CHAPITRE III: DE L'ENFANCE À LA PUBERTÉ
Les véhicules du nouveau-né ne deviennent pas immédiatement actifs. Le corps dense reste impuissant pendant longtemps après la naissance.
Il en est de même des forces qui sont actives dans le corps du désir. Le sentiment passif de douleur physique est présent, alors que le sentiment d'émotion est presque complètement absent. L'enfant manifeste, bien entendu, de l'émotion pour la moindre des choses, mais cette émotion est de courte durée: elle est toute en surface.
Le corps vital de la plante construit ses feuilles les unes après les autres et porte la tige de plus en plus haut. Sans l'activité du corps du désir du Macrocosme, le corps vital poursuivrait indéfiniment son ouvre de construction; mais le corps du désir macrocosmique intervient en temps voulu et s'oppose à un excès de croissance. La force que la plante ne dépense plus pour la croissance est alors disponible pour un autre objet et sert à la construction de la fleur et de la semence. De même, après la septième année, lorsque le corps dense passe sous la domination du corps vital, ce dernier cause sa croissance rapide; mais vers la quatorzième année, le corps du désir individuel naît de la matrice du corps du désir macrocosmique et commence à travailler sur le corps dense.
L'excès de croissance est alors arrêté et la force employée jusqu'ici pour le développement du corps dense devient disponible pour la reproduction, afin que la plante humaine puisse fleurir et porter des fruits. Aussi, la naissance du corps du désir individuel marque-t-elle le début de la période de puberté. A partir de ce moment, l'individu éprouve de l'attraction pour le sexe opposé, et cette attraction est spécialement active et sans restriction pendant la troisième période septennale de la vie, de la quatorzième à la vingt et unième année, parce que l'intellect qui doit servir de frein n'est pas encore né.
Il ne faut pas croire cependant que lorsque le petit corps de l'enfant est né le processus de la naissance est achevé. Le corps physique dense a eu l'évolution la plus longue et, tout comme un cordonnier expérimenté est plus habile qu'un apprenti et qu'il travaille plus vite, il en va de même pour l'Esprit qui a déjà construit de nombreux corps physiques; il est capable de construire le sien rapidement, mais le corps vital est plus récent chez l'être humain. C'est pourquoi nous sommes moins habiles à former ce véhicule. Il faut donc beaucoup plus de temps pour le bâtir avec les matériaux non utilisés lors de la formation de l'enveloppe de l'archétype, et c'est pourquoi le corps vital ne naît pas avant la septième année. C'est alors que commence la période de croissance rapide. Le corps du désir est une acquisition encore plus récente de l'homme composite et ne naît que vers quatorze ans, au moment où la nature-désir s'exprime le plus fortement pendant l'ardente jeunesse; enfin, l'intellect qui fait de l'être humain un homme naît à vingt et un ans. C'est à cet âge que la loi reconnaît à l'individu le droit de vote.
A quatorze ans, naît le corps du désir qui marque le début de l'affirmation de soi-même. Dans ses jeunes années, l'enfant se considère plutôt comme appartenant à une famille et il est plus subordonné aux désirs de ses parents que lorsqu'il a atteint quatorze ans. En voici la raison: dans la gorge du fotus et du jeune enfant se trouve une glande appelée thymus, très grande avant la naissance et qui diminue graduellement durant les années d'enfance pour disparaître finalement à un âge variant selon les caractéristiques de l'enfant. Les anatomistes ont été intrigués par le fonctionnement de cet organe et ne sont pas encore arrivés à une conclusion définitive, mais on a suggéré qu'avant le développement des os dont la moelle est rouge, l'enfant est incapable de fabriquer son propre sang et que le thymus, en conséquence, contient une essence fournie par les parents dans laquelle l'enfant puise pendant l'enfance et la jeunesse jusqu'à ce qu'il soit capable de produire lui-même son propre sang. Cette théorie est à peu près exacte, et tant que le sang des parents coule dans l'enfant, il se considère comme étant de la famille, et non comme un Ego. Mais aussitôt qu'il commence à produire son propre sang, l'Ego s'affirme, et il possède sa propre identité, le "je". Alors arrive l'âge critique où les parents récoltent ce qu'ils ont semé. L'intellect n'est pas encore né, rien ne tient en échec la nature-désir; aussi tout dépendra de la façon dont l'enfant a été éduqué et l'exemple qu'il a reçu des parents. A ce tournant de la vie, l'assertion du soi, le sentiment du "je suis" est plus fort qu'à n'importe quel autre moment, et l'autorité devrait faire place au conseil. Les parents devraient pratiquer la plus grande tolérance car, à aucune période de l'existence, l'être humain ne ressent davantage ce besoin de sympathie que durant les sept années de quatorze à vingt et un ans, lorsque la nature-désir est puissante et non dominée.
