aussi que nous sommes éternels que nous avons toujours vécu et
que nous vivrons toujours, que nous sommes des étincelles de cette
Lumière. Je sais que la mort n'existe pas, qu'elle est la grande
illusion. II n'y a que la vie qui nous invite à entrer dans sa
plénitude.
Alors, c'est évident, le regard sur la vie change totalement. Celle-ci
devient cohérent,,
porteuse de sens. Son but est d'évoluer vers cette perfection, cette
plénitude.
Je sais désormais que le but de ma vie n'est pas uniquement d'acquérir
avoir, savoir et pouvoir, mais surtout de retrouver cet état de
plénitude et de le réaliser en soi, en somme d'incarner sur cette terre
tout l'amour et toute la sagesse du ciel.
Mon véritable travail est de devenir consciemment ce que je suis de
toute éternité, être cette perfection de moi que j'ai vue et qui
m'attend ...
C'est une tâche exaltante et exigeante que de mourir à ses propres
vouloirs mais c'est la seule qui, a mes yeux, ait du sens. Je suis sur
ce chemin, peinant bien souvent, mourant de ne pas mourir -comme le
disait si justement Saint Jean de la Croix- mais emplie d'une confiance
indéfectible en la vie, en sa réalité et en sa capacité à nous révéler à
nous-mêmes et à nous mener plus loin sur le chemin de notre être. Je
suis revenue avec le désir profond de révéler cette expérience à
l'humanité afin qu'elle puisse faire grandir la vie en elle, comme elle
l'a fait en moi.
J'ai remarqué, à la suite de cette expérience, que je m'implique
beaucoup moins dans les conflits de personnalité, les rapports de force
existant autour de moi. Je prends naturellement de la distance envers
les événements et les êtres. Je vais bien mieux à l'essentiel.
II m'arrive de plus en plus souvent de sentir s'il est bon d'aider les
personnes au niveau de leur personnalité ou s'il est meilleur de les
laisser à la sagesse aimante de leur âme. Je suis de plus en plus
encline à refuser de succomber aux mirages de leurs personnalités parce
que ce n'est pas leur rendre service, ceci afin de mieux les aider (à ma
mesure) au niveau de l'âme ; peut-être en aidant celleci à s'éveiller.
II est vrai aussi qu'il est plus facile de sentir ce qui fait défaut
chez les autres qu'en soi-même.
Le fait d'avoir vu que cette vie n'était qu'une phase transitoire dans
la progression de l'âme m'a aidée à mieux accepter les injustices et les
souffrances de l'humanité, tout en l'aidant le mieux possible.
En ce qui concerne ma position par rapport à la religion, je dirais que
je me sens faire partie de la Grande Religion, celle de l'Amour, celle
qui est au coeur de chaque être. J'ai été élevée dans la religion
catholique romaine qui recèle en son sein des trésors, mais je ne me
sens plus limitée par le poids de l'institution religieuse.
J'ai énormément de respect pour toutes les religions et philosophies qui
font grandir l'homme mais le plus important pour moi, c'est le chemin de
la transformation bien plus que la croyance en des dogmes établis. Le
chemin de transformation est pour moi la voie, le processus alchimique
qui fait de la chenille un papillon et l'amène à la grande expérience
qui est l'expérience de Dieu dans chaque être humain. Là, nous arrivons
à la réconciliation.
Cette expérience m'a permis d'être plus tolérante envers les autres, de
ne pas les juger, sans être pour autant complaisante, parce que je sais
que nous sommes tous en "devenir".
Je sais aussi que notre vie est sacrée, qu'elle est un don du ciel pour
évoluer.
Je suis revenue avec un sens de la beauté exacerbé, beauté d'une fleur,
d'un paysage, d'un enfant qui s'éveille à la vie mais aussi, beauté des
âmes. Je ressens beaucoup plus qu'avant la présence d'une grâce dans la
nature et dans tout ce qui est et, parfois, j'en ai les larmes aux yeux.
J'aspire à retrouver l'unité éprouvée durant l'expérience où j'étais
dans le tout et où le tout était en moi.
II y a surtout trois choses qui ont été difficiles à vivre après cette
expérience. L'une concerne ma difficulté à ne pouvoir vivre "à la pointe
de mon âme" comme durant l'expérience. En effet, j'avais goûté à une
telle paix, si loin des mesquineries et misères humaines, j'étais si
comblée et dans une telle plénitude que j'aurais voulu toujours garder
cet état.
J'aimerais vivre toujours de cette Présence mais comme il est difficile,
dans la vie courante, de la garder, alors que tous les êtres qui vivent
autour de nous n'ont pas cet idéal, faute d'avoir vécu l'expérience.
C'est une souffrance de ne pouvoir réaliser cet état en nous et autour
de nous.
Le temps a passé et avec plus de maturité, j'ai compris qu'il fallait
donner du temps au temps pour réaliser cette perfection en soi-même et
qu'il y aura toujours un décalage entre l'idéal et sa réalisation.
