LETTRES AUX ÉTUDIANTS

MAX HEINDEL



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LETTRE NO 74 - Janvier 1917
TOUT DÉVELOPPEMENT OCCULTE COMMENCE PAR LE CORPS VITAL

Récemment, un de nos amis, qui avait suivi pendant quelques mois nos cours par correspondance, nous a écrit pour nous soumettre une question qui le préoccupait. Il se peut que d'autres, sans être allés jusqu'à nous écrire, partagent son état d'esprit, aussi pensons-nous bien faire, vu l'intérêt général de ce problème, de répondre par cette lettre collective, qui pourra être utile à ceux mêmes qui ne voient pas les choses sous le même angle que notre ami. Il ne voudrait pas se plaindre, dit-il, mais il s'est inscrit aux cours par correspondance dans l'espoir de recevoir des directives propres à favoriser le développement occulte. Au lieu de cela, il reçoit chaque mois "un gentil petit sermon", dont il admet qu'il est bon à la fois pour les débutants et les étudiants plus avancés, mais où est le "cours d'entraînement" auquel il s'attendait? D'autres auteurs donnent des exercices propres à aider leurs élèves: pourrions-nous lui en indiquer un qui lui permette d'acquérir la faculté d'écrire.

Non, nous ne pouvons pas le faire, car les enseignements rosicruciens sont destinés à favoriser les progrès spirituels plutôt que la prospérité matérielle. Nous ne connaissons pas d'exercice occulte propre à vous rendre riches, que ce soit directement ou par une manière anormale de développer une

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faculté latente. Si nous en connaissions un, nous ne l'enseignerions d'ailleurs pas, car cette façon d'user de pouvoirs occultes est de la magie noire. "Cherchez premièrement le Royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données par surcroît", a dit le Christ, et nous pourrons être certains de ne pas faire d'erreurs en suivant son conseil (Matthieu 6:33). Si notre ami, ou qui que ce soit d'autre, désire développer une faculté latente, uniquement pour le bien qu'elle lui permettrait de faire, cette aspiration spirituelle suffira, si elle est cultivée avec persévérance et appuyée par des efforts sur le plan physique (des oeuvres) pour lui permettre de réaliser un jour son désir sans qu'il soit besoin, pour cela, d'un exercice occulte spécial.

En ce qui concerne ces "gentils petits sermons" que sont nos leçons, c'est bien exact, si on les lit superficiellement. Mais si on les étudie à fond, elles contiennent beaucoup de connaissances occultes dont nos étudiants bénéficient bien davantage que d'un exercice tel que celui désiré par notre ami. C'est d'ailleurs sciemment que nous procédons ainsi pour nos leçons; nos étudiants ne s'en rendent peut-être pas compte, aussi allons-nous essayer d'en expliquer la raison. Veuillez bien noter que ce qui suit est une comparaison faite dans un but légitime; ce n'est donc pas une critique.

Outre le fait que l'Ecole Orientale d'Occultisme base ses enseignements sur l'Hindouisme, alors que l'Ecole de la Sagesse Occidentale souscrit au Christianisme, religion de l'Occident, il existe une différence essentielle et inconciliable entre les enseignements des modernes représentants de l'Orient et ceux des Rosicruciens. Selon la version de l'Occultisme oriental, l'importance du corps vital - appelé "Linga Sharira " - est comparativement minime, car il ne saurait être développé comme véhicule de la conscience. Il

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ne sert que de transmetteur de la force solaire, le "prana", et de "lien" entre le corps physique et le corps du désir, appelé "Kama Rupa ", ou aussi "corps astral". Ce dernier, assurent-ils, est le véhicule de l'Aide invisible.

L'Ecole de la Sagesse Occidentale enseigne comme une notion fondamentale que "tout développement occulte commence par le corps vital ", et c'est pourquoi l'auteur, en sa qualité de représentant officiel de cette Ecole, s'est toujours efforcé, dès la fondation de notre mouvement, de recueillir et de publier des informations sur les quatre éthers et le corps vital. De nombreux renseignements à ce sujet ont été donnés dans la "Cosmogonie" et les livres qui ont suivi, mais nos leçons et nos lettres mensuelles donnent les derniers résultats de nos recherches en ce domaine. Nous faisons constamment "étalage" de ce corps vital (vital dans les deux sens du terme) devant le mental de nos étudiants, afin qu'en le connaissant, en y pensant, tout en lisant avec attention les "gentils petits sermons" que nous utilisons pour "enrober" ces informations, ils puissent, à la fois consciemment et inconsciemment, tisser leur "robe nuptiale d'or". Nous aimerions donc conseiller à chacun de relire attentivement ces leçons, année après année; il est possible qu'il s'y trouve beaucoup de scories, mais il y a aussi de l'or parmi elles. (Dans la préface de cet ouvrage, on trouvera la liste des volumes dans lesquels ces leçons ont été réunies).

Avec nos voeux sincères pour une abondante croissance spirituelle durant la nouvelle année.

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LETTRE NO 75 - Février 1917 - SERVIR LA OU ON FAIT LE MIEUX L'AFFAIRE

La question suivante nous a récemment été posée: "Vous parlez beaucoup de servir : qu'entendez-vous exactement par là? Dans le Rosicrucian Fellowship, il y a beaucoup de personnes qui se déclarent enchantées de servir, mais elles ne font jamais que ce qu'elles aiment faire. Est-ce là servir?"

Il semble que cette question puisse nous offrir matière à de profitables réflexions et qu'une analyse de ce sujet serait utile à chacun, aussi avons- nous décidé d'y consacrer cette lettre.

Il est évident que la plupart des gens ne rendront pas de services s'il n'y a pas aussi, dans leur geste, "quelque chose" pour eux. Ils attendent une récompense matérielle, et c'est de cette manière pleine de sagesse que les pouvoirs invisibles les incitent à agir. Par leurs actions, ils évolueront sans s'en rendre compte jusqu'au degré de croissance spirituelle où ils serviront simplement parce qu'ils aiment servir, mais ce changement ne s'opérera pas du jour au lendemain, car il n'y a pas, dans la nature, de transformations soudaines. Lorsqu'une coquille d'oeuf éclate et qu'un poussin en sort, ou lorsqu'un papillon émerge de son cocon pour butiner d'une fleur à l'autre, nous savons que cette transformation magique n'a pas été instantanée, mais que le changement extérieur a été

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précédé d'une préparation intérieure d'une certaine durée. Pour changer les serviteurs de Mammon en serviteurs de l'esprit d'Amour, un processus similaire de croissance intérieure est indispensable.

Si nous désirons agrandir un bâtiment, il nous suffit de faire amener sur place des briques, avec les autres matériaux nécessaires, de mettre des ouvriers au travail - et voilà le bâtiment qui commence à s'agrandir jusqu'aux dimensions désirées, avec une rapidité qui dépend uniquement des travailleurs et de l'apport des matériaux. Mais pour augmenter les dimensions d'un arbre ou d'un animal, nous ne pouvons arriver à nos fins en clouant des planches sur le tronc d'un arbre ou en ajoutant de la chair et de la peau sur le dos de l'animal. Le bâtiment s'accroît par des adjonctions extérieures, mais chez tout ce qui vit la croissance physique procède de l'intérieur et peut difficilement s'accélérer sans danger de complications. Il en est de même de la croissance spirituelle: elle procède de l'intérieur et nécessite un certain temps. Nous ne pouvons attendre de personnes venant seulement de ressentir une incitation intérieure qui les conduit à s'affilier à une association aux tendances altruistes, qu'elles renoncent en un clin d'oeil à tout égoïsme et à leurs autres défauts pour atteindre à la stature du Christ. Au mieux, nous ne sommes qu'un tout petit peu meilleurs qu'auparavant, à part le fait que, maintenant, nous nous efforçons de marcher sur ses traces; mais c'est cela qui fait toute la différence, car nous essayons de servir comme Il servait.

Si c'est bien là notre motif, le fait qu'une personne musicienne aime à jouer pour nous inspirer un sentiment de dévotion ne l'empêche pas de "servir". Le service d'un orateur n'est pas non plus diminué par le fait que, tout en stimulant notre zèle à servir le Maître, il aime recourir à de belles

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expressions pour en revêtir ses idées. Et tant mieux si la personne qui a balayé, épousseté et décoré la salle aime à la rendre aussi attractive que possible. Chacun peut certainement servir beaucoup mieux s'il le fait selon son inclination naturelle et ses aptitudes, et nous devrions nous encourager mutuellement à chercher à nous rendre utiles dans les domaines pour lesquels nous avons un certain talent.

Il n'y a pas de mérite particulier à chercher à servir dans une capacité qui ne nous agrée pas. Ce serait certainement une erreur si la personne chargée de jouer disait à celle qui prend soin de la salle: "Je n'aime pas balayer et décorer les salles et, d'autre part, je sais que, faute de pratique, vous auriez très peur de devoir jouer, mais nous allons permuter, afin de mieux servir." Toutefois, si personne n'était pas disponible pour jouer, la personne décorant la salle aurait le devoir d'oublier son embarras et de rendre service aussi bien que possible. Si le sol devait être balayé et les sièges époussetés, l'orateur et le musicien devraient également être prêts à faire ce travail, sans avoir égard à leurs préférences personnelles. Aucun travail n'est avilissant; et les principes valables dans un Centre s'appliquent aussi à la vie chez soi, à l'atelier ou au bureau. Le service peut se définir comme étant le meilleur emploi de nos talents - le fait de consacrer nos talents au meilleur usage possible dans chaque cas de besoin immédiat, sans tenir compte de nos préférences ou de nos aversions.

Si nous nous efforçons d'agir ainsi, nos progrès et la croissance de notre âme augmenteront dans la même proportion.

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LETTRE NO 76 - Mars 1917 - "AMES PERDUES" ET RETARDATAIRES

Désireux de connaître le point de vue rosicrucien à ce sujet, un de nos étudiants nous a demandé une leçon sur les "âmes perdues" et les retardataires. Cette question ayant déjà été traitée dans la lettre NO 17 d'avril 1912, nous y renvoyons notre correspondant. Nous serions cependant heureux si d'autres étudiants ayant des questions d'intérêt général voulaient bien nous les soumettre pour qu'il y soit répondu au moyen de ces lettres, car, même si les "Rays" ont une rubrique pour les questions et réponses, nos étudiants n'y sont pas tous abonnés. D'autre part, les problèmes en question pourront aussi être traités d'une façon plus "intime" que cela ne serait le cas dans une revue dont certains abonnés et acheteurs ne sont pas aussi au courant de notre philosophie que nos étudiants.

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LETTRE NO 77 - Avril 1917 - L'INUTILE PEUR DE LA MORT

Il est vraiment navrant de voir le chagrin de ceux qui ont été séparés, par la mort, de l'un de leurs bien-aimés, et de constater qu'en des cas extrêmes ils consacrent le reste de leur vie à pleurer celui qui est parti. Ils s'habillent de noir et pensent que ce serait une insulte à la mémoire du disparu de se permettre même un sourire. Ils ne se rendent pas compte que, par cette attitude envers ceux qu'il font profession d'aimer, ils les retiennent dans les régions les plus denses du Monde du Désir, un plan où tout ce qui est mauvais vit et se meut en contact étroit avec le côté bas et égoïste de l'humanité. Ce ne sont pas là des craintes imaginaires, mais des faits démontrables pour quiconque a seulement la moindre extension de la vision physique.

Le fait est que ceux qui étudient les enseignements rosicruciens et y croient sont vraiment favorisés du sort, car ils se libèrent graduellement de la peur de la mort et du sentiment qu'une grande calamité est survenue lorsqu'un de leurs proches bien-aimés passe dans le monde invisible. Lorsque l'esprit qui s'en va reçoit les soins et l'aide dont il a besoin pour sa transition, les "vivants" et les soi-disant "morts" en retirent tous deux des bénédictions. En effet, l'esprit est alors capable d'assimiler le panorama des évènements de sa vie écoulée, ce qui rendra son existence d'outre-tombe plus "fournie" et profitable, n'ayant pas été troublée par le chagrin, les regrets et les pleurs hystériques de ceux qui restaient sur le plan terrestre. Au cours des années qui suivent, cet esprit décédé peut d'ailleurs encore être aidé par leurs prières.