Le corps du désir a besoin d'être protégé contre les attaques du Monde du Désir jusqu'à sa naissance, vers la quatorzième année, au moment que nous appelons la puberté. Quant au mental, il n'est pas assez mûr pour être libéré de son enveloppe protectrice avant que l'homme atteigne sa majorité à vingt et un ans. Ces périodes ne sont qu'approximatives, car chaque personne diffère des autres en ce qui concerne l'exactitude des périodes de temps, mais celles que nous donnons sont assez précises.
Nous avons vu que, quand l'Ego a terminé son temps à l'école de la vie, la force centripète de Répulsion lui fait rejeter à la mort son véhicule dense, puis le corps vital qui est le plus dense après lui. Au Purgatoire ensuite, la matière-désir la plus dense accumulée par l'Ego pour y incorporer ses désirs les plus bas, a été expurgée par cette force centrifuge. Dans les royaumes supérieurs seulement, la force d'Attraction domine et conserve le bien par action centripète, qui tend à tout attirer de la périphérie vers le centre.
C'est aussi cette force centripète d'Attraction qui gouverne pendant que l'Ego est en voie de renaissance. Nous savons que nous pouvons jeter une pierre plus loin qu'une plume. C'est pourquoi la matière la plus dense a été rejetée à l'extérieur après la mort par la force de Répulsion. Pour la même raison la matière la plus dense - dans laquelle l'Ego qui revient incorpore ses tendances au mal - est projetée en tourbillons à l'intérieur, vers le centre par la force centripète d'Attraction. Résultat: à la naissance d'un enfant tout ce qui est le meilleur et le plus pur apparaît à l'extérieur. Le mal latent ne se manifeste pas habituellement avant la naissance du corps du désir vers l'âge de quatorze ans, où les courants de ce véhicule commencent à jaillir vers l'extérieur venant du foie. A ce moment, l'Ego commence à "vivre" sa vie individuelle et montre ce qu'il contient.
Le corps du désir naît vers la quatorzième année au moment de la puberté. C'est le moment où émotions et passions commencent à exercer leur pouvoir sur les jeunes gens et jeunes filles, car la matrice de matière-désir qui protégeait auparavant le corps du désir naissant est ôtée. C'est là dans la plupart des cas un temps d'épreuves; il est bon pour l'adolescent d'avoir appris à considérer avec respect ses parents et ses maîtres, car il puisera en eux la force de résister à l'assaut des émotions. S'il a été habitué à avoir confiance en ses aînés, et s'il a reçu d'eux un enseignement sage, il aura développé à ce moment un sentiment intime de la vérité qui lui sera un guide sûr, mais dans la mesure où il aura négligé de le faire, il risquera d'aller à la dérive.
Quand une personne meurt dans l'enfance, elle se rappelle parfois cette vie dans son existence suivante, parce que les enfants de moins de quatorze ans ne font pas le tour complet d'un cycle de vie qui rend nécessaire la construction d'une série complète de nouveaux véhicules. Ils passent seulement dans les Régions Supérieures du Monde du Désir, et là ils attendent une nouvelle naissance qui a lieu habituellement d'un à vingt ans après la mort. Quand ils viennent renaître, ils apportent avec eux leur ancien intellect et leur ancien corps du désir.
CHAPITRE IV: APPARENCE ET FONCTIONS DU CORPS DU DÉSIR
Nous possédons, en plus du corps visible et du corps vital, un véhicule fait de substance désir avec laquelle nous formons nos sentiments et nos émotions. Ce véhicule nous pousse également à rechercher la satisfaction de nos sens. Mais tandis que les deux instruments dont nous avons déjà parlé sont bien organisés, le corps du désir apparaît à la vue spirituelle tel un ovoïde nuageux, s'étendant de 40 à 50 centimètres au-delà du corps physique. Il dépasse la tête et les pieds, de sorte que notre corps dense se trouve au centre de ce nuage ovoïde, tout comme le jaune est au centre de l'ouf.
