Parmi toutes les incertitudes qui sont la caractéristique de ce monde, il n'est qu'une seule certitude: la mort. A un moment ou un autre, après une vie courte ou longue, vient cette fin de la phase matérielle de notre existence, qui est une naissance dans un monde nouveau, puisque ce que nous appelons "naissance" est, selon le mot splendide de Wordsworth, un oubli du passé:
"La naissance n'est qu'un sommeil et qu'un oubli, Et l'âme qui se lève avec nous, cette étoile De notre vie, s'était couchée ailleurs qu'ici, Et revient de loin au-delà du voile; Mais ce n'est pas pourtant dans un total oubli, Dans une nudité qui touche à l'infini; Car c'est en poursuivant des nuages glorieux Que nous sommes venus de ce chez nous qu'est Dieu. Le ciel est tout autour de nous dans notre enfance; L'ombre d'une prison élève sa barrière Autour du petit garçon qui grandit. Mais il peut voir encore et sentir la lumière Dans sa joie, et voir d'où elle jaillit. L'adolescent qui doit chaque jour dès l'aurore Progresser plus avant, est cependant encore
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Prêtre de la nature, et la vision splendide L'accompagne sur sa route limpide. Avec le temps enfin l'homme la voit mourir, Dans la clarté du jour, fondre et s'évanouir..."
Naissance et mort peuvent donc être considérées comme le transfert de l'activité de l'homme d'un monde à un autre, et c'est selon notre propre situation que nous appelons ce changement naissance ou mort. Si l'être humain entre dans le monde où nous vivons, nous disons naissance; s'il abandonne notre plan d'existence pour entrer dans un autre monde, nous disons mort. Mais le passage d'un monde dans un autre n'est rien de plus qu'un déménagement dans une autre ville ici-bas. Le défunt continue à vivre sans avoir changé; seuls son entourage et les conditions extérieures ont changé.
Le passage d'un monde dans un autre s'accompagne souvent d'une certaine inconscience analogue au sommeil, comme le dit aussi Wordsworth; c'est pourquoi notre conscience peut rester fixée sur le monde que nous avons quitté. Dans la première enfance, en vérité, le ciel nous entoure. Les enfants sont tous clairvoyants pendant plus ou moins longtemps après leur naissance; et, de la même manière, quiconque nous quitte par la mort voit encore le monde matériel pendant un certain temps. Si nous mourons dans la pleine vigueur physique de l'âge adulte, fortement attachés à notre famille, à nos amis ou à d'autres intérêts, le monde physique continue à attirer notre attention pendant beaucoup plus longtemps que si la mort survient dans nos "très vieux jours", un âge où les liens terrestres se sont rompus avant le changement que nous appelons la mort. Ceci relève du même principe qui fait adhérer le noyau à la chair d'un fruit vert, tandis qu'il se détache aisément et proprement du fruit mûr. C'est pourquoi il est plus facile de mourir à un âge avancé que dans la jeunesse.
L'inconscience qui accompagne généralement le transfert de l'esprit qui arrive par la naissance ou de celui qui s'en va par la mort, est due à notre incapacité de nous adapter à notre nouvelle condition.
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Elle est analogue à la difficulté dont nous faisons l'expérience en passant d'une chambre obscure dans la rue, un jour de gai soleil ou inversement; dans ces conditions, il s'écoule quelque temps avant que nous puissions distinguer les objets autour de nous. Il en est de même pour les nouveau-nés et le nouveau-morts, les uns et les autres devant réadapter leur vue à leurs nouvelles conditions de vie.
Quand arrive le moment qui marque l'achèvement de la vie dans le monde physique, le corps dense n'a plus d'utilité, et l'Ego le quitte par la tête, prenant avec lui l'intellect et le corps du désir, comme il le fait chaque nuit pendant le sommeil. Mais maintenant le corps vital est inutile; il est donc également abandonné, et quand la "corde d'argent" qui unissait les véhicules supérieurs aux véhicules inférieurs se rompt, elle ne peut plus être réparée (Ecclésiaste 12:8).
Nous nous rappelons que le corps vital est composé d'éther, et superposé aux corps denses du végétal, de l'animal et de l'homme pendant la vie. L'éther est de la matière physique, et a donc du poids. La seule raison pour laquelle les hommes de science ne peuvent le peser est qu'ils sont incapables d'en réunir une certaine quantité pour la mettre sur une balance. Mais lorsqu'il quitte le corps dense à la mort, il se produit chaque fois une diminution de poids: ceci prouve que quelque chose de pondérable, quoique invisible, quitte le corps dense à ce moment.
En 1906, le Dr Mac Dougall, de Boston, pesa un certain nombre de mourants en plaçant leurs lits sur des balances, qu'il équilibra. On nota que le plateau portant les poids descendait brusquement au moment où fut rendu le dernier soupir. La nouvelle fut lancée à travers les Etats-Unis que l'âme avait été pesée, une prouesse qui ne saurait être menée à bien, car l'âme ne relève pas des lois physiques. Plus tard, le Prof. Twining, de Los Angeles, crut peser l'âme d'une souris; mais, en réalité, c'est le corps vital que les savants avaient pesé au moment où il quittait le corps dense à la mort.