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D'un autre côté, ceux des "vivants" qui étudient ces enseignements apprennent à assumer, en face de la mort, cette attitude désintéressée, tellement nécessaire au développement de l'âme, en se rendant compte que la mort du corps physique, le moment venu, est réellement la plus grande bénédiction qui puisse échoir à l'humanité. Nul d'entre nous ne possède un corps assez parfait pour y vivre éternellement. La plupart du temps, la fuite des années fait ressortir, l'un après l'autre et toujours davantage, les points faibles de nos véhicules, qui se cristallisent et se durcissent à tel point que, finalement, ils deviennent un fardeau dont nous sommes trop heureux de nous défaire. Nous avons d'ailleurs l'espérance, la certitude même, de recevoir plus tard un corps tout neuf pour prendre un nouveau départ qui nous permettra d'apprendre davantage de leçons à l'Ecole de la Vie.

L'époque de Pâques est celle où notre célébration de la Mort mystique oriente tout naturellement nos pensées, et celles de l'humanité en général, sur le sujet de la mort et de la renaissance. Aucun enseignement n'est aussi important, aussi précieux que celui de la renaissance dans de nouveaux corps; et l'humanité en a plus que jamais besoin, vu le déchaînement de cruauté et de tuerie qui sévit depuis deux ans et demi en Europe. La famille humaine a des rapports si généralisés et si étroits qu'il y a comparativement peu de personnes, dans le monde, qui n'aient perdu, soit des parents plus ou moins proches, soit des amis dans cette lutte gigantesque.

Ceux qui connaissent la vérité au sujet de la mort ont à la fois le devoir et le privilège de la faire connaître autant que possible à ceux qui sont encore dans les ténèbres de l'ignorance à propos des faits touchant ce passage. Je voudrais donc faire comprendre aux étudiants du Rosicrucian Fellowship que nous sommes les gérants

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de toutes nos possessions, aussi bien mentales que physiques, et que nous avons le devoir, pour autant qu'il soit possible de le faire avec tact et diplomatie, de partager ces bonnes nouvelles avec ceux qui n'ont pu en bénéficier jusqu'ici. En "jetant notre pain sur la face des eaux", nous ne pouvons jamais savoir comment il nous reviendra. Il est certain que ces enseignements, temporairement tombés dans l'oubli, devront de nouveau être connus de toute l'humanité; et nous devrions partager ces perles de connaissance chaque fois que cela est possible. En négligeant de le faire, nous commettons un péché d'omission dont nous devrons rendre compte un jour ou l'autre.

Je compte bien que vous prendrez ces lignes à coeur, en consacrant vos efforts à la diffusion de cette connaissance, non seulement lorsque l'occasion s'en présentera, mais aussi en devançant le temps et en créant l'occasion. Toutefois, opérez avec tout le tact possible, afin de ne pas courir à un échec en vous y prenant de la mauvaise manière. Il n'est d'ailleurs pas nécessaire de mettre une étiquette quelconque à cette connaissance, car des citations bibliques peuvent servir à montrer que les Anciens d'Israël croyaient à cette doctrine, puisqu'ils avaient envoyé des messagers à Jean-Baptiste pour lui demander s'il était Elie. Ils avaient aussi fait des conjectures au sujet de savoir si le Christ était Moïse, Jérémie ou quelque autre prophète, ce qui confirme que telle était leur croyance. Quant au Christ, il croyait également à la renaissance, puisqu'il a clairement fait entendre que Jean-Baptiste était Elie. Paul fait allusion à cette doctrine dans le 15e chapitre de la première Epître aux Corinthiens, et ailleurs encore.

Vous ne pouvez rendre à l'humanité de service plus grand qu'en lui enseignant ces vérités.

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LETTRE NO 78 - Mai 1917 - DÉVELOPPEMENT DU COEUR ET INITIATION

En dictant la leçon de ce mois (incorporée dans le chapitre 7 de "Franc- Maçonnerie et Catholicisme") je me suis demandé si, oui ou non, vous retiriez le profit maximum de ces leçons. Tout dépend de la manière dont vous les étudiez, car vous ne pouvez en retirer davantage que ce que vous y mettez vous-mêmes. Il m'a donc paru bon de consacrer cette lettre à un petit exposé sur la méthode à suivre pour en retirer le meilleur profit.

Vous savez que les enseignements rosicruciens visent à développer l'intelligence et le coeur d'une manière égale, en donnant toutes les explications avec assez de logique pour que l'intelligence soit prête à les accepter, permettant ainsi au coeur de donner libre cours à son assimilation des notions reçues. Si vous vous contentez de lire votre leçon mensuelle, d'y réfléchir et de la juger raisonnable en tant qu'explication du sujet traité pour, ensuite, la mettre de côté et n'y plus penser, elle ne vous sera pas d'un grand profit, vu que vous n'aurez fait travailler que votre cerveau, mais non votre coeur. Après avoir assimilé intellectuellement la leçon et y avoir donné votre assentiment, il faudrait la reprendre de temps à autre, au cours du mois, lorsque vous vous sentez dans les dispositions voulues pour un tel exercice, et la laisser agir sur votre nature dévotionnelle. Parcourez la

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leçon en essayant de n'y pas du tout penser et d'exclure autant que possible le mental de votre exercice. Cherchez à "ressentir" la leçon, car le sentiment est une fonction du coeur. Essayez de voir par l'esprit les choses et les sujets dont traite la leçon.

A titre d'exemple, la leçon accompagnant cette lettre traite de l'humanité, telle qu'elle existait lorsque les humains étaient encore hermaphrodites. Elle décrit l'entrée en scène des Esprits Lucifer, et mentionne le Sentier de la régénération sur lequel on progresse dirigé par Mercure. Si vous voulez évoquer devant votre regard intérieur la condition de l'homme au cours des différentes étapes de son développement, vous en retirerez un grand profit spirituel. Il est plus facile de s'imaginer et de ressentir ces changements lorsqu'on remonte dans le passé que si l'on médite sur l'avenir, car nous possédons, enfouis dans notre conscience, tous les sentiments que nous avons éprouvés pendant les époques anciennes de notre évolution et, avec une certaine pratique, on peut les évoquer à volonté.

Vous vous souvenez sans doute d'avoir lu dans la "Cosmogonie", au sujet de la méthode pour parvenir à l'initiation, que, un jour, arrivé à ce point, il devient nécessaire de revenir en arrière le long du chemin parcouru, en ressentant et en voyant consciemment ce qu'on a éprouvé inconsciemment à l'époque. Ainsi l'exercice ci-dessus représente une préparation à cette sorte de rétrospective. Mieux vous saurez vous voir dans l'état d'esprit indiqué, en ressentant profondément les conditions par lesquelles vous passiez et en étant conscients de l'influence protectrice et tutélaire des Hiérarchies divines qui nous ont aidés sur le sentier de l'évolution, mieux vous serez préparés pour le jour où vous passerez par ces expériences au cours du processus initiatique.

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On peut d'ailleurs affirmer que vous retirerez, de cette initiation, un profit bien plus grand que si vous n'y êtes pas préparés.

Vous découvrirez que cette façon de ressentir les leçons vous apporte une aide très très grande pour votre progrès spirituel et, si vous savez vous y prendre de la manière indiquée, elle "illuminera" vos leçons et vous donnera une pénétration spirituelle impossible à atteindre de toute autre façon. J'espère donc sincèrement que vous allez prendre à coeur ces conseils et vous décider à pratiquer régulièrement cet exercice, même avec des leçons qui, à première vue, vous paraîtraient ennuyeuses et peu intéressantes. Il vous permettra d'en extraire, cachées sous la surface, des perles dont vous n'auriez jamais rêvé.

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LETTRE NO 79 - Juin 1917 - LES SACRIFICES, FACTEURS DE PROGRES SPIRITUEL

De temps à autre, nous recevons au Siège des lettres dans lesquelles on nous demande, d'une manière ou d'une autre: "Comment pourrais-je faire davantage de progrès spirituels?" J'ai donc pensé qu'il serait utile de consacrer la présente lettre à cette question.

Il est une loi de la nature selon laquelle "de rien, rien ne sort", mais cela n'empêche pas qu'un grand nombre de personnes entretiennent l'illusion que les vérités et les progrès spirituels peuvent être obtenus sans argent et sans y mettre le prix. En un sens ceci est vrai, car on devrait absolument se garder de trafiquer des pouvoirs spirituels contre de l'argent. C'est un acte abominable, ainsi que Pierre l'a démontré par son énergique refus de l'argent que Simon le sorcier lui offrait en échange de tels pouvoirs. Néanmoins, la croissance spirituelle doit être payée, en un certain sens, par ceux qui désirent l'obtenir, et la première chose à faire, pour cela, est de sacrifier ses anciens intérêts. Nous connaissons tous la parabole des invités au festin, qui se sont récusés pour différentes raisons. L'un venait de prendre femme, un autre avait acheté des boeufs et désirait les inspecter; et ainsi de suite, si bien qu'ils avaient tous négligé de saisir l'occasion de faire des progrès (Luc 14:15-24).

La même proposition nous est présentée aujourd'hui sous une apparence différente. Il se peut que nous voulions bien, pendant nos heures de loisir, lire quelques pages d'un livre traitant de sujets spirituels à condition de

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n'avoir rien qui nous intéresse davantage, mais lorsque le Grand Oeuvre requiert un peu de notre temps, nous avons des excuses variées: "J'ai une fille à laquelle je veux faire faire des études, dit l'un; lorsqu'elle les aura terminées, et que je n'aurais plus d'obligations de ce côté, je m'y mettrai sérieusement." Un autre nous écrit: "Mes affaires nécessitent continuellement ma présence et, le soir, je suis fatigué. Je ne puis pas travailler le soir pour le Fellowship ou assister à ses réunions, car je ne serais pas en mesure, le jour suivant, de consacrer toute mon énergie à mon travail, mais dès que j'aurai pris ma retraite, je m'y appliquerai." Une autre: "J'ai plusieurs filles qui requièrent mon attention et que je dois accompagner à diverses réceptions, etc. Je ne puis assister à vos réunions, mais dès que mes enfants seront mariés, je m'intéresserai activement à votre cause."

Il est parfaitement exact que, lorsque nous avons à assumer des obligations, il faut nous en acquitter de notre mieux, mais il est tout de même possible qu'en réfléchissant bien à la question, nous trouvions qu'il nous reste encore certains moments à consacrer à notre Grand Oeuvre. A ce sujet, il est bon de se souvenir du récit des personnes venant vers le Christ pour lui dire: "Ta mère et tes frères sont dehors et désirent te parler", et la réponse: "Qui est ma mère? qui sont mes frères?...Quiconque accomplira la volonté de mon Père Céleste est mon frère, ma soeur et ma mère" (Matthieu 12:46-50; Luc 8:20-21). Il a aussi dit: "Si quelqu'un vient à moi et ne hait pas son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et soeurs, et même sa propre vie, il ne peut être mon disciple...Et quiconque aura renoncé à des maisons, à des frères, soeurs, père, mère, épouse, enfants ou terres en mon nom, en recevra le centuple et héritera de la vie éternelle (Matthieu 19:29; Marc 10:29-30).

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Il y a, et il doit y avoir un sacrifice accompagnant la vie régénérée, et j'ai pu observer, non seulement par expérience personnelle, mais encore sur une quantité d'autres personnes, que les progrès spirituels sont en directe proportion des pensées, du temps et de l'argent consacrés à la cause que l'on épouse. Lorsque l'on consacre son être tout entier à la vie régénérée, en se laissant guider par l'esprit, on verra bientôt que l'intensité du zèle nouvellement orienté tend à exclure les anciens objectifs. On cesse d'avoir le temps pour eux; la pensée ne se fixe plus sur eux et ils tombent d'eux-mêmes dans l'oubli. D'une manière ou d'une autre, la fille termine ses études ou trouve un emploi qui en tient lieu; les affaires prospèrent même mieux que quand le patron y consacrait tout son temps et que son énergie se dépensait en soucis et tentatives de gagner de l'argent. Les enfants trouvent un autre chaperon tout aussi capable que leur mère pour les jours où elle travaille en faveur d'une cause spirituelle. Dans chaque cas, ce à quoi nous renonçons pour la Cause - le temps que nous dépensons au service du Christ, l'argent que nous dépensons judicieusement à cet effet - la loi qui agit pour le bien y pourvoira et nous en assurera la compensation.