La raison de l'état rudimentaire de ce véhicule est qu'il a été ajouté plus récemment à la constitution humaine que les autres corps. L'évolution de la forme peut se comparer à la façon dont les sucs de l'escargot se condensent d'abord en chair, puis deviennent une coquille dure. Notre corps visible actuel, lorsqu'il était en germe dans l'Esprit, était d'abord une forme-pensée, mais il est graduellement devenu plus dense, jusqu'à être maintenant une cristallisation chimique.
Le corps vital, à son tour, a été émané de l'Esprit comme forme-pensée, et il se trouve dans la troisième phase de concrétion, qui est éthérique. Le corps du désir est une acquisition encore plus récente. Lui aussi était d'abord une forme-pensée qui s'est condensée en substance-désir. L'intellect, dernier reçu, n'est encore qu'une simple forme-pensée nuageuse.
Des bras et des jambes, des oreilles ou des yeux ne sont pas nécessaires pour utiliser le corps du désir, car il peut glisser à travers l'espace beaucoup plus vite que le vent sans aucun des moyens de locomotion indispensables dans ce monde visible.
Lorsqu'on l'examine à la vision spirituelle, on distingue dans le corps du désir plusieurs centres tourbillonnants. Nous avons déjà expliqué qu'une des caractéristiques de la matière-désir est d'être en mouvement constant; du centre principal situé dans la région du foie, un flot continu rayonne vers la périphérie de ce corps en forme d'ouf, puis retourne vers le centre à travers plusieurs autres tourbillons. Le corps du désir présente toutes les couleurs et nuances que nous connaissons, ainsi qu'un grand nombre d'autres inexprimables en un langage terrestre. Ces couleurs varient en chaque personne selon le tempérament et les caractéristiques de chacune d'elles, et elles se transforment selon l'humeur, le caprice ou les émotions de celle-ci. Il y a cependant dans chaque être une couleur de base provenant de la planète régnante du thème natal. Celui qui possède dans son horoscope un Mars particulièrement puissant a son aura teintée d'écarlate. Là où Jupiter est la planète la plus forte, la nuance qui domine est un ton de bleu, et ainsi de suite pour chaque planète.
Dans l'histoire passée de la Terre, il fut un temps où la solidification de la couche terrestre était incomplète, et les hommes de cette époque vivaient sur des îles dispersées au milieu des mers bouillonnantes.
Ils n'avaient encore développé ni yeux ni oreilles, mais la glande pinéale, petit organe que les anatomistes ont appelé le troisième oil, était protubérante derrière la tête; organe localisé de sensation, elle prévenait l'homme du danger lorsqu'il approchait trop près d'un cratère et lui permettait ainsi d'échapper à la destruction. Depuis lors les hémisphères du cerveau ont recouvert la glande pinéale et, au lieu d'un simple organe de sensation, tout le corps, intérieurement et extérieurement, est sensible au toucher, ce qui naturellement représente un état de développement plus élevé.
Dans le corps du désir, chaque particule est sensible à des vibrations similaires à celles que nous appelons vue, son, sentiments, et chaque particule est en mouvement incessant tourbillonnant rapidement de côté et d'autre, de sorte qu'elle peut se trouver au même instant en bas ou en haut du corps du désir et communiquer de tous côtés à toutes les autres particules la sensation qu'elle vient d'avoir. Ainsi, chaque particule de matière-désir de ce véhicule qui est nôtre, ressentira immédiatement toute sensation reçue isolément par n'importe quelle particule. C'est pourquoi le corps du désir est d'une nature excessivement sensible, capable de ressentir les sentiments et les émotions les plus intenses.
Le corps du désir est le véhicule des sentiments et des émotions qui changent d'un moment à l'autre. Bien que l'éther constitutif du corps de l'âme soit constamment en mouvement et se mélange à la circulation du sang, ce mouvement est comparativement lent comparé à la rapidité des courants du corps du désir.
La substance-désir se meut avec une rapidité inconcevable, comparable à celle de la lumière.