Une autre source de difficultés a consisté à maintenir l'équilibre et
l'harmonie dans mon couple et la stabilité chez mes enfants. II n'est
pas facile de vivre une expérience aussi profonde sans affecter tous les
membres de son entourage.
II a fallu de nombreuses années pour nous harmoniser, mon mari et moi,
pour qu'il me respecte et ne craigne pas que mon changement intérieur
modifie notre situation de couple, pour qu'il sache que je l'aime tel
qu'il est, sans avoir besoin de changer quoique ce soit à ce qu'il est.
II faut dépasser la peur et cela nécessite beaucoup de patience et de
confiance mutuelles ainsi que d'amour des deux côtés. Je le remercie
pour avoir accepté d'être dérangé.
Ma plus grande difficulté tout au long de ces années a été de vivre à
l'intérieur de moi quelque chose de puissant, exigeant, presque
incommunicable, tout en restant dans le silence et la solitude pour la
plupart du temps, et sans que mes proches ne devinent à quel point ce
qui se passait à l'intérieur de moi était important.
J'essaie de vivre toutes ces transformations intérieures le plus
simplement possible. Je constate que j'ai besoin de beaucoup de
solitude, j'aime à rentrer dans le silence et pourtant, je sens que je
dois partager cette expérience. Étrange paradoxe ! Les conversations
oiseuses, les controverses mentales m'ennuient. Ne parlons pas de la
médisance !
J'ai un besoin très fort d'authenticité, de vérité, d'innocence même. 1e
me sens parfois aspirée dans mon oasis de paix, dans la quiétude, libre
du passé et du futur.
Cette expérience m'a ouvert des horizons insoupçonnés sur le passé et le
futur de notre humanité Quand je suis "revenue à la vie", j'ai pensé que
c'était plus fantastique que ce que l'on pouvait imaginer et que
l'avenir nous apporterait de grandes surprises ...
Alors, évidemment, c'est tout un sensorium intérieur qui s'est ouvert et
le besoin de retrouver et de comprendre les mystères qui ont été révélés
pendant l'expérience.
Des sujets qui m'étaient auparavant indifférents sont devenus importants
pour moi, l'espace et le temps, le mystère de la création, l'énergie, le
sens et le but de la vie, la conscience, etc...
L'Amour, dans mon expérience, était de l'amour-connaissance et j'essaie
de le vivre simplement dans la vie de tous les jours, en m'ouvrant à
l'autre en "étant" tout simplement.
La découverte que l'amour-sagesse est la vie de l'univers, est mon
trésor à moi et j'aimerais qu'elle soit le trésor de tous. Imaginez au
coeur de la politique, de l'armée, de la finance, de l'éducation, des
institutions "l'amour-sagesse" ! Tout deviendrait juste, le bonheur de
l'homme serait assuré.
J'en reviens à l'expérience. Si elle est difficile à exprimer, la
croissance intérieure qui en découle, le travail souterrain, l'appel de
l'âme, les aridités, les silences, les souffrances secrètes, l'exigence
de vivre vrai, de cette vérité de l'âme qui est au-delà des lois
conventionnelles, tout cela est encore bien plus difficile à exprimer et
ne peut vraiment être compris que par quelqu'un faisant la même
démarche, d'où l'obligatoire solitude et le silence ...
Mais je suis heureuse d'avoir vécu cette expérience. S'il n'a pas été
facile à un certain moment de ma vie d'en parler sans susciter l'ironie,
l'indifférence ou la condescendance, je comprends maintenant que
l'épreuve était nécessaire pour "tremper l'acier".
Vivre vrai, sans renier l'expérience par facilité ou pour plaire aux
autres, a été à la fois un défi mais aussi une exigence car sinon,
j'aurais eu l'impression de mourir.
Cette expérience a donné une dimension immense à ma vie. Sans elle, j'ai
l'impression que j'aurais risqué de vivre d'une façon superficielle et
de passer à côté de l'essentiel.
Quand on est sur le chemin de son âme, l'on s'aperçoit que les
difficultés existent toujours, puisqu'elles sont éducatives mais l'on
s'aperçoit aussi que l'on est aidé de toutes les façons possibles,
rêves, synchronicités, rencontres et livres qui vous aident.
Cette expérience a suscité en moi le désir de la transparence, le désir
d'Etre, mais aussi le goût du partage et du don de soi.
Roland de Jouvenel a dit à sa mère : "Maman, on se nourrit de ce que
l'on donne aux autres". Cette citation est le fil conducteur, le fil
d'or de ma vie.
J'ai la conviction profonde que je n'ai pas vécu cette expérience pour
moi seule et que je dois la partager avec tous.
Quand je retournerai dans la Lumière de Dieu, j'aimerais que toutes les
petites graines de lumière qui ont été semées aux quatre vents dans le
coeur des gens soient devenues des pierres précieuses.
Nicole DRON |