Comme le dit le Psalmiste: "J'ai été jeune et maintenant je suis vieux, mais je n'ai pas vu le juste être abandonné, ni ses enfants mendier." La loi énoncée par le Christ: "Cherchez premièrement le Royaume de Dieu et sa justice, et toutes ces choses vous seront données par surcroît" est aussi valable aujourd'hui qu'au jour où cette parole a été prononcée. Je l'ai vérifié par expérience personnelle (Matthieu 6:33); et quiconque "vit la vie" et se consacre au travail trouvera que cette loi s'applique aussi à lui-même. La croissance ne s'obtient que par le service.

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LETTRE NO 80 - Juillet 1917
ADAPTER LES ENSEIGNEMENTS A LA COMPRÉHENSION DE CHACUN

Dans une lettre récemment reçue de Seattle, nous avons trouvé une bonne suggestion, dont vous aimeriez peut-être faire votre profit. Voici ce qu'écrit notre amie: "L'autre jour, je suis allée à la bibliothèque de Ballard et j'ai demandé la "Cosmogonie". Au moment de partir, je l'ai déposée sur le bureau de la bibliothécaire, ouverte à la page des valeurs et calories des aliments. Je lui ai montré cette table, en lui faisant remarquer combien elle était utile. L'examinant, elle m'a dit avec surprise: "Cela fait plusieurs fois qu'on me demande précisément une table de ce genre." J'ai alors pensé que, si d'autres étudiants demandent la "Cosmogonie" dans une bibliothèque, ils pourraient faire comme moi. La bibliothécaire établirait alors une fiche de renvoi signalant que ce livre contient des conseils pour la santé et l'alimentation et, de cette manière, il pourrait tomber dans les mains de personnes à la recherche de la Lumière qu'il renferme."

Ce que dit notre amie est plus vrai qu'on ne le croit, car les façons, les moyens et les endroits par lesquels la Lumière nous atteint tiennent parfois du miracle. Non seulement elle atteint ceux qui nient l'existence de la Lumière au sens spirituel et qui traitent de fumistes ceux qui s'en inspirent.

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J'ai souvent reçu courage et inspiration à la pensée du voyage à Damas de Paul, un homme qui se glorifiait de l'ardeur avec laquelle il persécutait les saints. Personne n'était plus zélé que lui pour écraser ce qu'il croyait être une hérésie condamnable. Mais, qu'elles travaillent pour le bien ou pour le mal, les âmes fortes sont aimées des dieux, parce que l'énergie indomptable et irrésistible qui les pousse à l'action, même si elle est temporairement utilisées à des fins répréhensibles, sera tout aussi forte une fois qu'elle aura été réorientée vers le bien. Ainsi, Paul était un vrai favori des dieux, et c'est pour cela qu'il a reçu une lumière assez puissante pour l'aveugler au moment où il s'y attendait le moins, c'est-à-dire sur le chemin de Damas. C'est à ce moment et à cet endroit qu'il a reçu une compréhension et une connaissance bien supérieures à celles des autres apôtres. Il avait été choisi pour une mission particulière et il avait reçu le don très spécial de vue spirituelle, avec la capacité d'être tout à tous.

Il n'est pas rare que nos étudiants se plaignent de ne pouvoir faire comprendre les enseignements rosicruciens à leur entourage ou à leurs proches. L'autre jour, en regardant notre coffre à outils, il m'est venu une idée à ce sujet. Il s'y trouvait un grand nombre de clefs à écrous, des plus petites aux plus grandes, chacune faite pour tourner une seule sorte d'écrou; il y en avait aussi d'autres, réglables dans certaines limites. Je me suis rendu compte que, parfois, une petite clef pouvait être bien plus utile qu'une de grandes dimensions, car tout dépend du calibre de l'écrou. Il en va de même pour les êtres humains: il nous faut prendre leur mesure et voir ce dont ils ont besoin. Beaucoup d'entre nous ont très sérieusement étudié les enseignements mystiques et ont une connaissance approfondie de ces sujets. Nous ressemblons à des clefs de grand calibre, mais nous sommes absolument

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inutilisables pour faire tourner les petits écrous qui n'ont jamais été touchés par cette connaissance. Dans de tels cas, n'essayons pas de faire étalage de nos profondes connaissances et de parler "par-dessus les têtes" de ceux qui nous écoutent, mais mettons-nous à leur niveau, en leur expliquant les choses aussi simplement qu'il a fallu le faire pour nous lors de nos débuts.

En d'autres termes, nous devons être "réglables", comme certaines des clefs de notre coffre à outils. En parlant à une audience inconnue, il nous faut descendre à son niveau et employer le langage le plus simple possible. Une autre fois, donnant un cours à des étudiants plus anciens, capables de saisir des problèmes bien plus profonds, nous pourrons, pour notre plus grand profit et celui de nos auditeurs, donner toute notre mesure. Mais avant tout, il nous faut apprendre, avec Paul, à être tout à tous, faute de quoi nous agirons à l'encontre de notre but, qui est d'apporter la lumière aux âmes qui y aspirent.

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LETTRE NO 81 - Août 1917
LE PROFIT QU'ON PEUT RETIRER D'ANCIENNES LEÇONS

Dans une lettre d'un étudiant de nos enseignements, j'ai trouvé une utile suggestion, dont je crois devoir vous fait part.

"Hier soir, en revoyant un gros dossier de correspondance que j'ai eu le privilège de recevoir du Rosicrucian Fellowship pendant près de cinq ans, je me suis demandé ce que d'autres candidats et étudiants faisaient de leurs plis mensuels, et je me suis dit que cela pourrait faire le sujet d'une de vos lettres. Mon désir n'est pas de critiquer ce que d'autres font, mais il est probable que peu d'étudiants se rendent vraiment compte de la mine de renseignements représentée par cette correspondance. Elle peut être mise à profit par sa transformation en action juste, dont on sait qu'elle tend à accumuler des trésors dans le ciel. Combien de fois, relisant d'anciennes lettres ou leçons, n'ai-je pas vu se présenter à mon esprit de nouvelles idées, avec la compréhension de vérités dont je n'étais pas conscient auparavant - et quelle aide ne m'ont pas apporté ces écrits dans maint combat intérieur!

On peut vraiment dire que ces anciennes leçons représentent une mine d'or dans laquelle de véritables trésors peuvent être mis au jour pour nous aider à "vivre la vie". En vérité, elles sont comme une deuxième "Cosmogonie"; et il

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vaut la peine de les classer soigneusement pour pouvoir en faire le plus grand usage possible dans notre travail de diffusion. Il se peut qu'un de ces écrits contienne exactement ce qu'il faut pour aider telle ou telle personne, aussi est-il bon de pouvoir les retrouver sans difficulté.

Il me semble difficilement possible que la plupart des étudiants et candidats puissent se rendre pleinement compte du pouvoir de ces leçons pour le bien de ceux qui nous entourent. Pour ceux d'entre vous qui ont l'habitude de données précises et de méthodes modernes de recherche, ces anciennes leçons seront d'un grand secours dans le travail d'union de la tête et du coeur, car elles contiennent de précieuses perles de savoir qui peuvent nous conduire à l'action juste et à la persévérance dans le bien. Si chacun de nous voulait penser au meilleur usage qui pourrait être fait de ces plis, quelle aide et quelle croissance spirituelle n'en serait pas le résultat! Ce sont sûrement les petites choses qui permettent d'en faire de grandes; et ces lignes pourraient peut-être inciter certains à servir davantage."

Si nos étudiants veulent bien se rappeler que la répétition est la caractéristique de corps vital et que "tout développement occulte commence par le corps vital", ils comprendront à quel point il peut être profitable de relire souvent les anciennes lettres et leçons.

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LETTRE NO 82 - Septembre 1917 - UN ORGANE INSOUMIS QUI DOIT ETRE DOMPTÉ

Comme vous le savez sans doute, nous avons ici, matin et soir, à Mount Ecclesia, un bref service comportant la lecture d'un extrait de la Bible. Lorsque vient le tour de Mrs Heindel ou de moi-même, nous aimons lire de temps en temps le troisième chapitre de l'Epître de Jacques, à cause de l'importante leçon qui s'y trouve. J'ai cru bon d'attirer votre attention sur ce texte, un incident ayant récemment servi à graver profondément cette leçon dans ma conscience, et je crois que nous pourrons tous en faire notre profit. Commençons par quelques extraits de ce chapitre, après quoi je vous raconterai cet incident.

"Si quelqu'un ne bronche point en paroles, c'est un homme parfait, capable de tenir tout son corps en bride. Nous mettons, comme vous le savez, des mors dans la bouche des chevaux pour qu'ils nous obéissent, et nous dirigeons ainsi leur corps tout entier. Voyez aussi les navires, qui sont si grands et que poussent des vents impétueux; ils sont dirigés par un très petit gouvernail, au gré du pilote. De même la langue est un petit membre, et se vante de grandes choses. Voyez comme un petit feu peut embraser une grande forêt! Et la langue est aussi un feu, un monde d'iniquité. La langue est placée parmi nos membres, souillant tout le corps et embrasant le cours de la nature, étant elle-même enflammée par l'enfer.

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Toutes les espèces de bêtes et d'oiseaux, de reptiles et d'animaux marins sont domptés par la nature et l'ont été par l'homme, mais la langue, aucun homme ne peut la dompter; c'est un mal qu'on ne peut réprimer; elle est pleine d'un venin mortel. Par elle, nous bénissons Dieu notre Père, et par elle nous maudissons les hommes faits à l'image de Dieu. Il ne faut pas, mes frères, qu'il en soit ainsi (Jacques 3:2-10). Car là où il y a la jalousie et un esprit de dispute, il y a du désordre et toutes sortes de mauvaises actions. Mais la sagesse d'en haut est premièrement pure, ensuite pacifique, modérée, conciliante, pleine de miséricorde et de bons fruits. Le fruit de la droiture est semé dans la paix par ceux qui recherchent la paix" (Jacques 3:16-18).

A Mount Ecclesia, nous avons plusieurs essaims d'abeilles et, un jour, les jardiniers ont essayé d'en déplacer un. Rendues furieuses par cette intervention, elles ont vivement réagi en piquant douloureusement leurs "agresseurs". En prenant connaissance de cet incident, il m'est venu à l'idée qu'il y avait là une très importante leçon, car lorsque l'abeille pique, elle perd son dard, et ensuite elle meurt. Imaginez cela! cette rigueur de la loi qui fait automatiquement mourir l'abeille lorsqu'elle nuit à un autre être! Ce n'est pas un Dieu vengeur, notez-le bien qui entraîne ce châtiment, mais l'acte lui-même. Songez-y!

Si nous mourions après avoir piqué autrui avec des paroles blessantes, qui d'entre nous serait encore en vie? Cependant, dans le cas où nous saurions qu'il nous faudrait mourir après avoir "piqué", ne tiendrions-nous pas notre langue en bride, pour notre plus grand bien et celui de tous nos interlocuteurs? Ne s'agit-il pas là d'un exemple que nous devrions prendre à coeur et auquel nous devrions réfléchir fréquemment, jusqu'au moment où nous aurons appris à serrer les dents et à garder bouche close chaque fois que nous

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serons tentés de proférer des paroles désobligeantes? En ne faisant que cela, le moment viendra peu à peu où nous cesserons d'avoir des sentiments peu aimables à l'égard des autres, quelle que soit leur conduite envers nous (Romains 12:17-19, 21).