Les impulsions du corps du désir chassent le sang à travers le système à des taux variés de vitesse selon la force des émotions.
A notre époque, les substances des différentes Régions inférieures et celles des Régions supérieures entrent dans la composition du corps du désir de la grande majorité des hommes. Il n'y en a pas qui soient si mauvais qu'ils ne possèdent quelques bons côtés. Ces qualités trouvent leur expression dans les substances des Régions supérieures que nous trouvons dans leur véhicule du désir. Mais, d'autre part, il en est bien peu parmi nous qui soient bons au point de ne pas avoir en eux de la matière des Régions inférieures.
Comme nous l'avons vu dans l'exemple de l'éponge, du sable et de l'eau, le corps vital et le corps du désir planétaires pénètrent la matière dense de la Terre; de même, ils interpénètrent les véhicules de la plante, de l'animal et de l'homme. Mais durant sa vie sur la Terre, le corps du désir de l'homme n'a pas la même forme que son corps dense et son corps vital. Il ne prend cette forme qu'après la mort. Durant la vie ici-bas, il a l'apparence d'un ovoïde lumineux qui, pendant les heures de veille, entoure le corps dense comme l'albumine entoure le jaune d'ouf. Il s'étend de trente à quarante centimètres en dehors du corps dense. Dans le corps du désir, il y a plusieurs centres de perception, mais ils sont encore à l'état latent chez la grande majorité des êtres humains. C'est l'éveil de ces centres qui correspond à l'acquisition de la vue pour l'aveugle dans notre exemple précédent. La substance du corps du désir de l'homme est constamment agitée d'un mouvement d'une rapidité inconcevable. Aucune particule n'a de place fixe, comme dans le corps dense. La substance qui à un moment donné, se trouve dans la tête, peut un instant après se trou-ver aux pieds, puis de nouveau dans la tête.
Il n'y a pas d'organes dans le corps du désir comme dans les corps vital et dense, mais bien des centres de perception qui, lorsqu'ils sont actifs, présentent l'aspect de tourbillons, situés pour la plupart près de la tête, et qui conservent toujours la même position par rapport au corps physique. Pour la majorité des gens, ce sont de simples remous, sans utilité aucune en tant que centres de perception. Toutefois, ils peuvent être éveillés chez tous; mais les résultats diffèrent selon les méthodes employées.
Chez le clairvoyant involontaire, mal développé par des méthodes négatives, ces tourbillons tournent de droite à gauche, c'est-à-dire dans le sens opposé à celui des aiguilles d'une montre.
Dans le corps du désir du clairvoyant volontaire, correctement développé, ils tournent dans le même sens que les aiguilles d'une montre et brillent avec une splendeur éblouissante qui surpasse de beaucoup la luminosité scintillante du corps du désir d'une personne ordinaire. Ces centres lui donnent le moyen de percevoir les choses du Monde du Désir et lui permettent de voir et d'observer ce monde comme il l'entend; tandis que la personne dont les centres de perception tournent en sens contraire est comme un miroir qui réfléchit simplement ce qui passe devant lui. Une telle personne est incapable de trouver les informations qu'elle cherche. C'est une des différences fondamentales qui existe entre un médium et un clairvoyant correctement développé. La plupart des gens ne peuvent les distinguer l'un de l'autre; il y a cependant une règle infaillible qui permet d'en juger: jamais un clairvoyant correctement développé n'exercera sa faculté de clairvoyance en vue d'une rémunération quelconque, il ne s'en servira pas non plus pour satisfaire simplement la curiosité de qui que ce soit, mais uniquement pour venir en aide à son prochain.
PAGE 50, Figure 2a. - L'homme ordinaire,
PAGE 51, Figure 2b. - Le
Clairvoyant volontaire,
PAGE 52, Figure 2c. - Le
Clairvoyant involontaire,
tirées de la Cosmogonie des Rose-Croix.