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Il faut dire un mot à propos du traitement infligé aux mourants, qui souffrent dans bien des cas une indicible agonie à cause de la tendresse ignorante de leurs proches. La douleur causée par l'administration de stimulants aux mourants est bien plus grande que toute autre. Il n'est pas pénible de quitter le corps, mais les stimulants ont pour effet de rejeter brusquement dans son corps l'Ego qui part et de lui faire éprouver à nouveau les souffrances auxquelles il était en train d'échapper. De l'autre côté, des désincarnés s'en sont souvent plaints à des chercheurs, et l'une de ces victimes disait n'avoir pas souffert dans toute sa vie autant que pendant les quelques heures où on l'empêchait de mourir. La seule attitude raisonnable est de laisser la nature suivre son cours lorsque la fin paraît inévitable.
Un autre péché, encore plus préjudiciable, contre l'esprit qui s'en va, consiste à pleurer bruyamment et à se lamenter dans la chambre mortuaire ou à proximité. Immédiatement après sa délivrance, et pendant un temps qui varie de quelques heures à quelques jours, l'Ego est occupé par un travail de la plus grande importance; une grande partie de la valeur de la vie passée dépend de l'attention qu'y apporte l'esprit qui part. S'il est distrait par les lamentations et les sanglots d'êtres chers, il subira une perte comme nous le verrons; mais s'il est fortifié par la prière et aidé par le silence, beaucoup de peines futures pourront être évitées à tous les intéressés. Jamais nous ne sommes davantage le "gardien de notre frère" qu'au moment où il passe par ce Gethsémané, et c'est là une de nos plus grandes occasions de lui rendre service et d'amasser pour nous-mêmes des trésors dans le ciel (Matthieu 6:20).
Nous avons étudié le phénomène de la naissance, et nous avons développé une Science de la Naissance. Nous avons des obstétriciens qualifiés et des infirmières très capables pour aider à la fois la mère et l'enfant; mais nous avons, hélas, le plus grand besoin d'une Science de la Mort. Quand un enfant vient au monde, nous nous empressons avec patience et intelligence; quand un ami de toute la vie est sur le point de nous quitter, nous restons là impuissants, ignorants de la manière de l'aider ou, pis que tout, nous le faisons souffrir par nos maladresses au lieu de lui venir en aide.
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La science physique sait que, quelle que soit la nature de la force qui anime le coeur, elle ne vient pas de l'extérieur, mais réside à l'intérieur du coeur. Quant à l'occultiste, il voit une cavité dans le ventricule gauche, près de la pointe, où un petit atome nage dans un océan de l'éther le plus subtil. La force contenue dans cet atome, comme les forces de tous les autres atomes est la vie indifférenciée en Dieu; sans cette force, le minéral ne pourrait donner à la matière la forme de cristaux; quant aux règnes végétal, animal et humain, ils seraient incapables de former leurs corps. Plus nous allons au fond des choses, plus devient claire pour nous cette vérité fondamentale qu'en Dieu nous avons la vie, le mouvement et l'être (Actes 17/28).
Cet atome s'appelle "l'atome-germe". La force qu'il contient anime le coeur et maintient la vie dans l'organisme. Tous les autres atomes du corps entier doivent vibrer en harmonie avec cet atome. Les forces de l'atome-germe ont été intégrées à tous les corps denses possédés autrefois par l'Ego particulier auquel il est attaché; et sur sa matière plastique sont gravées toutes les expériences de cet Ego au cours de toutes ses existences. Quand nous retournerons à Dieu, quand nous serons tous devenus une fois encore "Un en Dieu", ces archives qui sont particulièrement le "livre" de Dieu (Apocalypse 20/12), subsisteront toujours, et c'est par elles que nous conserverons notre individualité. Nous transformons nos expériences, comme nous le décrirons, en facultés; le mal est transmué en bien, et ce bien est conservé comme pouvoir de faire un bien plus élevé, mais les archives enregistrées de nos expériences appartiennent à Dieu et sont en Dieu, dans le sens le plus intime.
La "Corde d'argent" qui unit les véhicules supérieurs et inférieurs se termine par l'atome-germe dans le coeur.
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Quand la vie matérielle vient à sa fin d'une manière naturelle, les forces de l'atome-germe se dégagent en passant le long du nerf pneumogastrique, puis par derrière la tête et le long de la corde d'argent, en même temps que les véhicules supérieurs. C'est cette rupture dans le coeur qui marque la mort physique; mais la connexion de la corde d'argent n'est pas rompue tout de suite et, dans certains cas, pas avant plusieurs jours.
Le corps vital est le véhicule de la perception sensorielle. Comme il reste avec le corps du désir et que la corde éthérique les relie au corps dense abandonné, il est évident que jusqu'à la rupture de cette corde, il doit rester une certaine quantité de sensation éprouvée par l'Ego lorsque le corps dense est malmené. Il se produit donc une certaine douleur lorsque le sang est extrait et le liquide d'embaumement injecté, lorsque le corps est ouvert pour une autopsie ou lorsque le corps est incinéré trop tôt.