Je puis vous assurer que, dans le cas de Mrs Heindel et de moi-même, et tout spécialement depuis notre venue ici, ce chapitre nous a, plus que tout autre, aidés spirituellement. Il nous a aidés davantage que toutes les autres lectures prises ensemble, bien qu'évidemment nous soyons très très loin de la perfection. Mais ce que nous avons fait, et ce que d'autres ont fait ici en même temps que nous, suffit amplement pour recommander sérieusement ce chapitre à votre attention - peut-être en relation avec la petite histoire des abeilles - car il sera tout aussi efficace pour vous, si vous le lisez et le prenez bien à coeur une fois ou deux par semaine.

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LETTRE NO 83 - Octobre 1917 - UN TRIBUNAL INTÉRIEUR DE LA VÉRITÉ

La semaine dernière, une personne visitant Mount Ecclesia m'a dit avoir étudié pendant une vingtaine d'années toutes les philosophies possibles, avant d'avoir, depuis deux ou trois ans, commencé l'étude des enseignements rosicruciens, qui l'avaient séduite comme étant la vérité absolue. Elle s'attendait évidemment à me voir partager ce sentiment, aussi fut-elle stupéfaite en m'entendant répondre que je ne considérais pas sous ce jour-là les enseignements reçus des Frères Aînés et consignés dans nos livres.

Pour les primitifs, pour autant qu'ils soient capables de développer des sentiments religieux, le fait qu'il existe un être divin d'une nature supérieure à celle des humains doit apparaître comme une grande vérité. A partir de ces peuples et de leurs conceptions religieuses, nous pouvons observer toute une gradation jusqu'aux philosophies transcendentales qui font naître des sentiments de révérence chez les plus hautement développés des êtres humains; et nous en pouvons conclure que l'évolution de l'homme exige aussi une évolution de sa religion. Nous avons, à partir des vallées de l'ignorance enfantine, gravi jusqu'au point où nous nous trouvons actuellement; et croire que n'importe quelle conception religieuse de notre époque soit l'ultime vérité serait absolument contraire à la loi d'analogie:

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s'il ne peut plus y avoir de progrès religieux, il ne saurait non plus y avoir de progrès humain.

Quel est donc le chemin conduisant aux réalisations religieuses les plus élevées, et comment peut-on le trouver? - telle semble être, en toute logique, la question suivante. La réponse est qu'on ne le trouve dans aucun livre, et pas davantage dans les nôtres que dans ceux de quiconque. Les livres ne sont utiles que dans la mesure où ils fournissent un aliment à nos pensées sur les sujets traités. Nous pouvons arriver, ou ne pas arriver, aux mêmes conclusions que l'auteur des livres, mais aussi longtemps que nous en présentons les idées à notre être intérieur et que nous travaillons sur elles avec attention et dans un esprit de prières, toutes les idées qui nous viendront de cet examen seront bien à nous, et plus proches de la vérité que ce que nous pourrions recevoir de quiconque ou de quelque autre manière.

Le for intérieur est donc le meilleur tribunal de la vérité. Si nous soumettons, systématiquement et avec persévérance, nos problèmes à ce tribunal, nous développerons peu à peu un sens supérieur de la vérité qui nous fera savoir instinctivement, lorsque nous entendons avancer une opinion, si elle est juste et vraie. Dans plusieurs de ses passages, la Bible nous exhorte à nous garder de toutes sortes de doctrines qui circulent, car beaucoup d'entre elles sont dangereuses et ne font que troubler les esprits. Il existe beaucoup de livres qui promulguent un système ou un autre de philosophie et, à moins d'avoir établi, ou commencé à établir, ce tribunal intérieur de la vérité, nous pourrons ressembler à la dame mentionnée plus haut, errant d'une place à une autre - mentalement parlant - pendant notre vie entière, sans trouver le repos, n'en sachant guère davantage à la fin qu'au commencement, et peut-être même moins.

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Mon conseil aux étudiants sera donc de ne jamais accepter, rejeter ou suivre aveuglément une autorité quelconque, mais de s'efforcer d'instituer ce tribunal intérieur de la vérité. Soumettez toutes questions à ce tribunal, en éprouvant toutes choses et en retenant fermement ce qui est bon.

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LETTRE NO 84 - Novembre 1917 - L'ÉPIGÉNESE ET LA LOI DE CAUSE A EFFET

De temps en temps, il devient nécessaire de corriger l'une ou l'autre d'entre les idées fausses que se font nos étudiants; et l'une des plus fréquentes est que tout ce qui nous arrive est le résultat d'une certaine cause ou action de notre part dans le passé, le plus souvent au cours d'une vie antérieure. En théorie, nos étudiants savent très bien que ce n'est pas le cas; ils savent qu'à côté de la destinée, provenant d'existences antérieures, à liquider au cours de leur vie présente, ils créent chaque jour, par leurs actions, de nouvelles causes. Une partie considérable des actions commises en cet vie aura exercé ses effets avant que la mort ait mis fin à leur séjour terrestre, alors que ce qui n'aura pu être liquidé formera la base de la destinée d'une future existence, où ils pourront récolter ce qu'ils auront semé. La destinée provenant des existences antérieures est montrée par notre thème astrologique et nous confère certaines caractéristiques, certaines tendances ou lignes de moindre résistance. On ne peut non plus nier que cette destinée ancienne nous donne une sorte de parti-pris qui nous entraîne à agir de telle ou telle manière. Néanmoins, nous jouissons d'une marge assez étendue de libre arbitre

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pour la plupart de nos actions, ce qui nous laisse une latitude suffisante pour l'exercice de l'Epigénèse, cette divine activité créatrice qui est à la base de l'évolution.

Comme déjà dit, nos étudiants savent parfaitement tout cela, du moins en théorie, mais dans les problèmes pratiques de la vie quotidienne, il semble qu'ils persistent à adopter une attitude différente, selon laquelle tout ce qui leur arrive est un développement à partir de quelque chose d'antérieur, et ceci est surtout le cas pour ceux qui ont étudié les religions orientales avant d'adopter les enseignements de la Sagesse Occidentale. Par cette attitude mentale, qui ne tient pas compte de l'Epigénèse, ils retardent bien davantage leur croissance spirituelle qu'ils ne se l'imaginent. En fait, il leur arrive quelque chose de comparable au sort qui est le lot du matérialiste lorsque, après la mort, il se trouve à la limite entre le Purgatoire et le Premier Ciel, dans une terrible atmosphère de monotonie. Cette région limitrophe est, peut-on dire, une sorte de remous à l'écart du fleuve de la vie, où le progrès se trouve arrêté. Si le matérialiste s'y trouve, c'est en raison du fait qu'en niant l'existence d'après-vie, il s'est placé en dehors des courants spirituels qui produisent le mouvement et l'action au cours de son passage par le Monde du Désir.

Il en ira de même pour nous si nous faisons constamment ressortir l'importance de la loi de cause à effet, en négligeant systématiquement et constamment celle d'Epigénèse, ce qui nous place en dehors de son champ d'action. Nos occasions d'exercer notre initiative en y recourant sont le plus souvent perdues, ce qui nous rend de plus en plus "stériles" à mesure que passent les

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années. Si, par contre, en considérant les problèmes de la vie tels qu'ils se révèlent dans les actes d'autrui aussi bien que dans les nôtres, nous cherchons à découvrir le principe de l'épigénèse et à étudier son action, nous trouverons qu'il se présente, à un degré surprenant, des occasions d'agir avec initiative. En observant comment agit la loi de l'Epigénèse chez les autres, nous apprendrons à l'appliquer à notre propre vie.

J'espère que vous allez méditer souvent sur cette pensée et que vous retirerez le plus grand bien d'une application persévérante de ce principe.

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LETTRE NO 85 - Décembre 1917 - LES DOULEURS D'AUJOURD'HUI ET LA PAIX A VENIR

D'un lointain passé nous vient la voix d'Esaïe, l'un des plus grands prophètes et celui qui sait le mieux parler à l'âme:

"Car un enfant nous est né, le Fils nous est donné et la domination reposera sur ses épaules. On l'appellera l'Admirable, Conseiller, Dieu puissant, Père Eternel, Prince de la Paix. Il n'y aura pas de fin à l'accroissement de son empire et à la prospérité du trône de David et de son royaume, pour l'affermir et le soutenir avec droiture et justice, dès maintenant et à jamais." (Esaïe 9:5-6)

Le chant du choeur des Anges au-dessus des collines de Galilée, lui aussi, parle à l'âme d'un idéal sublime:

"Paix sur la Terre,

Bonne volonté envers tous les hommes." (Luc 2:14)

Mais à regarder en face ce qui se produit aujourd'hui dans le monde, ces paroles semblent presque une dérision et, du point de vue de l'homme moyen, toutes les platitudes offertes par les gens religieux ne sauraient rendre moins odieuse la situation dans les soi-disant "pays chrétiens".

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Cependant, lorsque nous considérons le problème de plus haut, dans une perspective cosmique, il n'en va pas de même. Comme le dit si bien Goethe:

"Qui n'a jamais mangé son pain dans la tristesse, Qui n'a jamais passé les heures de la nuit A pleurer dans l'attente du matin, Ne vous connaît pas, ô pouvoirs célestes!"

Il en va des peuples comme des individus: la peine et la souffrance semblent malheureusement être les seuls éducateurs qu'ils veuillent écouter, et ceci explique la nécessité de ces sévères leçons. En considérant la vie sous l'aspect de l'éternité, nous ne sommes pas épouvantés par la prétendue "perte de vies" de la présente guerre. Ceux qui ont été tués renaîtront, et leurs expériences les auront rendus meilleurs. La paix et la bonne volonté viendront certainement à leur heure, une fois que nous aurons appris à détester la guerre, aussi pouvons-nous à bon droit nous réjouir de cette perspective et prier avec ardeur pour sa réalisation. J'aimerais engager instamment les étudiants du Rosicrucian Fellowship à s'unir à nous en cette prière dans la Nuit Sainte, à minuit, lorsque le service habituel sera célébré dans la chapelle Pro-Ecclesia par les collaborateurs de Mount Ecclesia.

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LETTRE NO 86- Janvier 1916 - DIEU, SOURCE ET BUT DE L'EXISTENCE

Nous voici de nouveau au seuil d'une nouvelle année, en une période où les gens ont coutume de donner corps à leurs aspirations sous forme de résolutions. Comme ceux qui étudient les enseignements rosicruciens devraient être particulièrement intéressés par la question de la croissance spirituelle, j'ai pensé que les réflexions suivantes pourraient être utiles à ce moment.

Dans l'esprit de beaucoup de personnes, le mot de "sainteté" est devenu évocateur d'une longue figure et d'une attitude hypocrite, si bien qu'on se méfie beaucoup de ceux qui font profession de sainteté. Le vrai saint n'est pas un rabat-joie, il n'est pas négligent en affaires; il accomplit pleinement ses devoirs professionnels et familiaux, mettant son coeur dans tout ce qu'il fait; il donne l'exemple de la loyauté et il est respecté de tous ceux qui le connaissent, car ses actions parlent plus haut que des mots et méritent l'éloge. Dans ses transactions, il prend bien soin de ne rien devoir, sauf d'aimer. Toujours empressé à aider les autres, il est vraiment l'homme modèle en ce qui concerne ses actions à l'égard d'autrui.

Néanmoins, une telle vie publique de rectitude n'est pas, en elle-même, un indice certain de sainteté.

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Il y a, dans le monde, une quantité de personnes admirables qui, pour des raisons morales, vivent de façon modèle et se comportent d'une manière qui leur vaut le respect de tous ceux qui les connaissent. Elles sont aussi charitables et actives, selon leur situation sociale, dans toutes les bonnes oeuvres, mais nous avons déjà vu que ce n'est pas la pierre de touche. La différence entre une personne modèle et un saint se révèle dans les heures de loisir, une fois que les devoirs du moment ont été accomplis, car c'est là que bifurquent les voies des gens du monde et des saints. A ce moment, ce sont les activités récréatives, l'amusement et les plaisirs qui permettent à l'homme du monde de dépenser son énergie, ou alors il se consacrera à quelque passe-temps, selon ses goûts et ses moyens: jeux, sports, chasse et pêche, ou bien musique théâtre, soirées, ou toute autre manière agréable de passer leur temps.