CHAPITRE V: EFFETS DES ÉMOTIONS SUR LA FORME ET LA COULEUR
Le Christ a dit: "Laissez luire votre lumière". A la vision spirituelle, chaque être humain apparaît comme une flamme de lumière, dont les couleurs varient selon le tempérament de la personne et dont l'éclat est proportionné à la pureté de son caractère. La science a découvert que toute matière est en état de transformation, que les particules composant nos corps ne cessent de se décomposer et d'être remplacées par d'autres qui restent pour un temps seulement avant de se décomposer aussi. De même, notre humeur, nos émotions, nos désirs changent d'un moment à l'autre, l'ancien faisant place au nouveau en une interminable succession. Il s'ensuit qu'eux aussi doivent être formés d'une sorte de matière, sujette à des lois comme c'est le cas de celles qui gouvernent les substances physiques visibles.
Voyons maintenant comment le corps du désir se modifie sous l'influence des divers sentiments, désirs, passions et émotions, afin que nous puissions apprendre à construire avec sagesse et justesse le temple mystique dans lequel est notre demeure.
Lorsque nous étudions les sciences dites physiques, telles que l'anatomie ou l'architecture qui traitent de sujets tangibles, le travail nous est facilité par le fait que nous avons des mots pour décrire les choses dont nous traitons, mais même l'image mentale que fait surgir un mot déterminé diffère suivant chaque individu. Quand nous parlons, par exemple, d'un "pont", l'un peut s'imaginer une structure de fer de plusieurs millions de francs, tandis que l'autre pensera à une simple planche jetée sur un ruisseau. La difficulté de donner une impression exacte de notre pensée augmente encore quand il s'agit d'idées relatives aux forces intangibles de la Nature, telles que l'électricité. Nous mesurons la force de son courant en volts, son volume en ampères et la résistance des conducteurs en ohms; mais le fait est que de tels termes ne sont que des mots inventés pour masquer notre ignorance de la chose. Tout le monde sait ce qu'est une livre de café, mais le plus grand savant du monde n'a pas une conception plus exacte de la nature des volts, des ampères et des ohms, dont il parle d'ailleurs avec beaucoup de science, que l'écolier qui entend ces termes pour la première fois.
Rien d'étonnant, dès lors, que les sujets hyperphysiques soient décrits en termes vagues et souvent trompeurs puisque, ne possédant, dans nos langues physiques aucun mot qui les décrive avec précision, nous manquons des moyens voulus pour en faire la description, et nous exprimer en ce qui les concerne. Même si un film en couleurs nous permettait de voir des images du corps du désir et de montrer ainsi sur l'écran comment, ce véhicule très mobile change de forme et de couleurs selon les émotions, cela n'en donnerait pas une idée exacte à celui qui n'est pas capable de voir ces choses par lui-même, car les véhicules de chaque être humain diffèrent de tous les autres, selon la manière dont ils répondent à certaines émotions; ce qui cause de l'amour, de la haine, de la colère, de la crainte, ou tout autre émotion à l'un, peut laisser l'autre complètement indifférent.
A titre de comparaison, l'auteur a souvent observé les foules, et à chaque fois il a trouvé quelque chose de tout à fait nouveau et différent. Certain jour, un démagogue s'efforçait d'engager une assemblée ouvrière à la grève; il était lui-même très excité, et bien que la couleur fondamentale orange foncé de ce véhicule fut perceptible, elle paraissait pour l'instant, presque noyée dans un écarlate des plus brillants, et les contours de son corps du désir étaient hérissés comme un porc-épic. Dans l'auditoire il y avait un fort courant d'opposition, et à mesure que l'orateur parlait, on pouvait distinguer très nettement les deux camps adverses aux couleurs de leur aura respective. Une partie de l'assemblée montrait la couleur écarlate de la colère, tandis que dans l'autre, on voyait l'écarlate entremêlé de gris, couleur de la peur.
Chose curieuse, bien que les hommes à la couleur grise eussent été en majorité, l'autre courant finit par l'emporter, parce que chacun de ces timorés craignant d'être seul dans son espèce ou du moins en minorité, n'avait pas osé exprimer son opinion ou son vote. Si un clairvoyant était présent et était allé trouver chacun de ceux dont l'aura manifestait des signes de défaillance en lui donnant l'assurance que la majorité pensait comme lui, le courant aurait tourné dans le sens opposé. Il en est souvent ainsi dans les affaires humaines, la majorité étant actuellement incapable de voir au-delà des limites du corps physique et de perce-voir la véritable condition des pensées et des sentiments d'autrui.
Une autre fois nous allâmes visiter une assemblée revivaliste où plusieurs milliers de personnes s'étaient réunies pour entendre un orateur de grand renom. La vue des auras individuelles au commencement de la réunion montrait que la plupart des assistants n'étaient venus là que dans le but de se divertir.
On voyait parfaitement que leurs pensées, leurs sentiments et leurs émotions se rapportaient à la vie ordinaire de chacun, mais chez plusieurs d'entre eux on apercevait une certaine couleur bleu foncé, indice d'une attitude soucieuse: ils paraissaient avoir éprouvé quelque déception dans la vie, et semblaient mal à l'aise. Au moment où l'orateur parut, se produisit un phénomène, assez curieux. On sait que le corps du désir est en perpétuel mouvement; or à ce moment précis, on aurait dit que l'auditoire tout entier avait suspendu son souffle dans une attente contenue, car les différents jeux de couleur dans le corps du désir de chacun s'étaient arrêtés et la teinte de fond orangé apparut entièrement visible pendant un instant; mais bientôt aux premiers accords du prélude les activités émotionnelles reprirent comme auparavant. Alors commença le chant des hymnes qui mit en relief la valeur et l'effet de la musique pendant que tous chantaient les mêmes paroles sur la même mélodie; les mêmes vibrations rythmiques s'élevant des différents corps du désir semblaient presque se fondre momentanément en une seule. Certains auditeurs, cependant, assis sur les bancs des railleurs refusaient de chanter, de se joindre aux autres. Observés à la vue spirituelle, ils paraissaient être des hommes d'acier, vêtus d'une armure de cette couleur; de chacun d'eux, sans exception, émanait une vibration qui disait, bien plus clairement que de simples mots n'auraient pu le faire: "Laissez-moi tranquille, vous ne me toucherez pas". Un sentiment intérieur les avaient amenés là, mais ils avaient une peur mortelle de céder; c'est pourquoi toute leur aura exprimait cette teinte acier caractéristique de la crainte, qui est une armure de l'âme contre toute intervention étrangère.
A la fin du premier chant, l'unité de couleur et de vibration se rompit très rapidement chacun reprenant le cours habituel de ses pensées; si la cérémonie s'était arrêtée là, tous s'en seraient retournés à leur vie intérieure accoutumée.
Mais l'évangéliste bien qu'incapable de discerner de tels phénomènes savait par expérience que son auditoire n'était pas encore à point, il fit suivre toute une série de chants, accompagnés de frappements de mains, de battements de tambours, de gesticulations où il était secondé par un chour expérimenté. Tout cela ramena ces âmes dispersées dans les liens de l'harmonie; puis peu à peu la foule se trouva irrésistiblement vaincue par une ferveur religieuse, et l'unité nécessaire à l'effort suivant était établie. Ainsi la musique, les battements de mains du leader et l'appel émouvant des chants avaient fusionné cet immense auditoire qui, désormais, ne faisait plus qu'un, car les railleurs à l'aura grise, qui se croyaient trop sages pour être bernés (alors que leur émotion était vraiment de la crainte) ne formaient qu'une partie négligeable de la vaste congrégation. Tous vibraient à l'unisson comme les cordes d'un immense instrument, et l'évangéliste, devant eux, jonglait en maître-artiste avec leurs émotions. Il les faisait passer du rire aux larmes, de la douleur à la honte; de grandes vagues aussi belles qu'étranges de couleurs correspondant aux émotions, semblaient survoler toute l'assemblée. Vinrent alors les appels coutumiers de "se lever pour Jésus" l'invitation au "banc des pénitents", etc., et de tous les rangs de l'auditoire, chacun apporta la réponse émotionnelle clairement perceptible en teintes bleu et or. D'autres chants, d'autres battements de mains, d'autres gesticulations aidèrent pour que l'unité se fasse, et l'assistance ressentit un semblant de fraternité universelle et de foi en la Paternité de Dieu. Les seuls sur qui la musique ne produisait aucun effet étaient les hommes à l'armure bleu acier de la crainte; cette couleur semble, en effet, presque impénétrable à toute autre émotion. Bien que les sentiments éprouvés par la majorité eussent été passagers, la foule bénéficia néanmoins, dans une certaine mesure, de l'action du leader, à l'exception des hommes à l'aura bleu acier.