Mais le saint ressemble à la boussole temporairement influencée par un aimant et empêchée de pointer vers le pôle. Une fois que le coeur a été touché par la force d'attraction de l'amour de Dieu, le devoir quotidien pourra et devra dévier l'aiguille vers les affaires qui, légitimement, requièrent son attention. Non seulement le saint ne se dérobe pas à son devoir quotidien, mais encore il le remplit mieux et plus consciencieusement qu'avant de s'être consacré à Dieu. Toutefois, dans le même temps, il éprouve un désir subconscient de communion renouvelée de son esprit avec le Père, tout comme l'aiguille aimantée, déviée de son orientation vers le nord, subit une sorte d'influence tendant à la ramener vers son pôle d'attraction. Dès que les devoirs ont été pleinement remplis et que cesse la pression des choses de ce monde, les pensées du saint se tournent automatiquement vers les choses divines. Un trajet en train ou en autobus pour nous rendre au travail ou en

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revenir peut fournir l'occasion de méditer; il en va de même du temps passé à attendre quelqu'un. Bref, chaque fois que le saint dispose, au cours de son activité dans le monde, d'un moment bien à lui, ses pensées se tournent instantanément vers sa source et son objectif - Dieu.

On raconte que des personnes ont fait des études de droit pendant leurs parcours quotidiens dans les transports en commun; d'autres ont appris des langues étrangères en utilisant les moments creux que la plupart des personnes gaspillent en pensées oiseuses, vagabondes et sans but. Inspirons-nous de leur exemple et, au cours de l'année qui commence, habituons-nous à penser à Dieu dans chacun des petits moments quotidiens qui s'y prêtent. En persévérant fidèlement dans cette habitude, nous ferons une grande avance sur le sentier de la croissance de l'âme.

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LETTRE NO 87 - Février 1918 - LA NÉCESSITÉ DE FAIRE USAGE DE NOS TALENTS

Le Christ nous exhorte à faire luire notre lumière et, dans la parabole des talents, il a souligné que: "à celui à qui il a été beaucoup donné, il sera beaucoup redemandé" (Matthieu 25:14-30), laissant entendre que quiconque a reçu le moindre talent, si petit soit-il, devrait le faire fructifier. Il faudrait, comme le conseille l'Ecclésiaste (11:1), jeter son pain sur la face des eaux, car avec le temps on le retrouvera avec usure. Nous avons maintenant reçu les précieux enseignements rosicruciens et, au cours de cette année, il nous faudrait faire usage de cette connaissance pour venir en aide à ceux qui, autour de nous, n'ayant pas encore trouvé la solution du problème de la vie, sont à la recherche de la lumière.

Nous avons raison de ne pas aimer les vaniteux qui se font une idée exagérée de leurs talents et qui, avec leurs discours malvenus, ennuient les autres à mourir, mais les étudiants du Rosicrucian Fellowship semblent atteints du mal et du tempérament opposés, ce qui est tout aussi mauvais. Se dénigrer soi- même, être timide et manquer de confiance en soi tend à paralyser les capacités et les talents, qui finissent par s'atrophier comme les yeux des animaux qui ont quitté la lumière du soleil pour vivre dans des cavernes, ou comme le fait la main du fakir qui, restée inactive pendant des années, perd

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sa capacité de se mouvoir. A défaut d'être utilisés, nos talents s'atrophient, et nous serons rendus responsables d'avoir thésaurisé la connaissance et de ne pas l'avoir partagée avec ceux qui la cherchaient. Nous serons jugés comme le serviteur de la parabole, qui avait caché son talent au lieu de travailler à le faire fructifier.

Nous avons toujours soutenu qu'il ne faudrait pas forcer l'attention d'autrui sur des questions de croyance, mais chaque année nous offre des milliers d'occasions de placer un mot choisi tout exprès pour provoquer une demande d'information sur notre philosophie. Il est parfaitement légitime de poursuivre le débat aussi longtemps que notre interlocuteur se montre intéressé. Paul exhortait ses fidèles à avoir pour chaussure "la préparation de l'Evangile"; or, si nous suivons ce conseil en nous préparant à répondre intelligemment aux questions qu'on nous pose, nous verrons les gens s'intéresser à ce que nous avons à dire.

En raison de la guerre qui continue à sévir, les gens s'intéressent beaucoup à l'après-vie, mais si l'on veut être capable de répondre convenablement à leurs questions, il est nécessaire de mémoriser les notions de base des enseignements rosicruciens et d'avoir, comme on dit, ses arguments sur le bout de la langue. Un peu de connaissance est dangereux, dit-on, et c'est aussi vrai en matière de religion et de philosophie qu'ailleurs. Il faut en avoir suffisamment, et de la meilleure sorte, pour que cela vaille la peine de se lancer dans ce genre de propagande, mais ce n'est pas difficile. Alors que certains étudiants des enseignements rosicruciens peuvent s'instruire en approfondissant les mystères des périodes et évolutions, des époques et des races, des jours et des nuits cosmiques, etc., tout ce qui est nécessaire pour

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aider l'homme moyen est une profonde connaissance des lois de cause à effet et de renaissance, telles qu'elles sont exposées dans notre littérature. Ce sont là les principes fondamentaux qui l'intéressent le plus; c'est l'essence même des enseignements rosicruciens. Si vous pouvez en faire part à un désespéré, soit qu'il ait perdu un de ses proches qui lui était cher, soit que le monde lui semble détraqué au point qu'il ne puisse trouver sa place, ne voyant pas le moyen de sortir de la coque de misanthropie dans laquelle il se réfugie, il se peut que vous l'aidiez à résoudre ses problèmes d'une manière logique et raisonnable en lui montrant comment la loi de renaissance, en collaboration avec celle de cause à effet, oeuvre constamment pour le bien de l'humanité, et comment il peut améliorer son sort en travaillant en harmonie avec ces deux grandes lois. Vous lui aurez ainsi rendu un service éminent, tout en retirant un considérable profit spirituel de votre aide.

J'aimerais aussi vous suggérer de créer, dans les différents groupes d'études, des classes où serait étudié le fonctionnement de ces deux grandes lois, afin que nos étudiants puissent se rendre aptes à rendre d'importants services à leur entourage en aidant les gens à résoudre ces problèmes de leur vie qui leur semblent tellement déconcertants.

Je compte bien que vous pourrez bénéficier de cette suggestion au cours de la présente année.

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LETTRE NO 88 - Mars 1918 - TOUT TRAVAIL EST NOBLE

Une correspondante, enthousiasmée par la beauté et la grandeur des enseignements rosicruciens et par la satisfaction qu'ils apportent à l'âme humaine, déplore le sort qui l'attache à son fourneau de cuisine, à ses casseroles, sans parler des soins aux enfants et des corvées de ménage. Ah! si seulement elle était libre de s'occuper de cet évangile nouvellement découvert, combien serait-elle heureuse de parcourir le vaste monde avec la bonne nouvelle dont elle sait que des milliers la cherchent et prient pour la trouver!

Ce serait très bien pour notre amie et pour ces milliers de personnes, mais que deviendraient les petits enfants s'ils étaient privés des soins de leur mère? N'oublions pas un point très important de la parabole des vignerons ( Matthieu 20:1-16), à savoir que tous ceux qui furent engagés pour travailler dans la vigne du Maître étaient inoccupés, sur la place du marché. Ils n'avaient pas de devoirs les empêchant de consacrer tout leur temps à leur travail; et celui qui ne s'est pas libéré de ses autres obligations ne peut, du jours au lendemain, s'en aller prêcher la bonne nouvelle et en faire le centre de sa vie. Mais si, tout en étant fidèles dans l'accomplissement de nos devoirs actuels, nous aspirons à nous engager dans une telle carrière, la voie nous sera ouverte un jour et nous appellera d'une manière légitime.

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Et que dire des "corvées" - n'employons-nous pas trop souvent de mot? L'instituteur parle de la corvée de faire entrer, année après année, les mêmes notions dans la tête des élèves; la mère parle des corvées du ménage, le père se plaint de la corvée du travail de bureau ou d'atelier, et ainsi de suite. Chacun pense que s'il était dans la peau d'un autre, la vie se transformerait aussitôt en une musique aussi merveilleuse qu'agréable. C'est là une illusion: "L'homme né de la femme...sa vie est courte et pleine de tribulations" (Job 14:1). Où qu'il se trouve placé, il n'existe qu'une manière de trouver le soulagement et de vaincre, c'est d'adopter une attitude mentale constructive.

Un grand moteur à essence, tournant à toute vitesse, peut être plus fort qu'une troupe d'hommes robustes cherchant à l'arrêter, mais il suffit d'un minuscule dépôt de suie sur la point d'une bougie, ou du dérèglement d'une petite came, pour en réduire rapidement l'énergie. Ainsi, un tout petit peu de suie, que nous traitons volontiers de "saleté", pourra, dans certaines conditions, accomplir davantage que plusieurs hommes. Gardons-nous donc bien de vanter étourdiment les uns et de mépriser les autres comme des cendrillons. Parmi les personnes qui ravaudent des bas, on ne trouve certes pas moins de nobles âmes qu'il ne s'en est trouvé pour honorer des fauteuils présidentiels, car tout dépend de la dose d'amour qu'on voue à son travail.

Mais ce qu'on veut souvent exprimer par "corvée", c'est bien plutôt la notion de monotonie. Tout travail comporte, à un degré plus ou moins grand, un élément de routine, et il est fréquent que l'accomplissement constant des mêmes besognes devienne monotone. Il y a cependant une très bonne raison pour que la phase actuelle de notre développement comprenne ce principe de routine.

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Nous sommes en effet en train de nous préparer pour l'Age du Verseau, qui approche rapidement, avec son grand développement intellectuel et spirituel, mais ce développement ne peut s'accomplir sans une stimulation du corps vital, qui est actuellement en sommeil. La caractéristique de ce véhicule est la répétition ; et la routine de notre travail quotidien lui apporte cet élément. Maudire cette répétition crée le sentiment de monotonie et retarde notre progrès, mais si, dans notre travail, l'amour joue le rôle de levain, nous ferons de grands progrès dans notre évolution et nous en serons récompensés par le contentement.

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LETTRE NO 89 - Avril 1918 - L'AGE DU VERSEAU ET LA NOUVELLE ALLIANCE

Après avoir rédigé la leçon ci-jointe (devenue le chapitre 14 des "Enseignements d'un Initié", tome 1) et en réfléchissant aux aspects multiples du message de Pâques, compte tenu de tous les évènements survenus en ces journées selon les récits bibliques, il m'est apparu que la Bible était bien loin d'être un livre ouvert pour ceux qui ne connaissent pas les enseignements de la Sagesse Occidentale et n'ont aucune idée de l'astrologie ésotérique. J'ai donc décidé de traiter, dans cette lettre, l'un des points qui se sont présentés à mon esprit.

Vous vous rappellerez sans doute que, selon l'Evangile de Luc (chapitre 22) le Christ avait envoyé Pierre et Jean en ville avec la mission de rencontrer un homme portant une cruche d'eau et d'entrer dans sa maison, car c'était là que la Pâque devait être célébrée. Plus tard, en cette place, nous dit-on, il a donné à ses apôtres le pain et l'eau qui constituaient la nouvelle alliance, en déclarant qu'il ne boirait plus du fruit de la vigne. C'est un passage qu'on comprend de travers, car, pour beaucoup, l'homme à la cruche n'a aucune signification, ni le fait que la Pâque devait être célébrée dans sa maison et nulle part ailleurs. On croit donc que le Christ a donné à ses disciples du vin, alors que la Bible laisse entendre exactement le contraire. En lisant ce

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récit tel qu'il est écrit et en l'examinant à la lumière des enseignements ésotériques, nous y trouverons une importante signification.

Rappelons-nous d'abord comment les guides de l'humanité avaient donné à chaque race une nourriture appropriée, ainsi que le précise la "Cosmogonie". Brièvement, le blé fut donné à Caïn, l'homme de la seconde race, qui était semblable à la plante et avait un corps vital. Pour Abel, l'homme de la troisième race, qui avait un corps du désir, ce fut le lait. Pour Nemrod, l'homme de la quatrième race, qui avait un intellect, il fallait de la viande. Le vin a été donné par Noé à l'homme de la cinquième race, ce qui a fait de lui un égoïste et un impie, si bien qu'on a désormais pu parler de l'inhumanité de l'homme pour l'homme - mais cela l'a aussi aidé à atteindre le nadir de l'évolution matérielle. Toutefois, c'est maintenant l'évolution spirituelle qui va commencer, et les idées altruistes doivent être cultivées, ou tout au moins arriver à l'état de germination, afin qu'elles puissent être exprimées par la sixième race, et ceci exige un nouveau changement de régime.