Autant que l'auteur peut en juger, la crainte intérieure de céder à l'émotion-la crainte est en effet saturnienne et sour jumelle de l'anxiété-semble nécessiter un choc pour faire sortir de sa sphère immédiate une personne ainsi affectée et la mettre en un autre lieu, dans de nouvelles conditions, avant que les anciennes aient pu être surmontées.
L'anxiété est une condition dans laquelle les courants-désir, au lieu de se propager en longues lignes courbes dans toutes les parties du corps du désir, sont remplis de remous, voire même uniquement formés de remous dans les cas extrêmes. La personne ainsi affectée ne cherche pas à agir dans quelque direction que ce soit; elle voit des calamités là où il n'y en a pas et au lieu de produire des courants générateurs d'action ce qui pourrait prévenir l'objet de la crainte, chaque pensée d'anxiété forme un remous dans le corps du désir; et de là vient leur inertie. Cette condition d'anxiété qui est en permanence dans le corps du désir peut être comparée à celle de l'eau près de se congeler, sous l'influence d'une basse température; la crainte, qui se traduit en scepticisme, en cynisme ou en pessimisme peut être comparée à cette même eau congelée car le corps du désir de ces personnes est presque figé, et rien de ce qu'on peut dire ou faire ne semble pouvoir en changer l'état. Ces êtres se sont, pour employer une expression populaire qui leur convient parfaitement "retirés dans leur coquille" et cette coquille saturnienne doit être brisée avant qu'il soit possible de parvenir jusqu'à eux et les faire sortir de leur état pitoyable.
Les émotions saturniennes de la crainte et de l'anxiété sont généralement causées chez la personne par l'appréhension de difficultés économiques ou sociales. Les suggestions les plus diverses peuvent se présenter à son esprit: "Peut-être que le placement que j'ai fait perdra une partie de sa valeur ou même toute sa valeur; ... il se pourrait que je sois privée de ma situation, et me trouve jetée à la rue, mourant de faim; ... ma femme (ou mon mari) ne m'aime plus,... mes enfants me négligent", etc.
Ces personnes devraient se rappeler une fois pour toutes que chaque fois qu'elles entretiennent des pensées de cette nature, elles contribuent à faire figer les courants dans le corps du désir et à construire une coque bleu acier, la coque de la crainte dans laquelle elles s'enfermeront progressivement par l'habitude prise pour arriver finalement à s'isoler de l'affection, de la sympathie, de l'aide de tout le monde. Efforçons-nous donc de nous montrer optimistes, même dans les circonstances les plus défavorables, afin de ne pas nous trouver en fâcheuse posture ici-bas et dans l'autre monde.
Au commencement de la 1ère Guerre mondiale (1914-1918), les émotions en Europe atteignaient une violence inouïe, aussi bien parmi les soi-disant "vivants" que parmi ceux qui avaient été tués, quand ils se réveillaient. Ce réveil prenait beaucoup de temps à cause des armes lourdes employées, nous en reparlerons plus tard. L'atmosphère entière des pays belligérants était en ébullition, émettant des courants de colère et de haine, semblable à un nuage rouge foncé elle restait suspendue sur chaque être humain et sur le pays tout entier. Semblables à de longs voiles de deuil, pendaient des traînées de couleur sombre qui semblent se produire toujours lors de désastres soudains quand la raison se fige et que le désespoir étreint le cour. Sans aucun doute cet état de choses était causé par le fait que les nations intéressées se rendaient compte de l'imminence d'une catastrophe dont il leur était impossible de saisir toute l'étendue. Les corps du désir de la plupart étaient traversés par de longues vagues de pulsations rythmiques, qui tourbillonnaient avec une grande rapidité, disant plus clairement que des paroles n'auraient pu le faire: "Tuez, tuez, tuez donc".
Lorsque deux ou trois personnes se réunissaient ou qu'un groupe se formait pour discuter de la guerre, les pulsations rythmiques qui indiquaient un dessein bien arrêté d'agir et d'oser, cessaient: les pensées et la surexcitation produites par la discussion ou le discours se traduisaient en projections coniques qui rapidement s'élevaient à une hauteur d'environ 15 à 20 centimètres en émettant une langue de feu. Certaines personnes produisaient simultanément un grand nombre de ces jets volcaniques, d'autres un ou deux seulement. Quand une de ces bulles éclataient dans un endroit, une autre apparaissait ailleurs dans le corps du désir, pendant toute la durée de la discussion ou du discours, et des flammes en sortaient, colorant de cramoisi, le nuage suspendu au-dessus du pays. Lorsqu'une foule se dispersait ou que des amis se séparaient à l'issue d'une discussion de ce genre, le bouillonnement diminuait, les éruptions devenaient moins fréquentes puis finalement cessaient, pour faire place à nouveau aux longues pulsations rythmiques initiales.
Les manifestations de cette nature sont actuellement rares, (1916) si même elles existent encore; pour le plus grand nombre de belligérants, la colère explosive contre l'ennemi se perd dans le passé. On peut voir à nouveau la couleur de base orange de l'aura des habitants de l'Occident, officiers et soldats semblent en être venus à considérer la guerre comme un match (chacun étant soucieux de l'emporter en finesse sur l'autre); toutefois, nombre de Frères Lais de l'Ordre Rosicrucien croient que le courroux entre nations réapparaîtra sous une forme modifiée, quand cesseront les hostilités et que commenceront les négociations de la paix. Cette forme d'émotion peut être appelée colère abstraite et diffère grandement de ce que l'on observe dans le cas d'une querelle ou d'une rixe dans la vie privée; une rixe, vu du côté occulte de la nature, montrent que les hostilités existent avant même que les coups ne soient frappés. Des formes-désir dentelées, aiguës comme des poignards se projettent les unes contre les autres comme des lances, jusqu'à ce que la furie génératrice se soit épuisée. Dans la colère patriotique il n'y a pas d'ennemi personnel; les formes-désir sont donc plus émoussées et font explosion sans quitter la personne qui les a créées.
Les "hommes à l'aura acier", si nombreux dans la vie courante, se créent des soucis qui jamais ne se matérialisent et cristallisent une armure autour d'eux, lorsqu'ils permettent à Saturne de mettre le grappin sur eux. Ces mêmes hommes, si communs dans la vie civile, brillaient par leur absence. L'auteur s'en explique la raison par ce fait que la brutale obligation de partir pour le front a produit le choc qui a brisé la coque dans laquelle ils étaient enfermés; l'accoutumance progressive au danger a fini par engendrer le mépris. La guerre a donc été grandement profitable à ces personnes car rien n'est plus opposé à la croissance de l'âme que la crainte ou l'anxiété durables.
Un autre fait est à remarquer: bien que les hommes engagés dans la guerre souffrent d'affreuses privations, le plus grand nombre n'en cultivent pas moins une teinte bleu ciel indiquant l'espoir, l'optimisme et un sentiment religieux naissant qui donnent au caractère une teinte d'altruisme. Ceci indique que ce sentiment fraternel et universel qui ne fait aucune distinction de croyance, de couleur, ou de nationalité va en croissant dans le cour humain.
Le nuage rouge de la haine se lève, le voile sombre du désespoir s'est évanoui et l'on ne voit plus d'explosion volcanique de colère ni chez les vivants ni chez les morts; mais, autant que l'auteur puisse en juger par les signes des temps dans l'aura des nations, il y découvre le dessein arrêté de continuer cette guerre jusqu'au bout. On remarque cet état d'esprit même dans les foyers qui sont privés de plusieurs de leurs membres; pourtant un grand regret persiste envers les amis disparus, mais il ne subsiste point de haine pour l'ennemi terrestre. Ces sentiments sont partagés par les amis dans l'au-delà dont beaucoup percent le voile car l'intensité de ces sentiments est telle qu'elle va jusqu'à éveiller chez les "morts" le pouvoir de se manifester en attirant de la substance éthérique et gazeuse souvent prélevée sur le corps vital d'un ami "sensitif", comme le fait un Esprit matérialisateur qui se sert du corps vital d'un médium en transe. Alors les yeux aveuglés de larmes s'ouvrent fréquemment à un élan de tendresse et les êtres chers maintenant dans le monde spirituel, se trouvent à nouveau face à face, cour à cour. C'est la méthode de la Nature pour cultiver le sixième sens dont l'acquisition nous rendra finalement tous capables de savoir que l'homme est un Esprit immortel, et que la continuité de la vie est un fait de la Nature.