Au cours de ces étapes de l'évolution, le point vernal, celui où le Soleil croise l'équateur à l'équinoxe de printemps, a fait bien des fois le tour du zodiaque, mais chacune de ces époques a été inaugurée sous l'influence d'un signe différent; d'autre part, ces grands changements ont été précédés et suivis de cycles mineurs qui étaient des répliques des grands âges et époques. Ainsi, les derniers six à sept millénaires du passage du Soleil dans le Taureau, le Bélier et les Poissons, ce dernier étant un signe "liquide" et changeant, ont été des âges où le développement matériel était favorisé par la viande et le vin. Le Christ lui-même, au début de son ministère, a changé l'eau en vin, ratifiant ainsi la continuation de son usage pendant l'Age des

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Poissons. Mais à la fin de sa carrière terrestre, il a envoyé ses disciples préparer la Pâque dans la maison du porteur d'eau abolissant ainsi la viande et le vin, en donnant le pain et la coupe d'eau comme signe de la nouvelle alliance en vue du Royaume de Dieu, où il régnera en qualité de Prince de la Paix.

N'est-ce pas l'évidence même? Le Christ est l'Esprit solaire, et lorsque, par précession, le Soleil passera, à l'équinoxe de printemps, dans la constellation du porteur d'eau, ce changement marquera le début de l'Age du Verseau, dans lequel le régime non carné et non alcoolique de la nouvelle alliance sera en vogue, marquant le début d'une ère d'altruisme. Nous commençons déjà à ressentir cette bienfaisante influence, bien qu'elle soit encore éloignée de plusieurs siècles, et nous sommes ici pour aider à préparer cette époque future. Il nous appartient donc de nous fortifier physiquement, moralement, mentalement et spirituellement, afin d'être en exemple aux autres et de les guider ainsi vers la grande Lumière que nous avons eu la chance de percevoir. Rappelons-nous aussi que, plus nos connaissances seront étendues, plus grande sera aussi notre responsabilité dans l'usage judicieux que nous en ferons et, à moins de conformer nos vies à ces idéaux, nous mériterons une plus grande condamnation.

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LETTRE NO 90 - Mai 1918 - NOURRITURE CARNÉE ET PORT DE FOURRURES

Un de nos étudiants avoue que, quoiqu'il continue à manger modérément de la viande, il se sent parfois poussé à parler à d'autres des enseignements rosicruciens, mais qu'il a toujours le sentiment d'être un hypocrite lorsqu'il recommande le végétarisme. Il nous demande comment il pourrait surmonter cette habitude et s'il devrait, jusque-là, cesser d'enseigner les autres.

Sa demande présente un intérêt général, car même si les étudiants rosicruciens sont sincères et consciencieux, il n'en ont pas moins les mêmes défauts que tous les autres être humains, sinon ils ne seraient pas ici-bas. Une lettre sur ce sujet pourrait donc être utile à beaucoup d'entre eux.

Il est incontestable qu'on ne peut discuter efficacement de la spiritualité devant un cocktail, ni conseiller de vivre de manière à ne pas nuire, tout en dévorant un bifteck. En outre, ceux qui connaissent en même temps vos habitudes et vos professions de foi sont très prompts à noter leur contradiction, aussi est-il naturellement préférable de conformer sa vie aux enseignements avant d'essayer de convertir les autres. Néanmoins, traiter d'hypocrite celui qui recommande un idéal qu'il n'a pas atteint, c'est aller trop loin. Tant qu'on croit que le régime végétarien est meilleur et qu'on s'efforce de conformer sa vie à ses convictions, on peut légitimement le conseiller, même si l'on fait occasionnellement une entorse à la règle. Bien qu'il ne l'atteigne jamais, l'étoile polaire guide le marin jusqu'au port et,

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de même, si nous choisissons des idéaux d'une élévation rappelant celle des étoiles, nous pouvons ne pas y parvenir en cette vie, mais nous serons tout de même meilleurs parce que nous y aspirons.

En même temps, il semble qu'avec un peu de volonté, il ne devrait pas être tellement difficile pour quiconque de s'abstenir de tabac, de boissons alcooliques et de viande. Sûrement, la pensée des souffrances causées aux pauvres animaux dans les trains qui les mènent à l'abattoir, et l'agonie précédant l'instant où le coup fatal est administré, ou bien le moment où le couteau pénétrera dans leur gorge, devrait émouvoir toux ceux qui aspirent à une vie plus noble et les remplir de compassion pour ces pauvres créatures, incapables de se défendre. Pour des raisons similaires, ceux de nos membres appartenant au beau sexe devraient renoncer à s'orner de fourrures et de plumes. C'est tout aussi illogique de prêcher l'évangile de la vie inoffensive avec de pareils accoutrements, et cela ne manquerait pas de susciter des commentaires défavorables.

Malheureusement, la complexité de notre civilisation nous force à utiliser du cuir pour beaucoup d'objets, par exemple des chaussures et des courroies, faute d'autre matériel. Toutefois, nous devrions faire tout notre possible pour éviter d'employer ce qui provient d'un animal qu'il faut tuer pour cela. L'un des bienfaits de la présente guerre est de faire découvrir à l'homme que la viande n'est pas un aliment indispensable, et aussi qu'on se porte mieux sans alcool. Espérons que ce sera l'indice d'un revirement en ce domaine, et que l'homme cessera bientôt d'élever et de chasser des animaux pour leur viande ou leur fourrure. En attendant, tâchons tous de montrer l'exemple, et mettons toute notre volonté dans cet effort.

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LETTRE NO 91 - Juin 1918 - TOLÉRANCE POUR LES OPINIONS D'AUTRUI

Nous sommes venus sur terre pour vivre dans les conditions que nous y trouvons et pour apprendre les leçons que nous enseigne notre entourage. Ceux qui prennent constamment leur essor vers les nuages à la recherche d'idéaux spirituels, mais négligent leurs devoirs ordinaires, dirigent tout aussi mal leurs efforts que ceux qui s'embourbent dans la fange du travail matériel, à s'escrimer dans leur avidité de "faire des sous". Ces deux classes ont besoin d'aide, quoique dans des directions opposées. Les uns devraient être ramenés sur terre jusqu'à ce que leurs pieds y soient bien plantés, alors que les autres ont besoin de recevoir un bon élan qui leur fasse apercevoir la lumière céleste et leur donne un peu envie d'acquérir ce genre de trésors.

"Ce qui est nourriture pour l'un est un poison pour un autre", dit-on, et ceci s'applique au moins autant à la nourriture spirituelle qu'à celle du plan physique. Il existe une seule grande vérité, qui est la divinité, mais elle a de nombreuses faces. L'angle de présentation qui nous attire peut n'avoir aucun pouvoir sur d'autres et, vice-versa, leur idée de la vérité peut ne pas répondre à nos besoins. Il y a donc une raison pour toutes les religions dans le monde et pour les opinions variées des différentes dénominations et sectes

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religieuses. Chacun a sa mission à remplir parmi les peuples où elle est enseignée, aussi devrions-nous faire montre de tolérance envers toutes les sortes de cultes et de religions, même lorsque leurs fidèles nous attaquent, nous et nos opinions.

Nous devrions nous contenter d'être connus par nos fruits, car ceci est la seule preuve concluante de la religion de chacun. Cette religion fait-elle de nous de meilleurs hommes et femmes, de meilleurs parents, frères, soeurs, employeurs et employés? Fait-elle de nous de meilleurs citoyens à tous les points de vue, des citoyens méritant l'estime de la communauté? C'est à cela qu'on reconnaît la vraie religion.

On ne risque guère de trouver des matérialistes dans nos rangs, mais malheureusement, ceux qui adoptent des enseignements d'avant-garde tendent à s'envoler dans les nuages, en oubliant le monde matériel et ses devoirs. Pour cette raison, d'autres se méfient des enseignements occultes et considèrent ceux qui les étudient comme des détraqués, bien que l'occultisme ne soit pas plus responsable de leur attitude que ne l'est une bonne nourriture lorsqu'un faible estomac est incapable de la digérer.

Par conséquent, nous devrions non seulement nous montrer tolérants pour les croyances des autres et nous faire une règle de ne jamais dénigrer une foi différente de la nôtre, mais encore nous surveiller, afin de voir si nous vivons réellement les enseignements rosicruciens de façon à leur faire honneur dans notre entourage.

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LETTRE NO 92 - Juillet 1918
LE BUT DE LA GUERRE ET NOTRE ATTITUDE A SON SUJET

De temps à autre, des étudiants de diverses parties du monde nous ont demandé quelle devrait être leur attitude à l'égard de la guerre et quelle pouvait être son utilité, spirituellement parlant. En réponse, nous avons fait ressortir, dans plusieurs articles publiés dans les "Rays from the Rose Cross", les enseignements rosicruciens concernant l'objet de la guerre, qui est d'amener le monde à se tourner vers Dieu pour être consolé de son chagrin, et aussi de contribuer à déchirer le voile qui sépare le monde visible des plans invisibles, en aidant beaucoup de personnes à acquérir la vue spirituelle et la faculté de communiquer avec ceux qui ont passé les portes de l'au-delà. Bien que ces explications aient satisfait la plupart des étudiants jusqu'à un certain point, d'autres auraient voulu quelque chose qui soit en rapport direct avec les conditions actuelles. Nous avons alors attiré leur attention sur notre 13e conférence, intitulée "Les Anges, facteurs de l'évolution (devenue le 13e chapitre du "Christianisme Rosicrucien") qui montre comment les affaires humaines sont dirigées par des Anges et des Archanges jouant le rôle d'Esprits de familles et de races, causant l'ascension et la décadence des nations, selon les besoins des différents groupes d'esprits dont ils ont la charge.

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Comme un dernier essai de répondre aux voeux de nos étudiants, nous vous remettons ci-joint une leçon intitulée "La Philosophie de la Guerre" (devenue le NO 163 du 2e volume de "Questions et Réponses") montrant l'application des principes ci-dessus aux conditions présentes. Nous pensons que vous y trouverez les explications nécessaires et qu'elles vous aideront tous à comprendre ce que cela implique, afin que vous puissiez apporter votre chaleureuse coopération à nos efforts pour mettre fin à cette lutte le plus tôt possible et assurer la paix à laquelle nous aspirons tous ardemment.

Rendons-nous bien compte, toutefois, qu'il ne pourra y avoir de paix digne de ce nom tant que le militantisme n'aura pas reçu un coup assez dur pour ne pouvoir relever la tête pendant longtemps. Beaucoup de gens pensent que cette guerre sera la dernière, et nous désirons ardemment pouvoir les croire. On l'a aussi cru lorsque Napoléon, il y a cent ans, a envahi l'Europe avec ses hordes, mais la suite a montré combien ces espoirs étaient vains. La paix est une question d'éducation, un idéal impossible à atteindre avant que nous ayons appris à agir charitablement, avec justice et franchise, les uns avec les autres, aussi bien sur le plan national que dans nos rapports individuels. Tant que nous fabriquerons des armes, la paix ne saurait s'établir. Nous devrions avoir pour objectif de faire tout notre possible pour l'abolition du militarisme dans tous les pays et pour l'établissement du principe de l'arbitrage des différends.

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LETTRE NO 93 - Août 1918
NOTRE POUVOIR INTÉRIEUR ET LA RESPONSABILITÉ QUI EN DÉCOULE

Bien des années auparavant, j'ai passé quelques semaines dans une ferme de l'Etat du Maine, à l'époque de la récolte des pommes de terre. En regardant passer les chariots remplis de ces tubercules, j'ai constaté que toutes les pommes de terre étaient grosses et presque de la même dimension. Un jour, j'en ai fait le compliment au paysan, en lui disant combien sa récolte était belle. En réponse, il m'a fait voir, au déchargement, que c'était seulement en surface, et que le fond était plein de petites pommes de terre. Il m'a dit qu'elles étaient mises pêle-mêle dans les chariots, mais que les cahots du chemin, entre le champ et la ferme, faisaient descendre les petites et remonter les grosses. "Vous auriez beau mettre les grosses au fond et les petites au sommet, disait-il, les grosses remonteront et les petites descendront."

N'en va-t-il pas de même dans la vie? Tandis que nous jouons des coudes sur la route de la vie, les plus représentatifs et les plus habiles s'élèvent au sommet. Comme l'affirme le dicton: "Un homme de valeur ne peut être empêché de monter." Il s'élèvera au sommet malgré tout, grâce au pouvoir ascensionnel qui est en lui. Et inversement, chaque fois que l'on place un homme médiocre au sommet, il s'enfoncera, faute de talent. Nous pouvons construire un bâtiment

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aussi haut que nous voulons et l'élever au-dessus des maisons environnantes, pourvu que nous ayons les matériaux nécessaires, mais la croissance d'un être humain se mesure de l'intérieur, et personne ne peut ajouter un cheveu à la stature d'un autre, qu'il s'agisse de stature physique, mentale ou morale. Chacun de nous doit faire lui-même son salut; c'est à nous de décider si nous voulons rester en bas ou monter.

Le paysan avait remarqué que si ses pommes de terre étaient transportées sur une route unie, elles restaient mélangées, mais que, plus le chemin était cahoteux, plus les grosses arrivaient rapidement au sommet, tandis que les petites descendaient au fond.

Dans les grandes crises de la vie, il se présente des occasions importantes à ceux qui sont prêts à endosser des responsabilités et à combattre en première ligne.

Nous vivons à une telle époque et, si nous aspirons à monter, c'est maintenant ou jamais que la meilleure occasion se présente. En ce moment, le monde entier cherche une solution à l'énigme de la vie et se demande où va l'humanité. Nous avons la réponse, aussi est-ce sur nos épaules que repose la responsabilité de conformer notre vie aux enseignements des Frères Aînés et de faire en sorte que notre vie exemplaire exerce un attrait sur ceux que nous côtoyons. De nombreux frères propagent ces enseignements jusque dans les tranchées et apportent une lumière à ceux qui sont prêts à la recevoir. Ceux d'entre nous qui sont restés dans leur milieu habituel trouveront qu'on se pose des points d'interrogation dans bien des milieux jusqu'ici peu perméables à nos enseignements. Cherchons donc avec empressement les occasions de servir et

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tournons-les à notre avantage, car "à qui a beaucoup reçu, il sera beaucoup demandé" (Matthieu 25:14-30).

Je voudrais suggérer à nos étudiants de veiller à ce que la "Cosmogonie" - et nos autres livres - se trouvent, autant que possible, dans les bibliothèques de leur localité, car c'est le moment d'entreprendre une telle action. Il faudrait que cette "Cosmogonie" soit à un endroit accessible et puisse être consultée. Si des amateurs la demandent de temps en temps, même si le bibliothécaire ignore tout de son contenu ou lui est peut-être hostile, la demande constante le forcera finalement à en prendre note. Il est incontestable que les enseignements rosicruciens ont en eux une force intérieure grâce à laquelle ils se font une place dans le monde, mais nous acquerrons des mérites en proportion de la manière dont nous aiderons à porter le message des Frères Aînés à la connaissance de l'humanité en général. C'est maintenant l'époque des vacances, aussi le moment est-il particulièrement propice pour la dissémination d'une philosophie qui a le don de satisfaire l'âme. Cette action se révélera un bienfait pour autrui, et aussi pour nous.

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LETTRE NO 94 - Septembre 1918
LA GRANDE VALEUR DE L'ÉQUILIBRE DANS LES MOMENTS DE CRISE

Dans ces jours où la grande guerre transforme si radicalement nos coutumes, nos habitudes et nos occupations, quel que soit l'endroit du globe où nous vivons; à cette heure où la fleur de notre jeunesse est fauchée par millions, où la femme elle-même est obligée de renoncer à sa vocation de gardienne du foyer pour prendre part à la lutte titanesque derrière les lignes de feu, où les faibles, les vieillards et les tout petits succombent aux privations, comment peut-on s'empêcher d'être plus ou moins bouleversé, selon la mesure de ses souffrances ou de sa proximité de l'océan de haine et de tristesse affectant ce qui était autrefois la douce France, avec les autres pays ravagés par les batailles?

Ne pas se troubler semble sans doute impossible, car on ne peut rester insensible en face de telles souffrances. Un de nos étudiants, après avoir décrit la dévastation d'une ville bombardée, nous demande si l'on peut s'empêcher d'être profondément remué à cette vue. Non, car le Christ était aussi profondément remué lorsqu'il pleurait sur le sort de Jérusalem (Matthieu 23:37), et il a également montré son indignation lorsqu'il a chassé les vendeurs du Temple. Néanmoins, il est certain que la leçon de l'équilibre est l'une des plus grandes que cette guerre puisse nous enseigner.

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Il est bien facile d'être pacifique lorsqu'on se retire dans les montagnes pour y vivre en ermite, mais quel mérite avons-nous à garder notre équilibre sans avoir personne pour nous contrecarrer, s'opposer à nous ou nous tourmenter? Il est plus difficile, cependant, de conserver une attitude paisible dans la vie industrielle d'une cité où une guerre sans merci se livre avec les armes de la concurrence et où l'existence est réglée par des lois et des coutumes. On y arrive pourtant, et cela se fait constamment, par des milliers de personnes qui n'ont aucune prétention à la spiritualité, ayant simplement trouvé que le manque de sang-froid se mettait au travers de leurs ambitions. Ces personnes ont donc décidé de s'entraîner à la pratique de la maîtrise de soi, et elles ont invariablement trouvé qu'elles avaient retiré un grand profit de leurs efforts. Leur santé s'est améliorée, leur bonheur est plus grand et leur efficacité en affaires s'est accrue.

Si cette maîtrise de soi peut être réalisée par des hommes travaillant dans le monde, et s'ils peuvent en retirer un tel bénéfice dans les conditions ordinaires de la vie, ceux d'entre nous qui ont des visées plus hautes et plus nobles et qui se sont efforcés pendant des années de suivre le Sentier ne devraient-ils pas être des exemples de foi et d'espérance en ces temps troublés? Nous devrions être semblables à des forteresses offrant protection à ceux qui n'ont pu avoir cette grande illumination dont nous avons eu le privilège de bénéficier. Et, avant tout, nous devrions exercer une influence régénératrice dans cette crise mondiale.

Dans la leçons ci-jointe (devenue le chapitre 9 des "Enseignements d'un Initié, tome 1) j'ai fait ressortir les causes secrètes qui, par le passé, ont produit et ont fertilisé les semences qui, aujourd'hui, se sont développées sous la forme du présent cataclysme. J'ai aussi fait allusion à la manière

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dont nous semons aujourd'hui les graines de notre avenir, heureux ou malheureux, ceci dans l'espoir que vous allez concentrer vos pensées d'une façon constructive dans la direction indiquée, tout en propageant, autour de vous, les idées présentées. Beaucoup de souffrances pourraient être évitées dans le futur, car les pensées sont des choses réelles et, pour peu qu'elles soient en harmonie avec le plan cosmique, dans lequel tout concourt au bien, elles porteront sûrement leurs fruits.

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LETTRE NO 95 - Octobre 1918
L'ATTITUDE OPTIMISTE ET LA FOI DANS LE BIEN FINAL

Si l'un de vos proches était sur le point de subir une opération chirurgicale, il est probable que vous vous feriez du souci à son sujet et que vos sentiments passeraient alternativement de la crainte à l'espérance. Tantôt l'une de ces émotions aurait le dessus, tantôt l'autre - mais pensez un peu à l'effet qui serait produit sur le patient si vous exprimiez à chaque instant vos doutes et vos inquiétudes. La crainte exerce toujours un effet nuisible et affaiblissant, de nature à augmenter la difficulté qu'éprouve le patient à se guérir. N'oublions pas qu'un malade perd son assurance et se montre beaucoup plus négatif que lorsque sa santé était bonne. Ainsi, même en désirant faire tout ce qui est en votre pouvoir pour aider le malade, votre état d'esprit et le fait de lui confier vos appréhensions l'entraverait énormément.

Il se passe quelque chose de semblable dans le monde à l'heure actuelle, car le genre humain est en train de subir une opération, devenue nécessaire, de cataracte spirituelle. Les peines et les souffrances occasionnées par la présente guerre font beaucoup pour arracher de nos yeux les concrétions matérialistes qui obstruaient notre vision et pour diminuer l'épaisseur du voile qui nous sépare de nos "morts-vivants". Cette opération est extrêmement douloureuse, et tout être humain capable d'éprouver des sentiments ne peut

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s'empêcher de sympathiser avec ceux qui sont réellement au milieu de la tourmente. Mais si nous sommes fermement convaincus du fait que "les pensées sont des choses réelles", nous avons le devoir sacré d'adopter l'attitude la plus optimiste possible, malgré les temps que nous traversons.

Je ne doute pas que chaque étudiant du Rosicrucian Fellowship fasse et donne tout ce qu'il peut pour atténuer les peines et les souffrances dans les pays immédiatement affectés, mais c'est la très importante attitude optimiste que beaucoup ont tant de peine à cultiver et à conserver. Néanmoins, nous avons le devoir d'adopter cette attitude, notamment à la lumière de notre connaissance plus grande du but poursuivi, qui sera sûrement atteint avec le temps. Nous ne pouvons évidemment nous réjouir de ce que cette tourmente sévisse, mais nous pouvons être reconnaissants de savoir que nous pouvons aussi bien compter sur les grands bienfaits qu'en retirera le monde en général, que nous pouvons nous attendre au lever du soleil chaque matin et à son coucher chaque soir.

Nous avons une fois absolue dans la sagesse et la toute-puissance divines. Nous savons qu'il est faux de dire que "la nature n'est que dents et griffes menaçantes", comme l'exprimait un pessimiste. En dépit de ce qui peut paraître à notre vision limitée, la bienveillance est le facteur qui gouverne l'évolution du monde.Il faudrait donc que chacun de nous se montre à la hauteur de l'obligation sacrée de toujours s'efforcer d'avoir une attitude optimiste et de toujours manifester notre foi inébranlable dans le bien final qui ne manquera pas de résulter des conditions actuelles. Rappelons-nous qu'en travaillant dans le sens de l'évolution, nous sommes comparables à celui qui rame dans le courant: nos efforts auront un effet plus grand que si notre attitude est contraire au bien général.

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LETTRE NO 96 - Novembre 1918 - VOULEZ-VOUS NOUS RENDRE SERVICE?

Ne pouvant, pour des raisons de poids et de frais de port, mettre davantage de textes dans nos enveloppes, j'espère que vous me pardonnerez d'avoir, au lieu de traiter comme de coutume un sujet spirituel, utilisé l'espace de notre lettre de ce mois pour vous prier d'aider à la diffusion de nos enseignements.

Nos étudiants ne s'intéressent pas tous à l'astrologie, mais nos livres d'astrologie sont de puissant propagateurs de notre philosophie, en raison du fait qu'ils font ressortir le côté religieux de l'astrologie, tout en faisant de la réclame pour la "Cosmogonie" et nos autres ouvrages philosophiques. Grâce à eux, nous pouvons atteindre une classe de personnes qui, autrement, ne se seraient pas intéressées aux enseignements rosicruciens. Par conséquent, tout effort en vue de diffuser nos livres d'astrologie est en même temps une propagande pour notre philosophie.

Jamais moment plus propice ne s'est présenté pour introduire nos publications astrologiques. Les autorités britanniques ont interdit l'exportation de livres et rationné le papier, si bien que peu d'éphémérides seront imprimées et qu'aucune d'elles ne sera exportée. Avant la guerre, un éditeur de Londres avait le monopole de ces publications, difficiles à obtenir et d'un prix assez élevé. Ce prix ayant encore doublé, The Rosicrucian Fellowship a entrepris le

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prodigieux travail de publier de meilleures éphémérides pour la moitié de ce prix. Ce travail, qui nous a pris une année d'efforts acharnés, s'est achevé en juillet de cette année, presque au moment même où les autorités britanniques décrétaient l'embargo mentionné sur les exportations de livres, ce qui aurait mis les astrologues du monde entier dans l'impossibilité de se procurer les données nécessaires, si nos éphémérides n'avaient pas déjà été en vente.

Ceux qui les ont reçues en sont reconnaissants et ne tarissent pas d'éloges sur la clarté de leurs grands caractères, leur disposition pratique et leur prix modique, mais des milliers de libraires et d'astrologues ne connaissent pas nos éphémérides. Ils sont restés sous l'impression que ces publications ne pourront être obtenues avant la fin de la guerre, et nous aurions besoin de votre aide pour corriger cette idée et les mettre en rapport avec The Rosicrucian Fellowship. Vous contribuerez ainsi à la fois à la diffusion des enseignements occultes et astrologiques, car, comme déjà dit, quand l'un d'eux est porté à l'attention de quelqu'un, l'autre l'est automatiquement.

Pourriez-vous visiter, dans votre localité, les libraires vendant des livres d'occultisme et leur demander s'ils connaissent les publications du Rosicrucian Fellowship? Dites-leur qu'avant la guerre, les éditeurs anglais vendaient environ un demi-million d'éphémérides par an; leur prix est actuellement de 50 Cents la pièce par année écoulée, mais nous avons maintenant publié de meilleures éphémérides pour les 60 ans de 1860 à 1919, qui se vendent 25 Cents l'année. En outre, un très généreux rabais sera consenti aux revendeurs sur ce prix. Nous vous serions également reconnaissants de nous indiquer les adresses de ces libraires.

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Si vous avez des amis qui s'intéressent à l'astrologie et qui ne connaissent pas The Rosicrucian Fellowship, veuillez nous indiquer leur adresse, afin de nous permettre de leur offrir nos éphémérides, la Table des Maisons, ainsi que notre grand nouveau livre, le "Message des Astres", que nous sommes en train de publier. Nous comptons sur votre entière coopération en ce domaine, car vous travaillerez ainsi dans l'intérêt du Rosicrucian Fellowship, tout en aidant très efficacement à propager les enseignement de nos Frères Aînés, que nous aimons tous.

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LETTRE NO 97 - Décembre 1918
COMMENT PROLONGER LA VIE DE L'ARCHÉTYPE

Cette lettre aux étudiants est la dernière de l'année; et il va de soi qu'à la fin de chaque cycle annuel nos pensées se concentrent sur la fuite du temps et la brièveté de l'existence dans ce monde. Cela nous fait aussi sentir combien le temps est précieux, en nous rappelant que nous sommes responsables de son meilleur emploi, car "que servirait-il à un homme de gagner le monde entier, s'il perdait son âme?" (Marc 8:36). Le moment des semailles est venu, et on nous dit que "à qui il a été beaucoup donné, il sera beaucoup redemandé" (Matthieu 25:14-30). Par conséquent, nous devrons rendre compte de ce que nous avons fait ou négligé de faire, et cela dans une plus grande mesure que d'autres qui n'ont pas eu cette connaissance intime du plan divin, telle que nous l'ont accordée les Frères Aînés.

Dans cette ordre d'idées, rendons-nous compte que tout acte d'un être humain exerce un effet direct sur l'archétype de son corps. Si cet acte est en harmonie avec les lois de la vie et de l'évolution, il renforce l'archétype et tend à prolonger une vie dans laquelle l'intéressé passera par le maximum d'expériences et développera son âme dans la mesure des conditions où il se trouve et de sa capacité d'apprendre. Il aura donc besoin de se réincarner moins de fois pour atteindre à la perfection que celui qui se dérobe aux

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tensions de la vie et tâche d'échapper à ses fardeaux, ou que celui qui utilise ses forces de façon destructrice. Chez ces deux dernières classes d'êtres, l'archétype est, pourrait-on dire, "tendu", et il se rompt de bonne heure. Ainsi, ceux dont les actes sont contraires à la loi abrègent leur vie et doivent se réincarner plus souvent que ceux qui vivent en harmonie avec cette loi; et ceci est une illustration du passage biblique nous exhortant à "faire le bien, afin de pouvoir vivre longtemps dans le pays".

Cette loi s'applique à tous, sans exception, mais elle revêt une plus grande importance dans la vie de ceux qui collaborent consciemment avec les lois de l'évolution que dans celle des autres. La connaissance de ces faits devrait décupler, sinon centupler notre enthousiasme et notre zèle pour le bien. Même si nous avons commencé, comme on dit, "tard dans la vie", nous pouvons facilement amasser davantage de "trésors" durant ces quelques dernières années de notre vie qu'au cours de plusieurs vies antérieures. Et, avant tout, nous nous plaçons dans les meilleures conditions pour prendre le départ bien plus tôt dans les vies suivantes.

Espérons donc que nous aurons tiré le meilleur avantage de l'année qui s'en va, et préparons-nous à redoubler d'efforts dans la suivante.

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LETTRE 98 - Janvier 1919 - LA LOI DU SUCCES EN MATIERE SPIRITUELLE

Il semble indiqué de commencer notre correspondance de 1919 en vous souhaitant bonheur et succès pour la nouvelle année, mais, comme dit le proverbe: "Si les souhaits étaient des chevaux, les mendiants rouleraient carrosse." Pour assurer le succès et le bonheur, il faut quelque chose de plus que des souhaits, mais il se pourrait que les miens portent davantage de fruit si je vous explique la loi du succès.

Les étudiants de The Rosicrucian Fellowship savent que la "chance" n'existe pas, et ils sont absolument d'accord avec Méphisto quand il dit, dans le drame de Faust:

"Le sot ne s'aperçoit jamais Combien la chance est liée au mérite. S'il possédait la pierre philosophale, Gageons qu'elle serait sans philosophe!"

Mais ici, une question se pose à beaucoup d'entre vous: est-il possible de réduire le succès à une loi?

Oui, il existe une loi du succès, aussi sûre et immuable que n'importe laquelle des autres lois cosmiques. Toutefois, bien qu'ayant uniquement l'intention de traiter de son application aux choses spirituelles, je ne voudrais pas vous cacher qu'elle s'applique aussi avec un

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succès certain aux affaires matérielles. Mais avant de l'utiliser dans cette direction, veuillez bien réfléchir au fait qu'une telle action équivaut à un suicide mental, car "vous ne pouvez servir à la fois Dieu et Mammon" (Matthieu 6:24). Cherchez plutôt en premier le "Royaume de Dieu et sa justice et toutes choses vous seront données par surcroît" (Matthieu 6:33). Ayant vécu des années sur la véracité de cette promesse, je puis attester qu'il en est bien ainsi.

La loi du succès peut donc s'énoncer comme suit:

Premièrement, déterminez avec clarté et précision votre désir, qui devrait être désintéressé et dont la réalisation ne devrait pas vous faire perdre l'équilibre: développement du pouvoir de guérison, vision spirituelle, activité d'aide invisible, don de la parole pour transmettre à autrui le message rosicrucien, etc.

Deuxièmement, une fois que vous avez bien défini votre but, n'entretenez jamais, fût-ce pour un instant, une pensée quelconque de crainte ou d'échec, mais cultivez une attitude de détermination invincible pour l'accomplissement de votre désir en dépit de tous les obstacles. Ayez constamment présente à l'esprit la pensée: "je peux et je veux".

Ne commencez pas à faire des plans pour réussir dans votre entreprise avant d'être arrivé à une attitude de confiance absolue en vous et en votre capacité d'accomplir ce que vous désirez, car un mental ébranlé par la moindre crainte d'échouer ne saurait faire des plans susceptibles de réussir pleinement. Soyez donc patient, et ne manquez pas de commencer par cultiver une foi absolue en vous-même et en votre capacité de réussir malgré les difficultés.

Une fois arrivé au point où vous serez pleinement persuadé de votre capacité de réussir et positivement déterminé à faire tout ce qu'il faudra pour y

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arriver, il n'est pas, sur terre ou dans les cieux, de pouvoir capable de vous résister dans cette entreprise particulière, et vous pourrez alors commencer à faire vos plans concernant la manière de procéder pour réaliser, avec la certitude de succès, le désir de votre coeur.

J'espère que vous allez appliquer cette loi avec zèle pour votre croissance spirituelle, non seulement dans l'année qui s'ouvre, mais pour toutes celles qui suivront.

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THE ROSICRUCIAN FELLOWSHIP (voir leçon XXXX 26)

Autrefois, même dans une époque aussi proche de la nôtre que la civilisation grecque, la Religion, les Arts et la Science faisaient l'objet d'un enseignement conjoint dans les Temples des Mystères. Toutefois, pour que chacune de ces branches puisse continuer à se développer, il était devenu nécessaire qu'elles soient séparées pour une certaine durée.

Pendant ce qu'on a appelé "l'Age de l'Obscurantisme", ou Moyen Age, la Religion était toute-puissante et maintenait la Science et les Arts sous une étroite tutelle. Vint ensuite la Période de la Renaissance, où s'affirmèrent les Arts sous toutes leurs formes. Toutefois, la Religion continuait à être aussi puissante que précédemment, aussi les Arts ne lui ont été que trop asservis. Finalement, la Science est venue au premier plan et, de sa main de fer, elle a subjugué la Religion.

Les chaînes dans lesquelles la Religion enserrait la Science avaient été très funestes pour l'humanité, mais tout au moins l'homme entretenait un idéal supérieur, car il espérait en une vie meilleure et plus élevée. Aujourd'hui, le fait que la Science étouffe la Religion est infiniment plus désastreux car maintenant l'Espérance elle-même, le seul don que les Dieux aient laissé au fond de la Boîte de Pandore, pourrait disparaître devant le Matérialisme et l'Agnosticisme .

Un tel état de choses ne saurait durer, car une réaction doit intervenir si l'on veut éviter que l'humanité détruise le Cosmos. Pour prévenir une telle calamité, il faut que la Religion, la Science et les Arts s'unissent à nouveau en une expression plus élevée du Bien, de la Vérité et de la Beauté qu'avant leur séparation.

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Toutefois, une religion spirituelle ne peut s'unir à une science matérialiste, pas davantage que de l'huile ne pourrait se mélanger à de l'eau et, pour cette raison, des mesures ont été prises afin de rendre la Science plus spirituelle et la Religion plus scientifique.

Au XIIIe siècle, un Instructeur d'une haute spiritualité, portant le nom symbolique de Christian Rosenkreuz (le Chrétien à la Rose et à la Croix) est apparu en Europe pour commencer ce travail d'unification. Il a fondé l'Ordre mystérieux de la Rose-Croix dans le but d'apporter les lumières de l'Occultisme à la Religion Chrétienne si mal comprise, et d'expliquer les mystères de la vie et de l'être au double point de vue scientifique et religieux.

Au cours des siècles passés, les Rose-Croix ont oeuvré dans le secret, mais aujourd'hui le temps est venu de rendre publics des enseignements à la fois définis, logiques et cohérents concernant l'origine, l'évolution et le développement futur du monde et de l'humanité; de montrer à la fois l'aspect scientifique et religieux de ces notions, de diffuser des connaissances sans rien affirmer qui ne soit appuyé par la raison et la logique. Telle est la philosophie promulguée par The Rosicrucian Fellowship; elle satisfait le mental en donnant des explications claires; elle ne fait pas de pétitions de principe ni n'élude les questions. Elle offre une solution raisonnable de tous les mystères, mais - et ceci est très important - les Rose-Croix ne considèrent pas la compréhension intellectuelle de Dieu et de l'Univers comme un but en soi ; loin de là. Plus l'intelligence est développée, plus grand est le danger d'en mésuser, et c'est pourquoi des enseignements scientifiques sont uniquement donnés aux hommes pour que leur coeur puisse croire ce que leur intelligence a sanctionné et s'appliquer à vivre de la vie mystique qui, seule, pourra nous apporter la vraie Fraternité.

 

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