L'auteur a eu connaissance d'un cas où un chirurgien avait amputé trois orteils sous anesthésie à un patient. Il jeta les orteils coupés dans un feu vif, mais aussitôt l'opéré s'est mis à crier, car la rapide désintégration des orteils matériels produisait une désintégration aussi rapide des orteils éthériques reliés aux véhicules supérieurs. C'est de cette manière que toutes les atteintes affectent l'esprit désincarné pendant un temps qui va de quelques heures à trois jours et demi après la mort. A ce moment, toute connexion est coupée, et le corps commence à se décomposer.
C'est pourquoi il faut prendre grand soin de ne pas faire souffrir, par de tels procédés, l'esprit qui s'en va. Si les lois ou d'autres circonstances empêchent de garder le corps au calme pendant quelques jours dans la chambre où la mort s'est produite, du moins peut-on le mettre dans une chambre froide pendant ce laps de temps et ensuite le traiter de la manière désirée. Le calme et la prière sont à ce moment d'un grand secours; et si nous aimons avec sagesse l'esprit qui s'en va, nous pourrons gagner sa gratitude éternelle en suivant les instructions ci-dessus.
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Dans la troisième conférence, nous avons dit que le corps vital est le dépôt de la mémoire à la fois consciente et sub-consciente; sur le corps vital sont gravés de façon indélébile tous les actes et toutes les expériences de la vie passée, comme un paysage sur un film photographique. Lorsque l'Ego a extrait ce corps vital du corps dense, la vie tout entière, telle qu'elle a été enregistrée par la mémoire sub-consciente, s'étale devant les yeux de l'esprit. C'est le relâchement partiel des liens du corps vital qui fait voir à un noyé toute sa vie passée, mais ce n'est alors qu'un éclair précédant l'inconscience; dans ce cas la corde d'argent reste intacte, sans quoi il ne pourrait y avoir de rappel à la vie. Dans le cas d'un esprit qui s'en va au moment de la mort, le mouvement est plus lent; le sujet voit en spectateur se succéder les images, l'une après l'autre, dans l'ordre qui va de la mort à la naissance; il voit d'abord les évènements qui ont immédiatement précédé la mort; puis se déroulent les années de l'âge adulte; suivent la jeunesse, l'enfance et le premier âge, jusqu'à la naissance. Le sujet, cependant, n'éprouve à ce moment aucun sentiment devant ces images; le but est simplement de graver le panorama sur le corps du désir, qui est le siège des sentiments; et c'est grâce à cette impression que le sentiment deviendra réalité lorsque l'Ego entrera dans le monde du désir. Mais nous devons noter ici que l'intensité du sentiment ressenti dépend de la longueur du temps consacré à ce processus d'impression, et de l'attention qui y est accordée par le décédé. Si pendant une longue période il n'a été troublé ni par le bruit ni par des lamentation bruyantes, c'est une impression profonde et claire qui sera faite sur le corps du désir. Il sentira au Purgatoire de façon aiguë le mal qu'il a commis, et sera au Ciel plus largement fortifié dans ses qualités. Et, bien que le souvenir de l'expérience soit perdu dans une vie future, les sentiments resteront, comme le "murmure doux et léger". (I Rois 18:12)
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Lorsque les sentiments auront été profondément marqués sur le corps du désir d'un Ego, cette voix de la conscience parlera en termes qui ne seront ni vagues, ni incertains. Elle le poussera envers et contre tout, le forçant à renoncer à ce qui l'a fait souffrir dans ses vies antérieures, et l'obligera à se soumettre à ce qui est bon. C'est pourquoi le panorama se déroule à rebours, pour que l'Ego voie d'abord les effets, puis les causes qui les ont produits.
Qu'est-ce qui détermine la longueur du panorama? Souvenons-nous que c'est l'affaissement du corps vital qui force les véhicules supérieurs à se retirer pendant le sommeil; de même, après la mort, au moment où s'affaisse le corps vital, l'Ego est contraint de se retirer, et le panorama vient alors à sa fin. La durée du déroulement du panorama dépend donc du temps pendant lequel, le sujet, au cours de sa vie, aurait pu rester éveillé en cas de besoin; certaines personnes ne peuvent rester éveillées que quelques heures, d'autres peuvent tenir plusieurs jours, selon la force de leur corps vital.
Quand l'Ego a quitté le corps vital, ce dernier revient vers le corps dense, et plane au-dessus de la tombe, se détruisant en même temps que le corps dense; aussi est-ce un spectacle répugnant pour le clairvoyant que de passer dans un cimetière et d'y voir tous ces corps vitaux dont l'état de destruction indique clairement l'état de décomposition des restes dans les tombes. Si les clairvoyants étaient plus nombreux, l'incinération serait bien vite adoptée comme une mesure de protection envers nos sentiments, sinon pour des raisons sanitaires.
Quand l'Ego s'est libéré du corps vital, son dernier lien avec le monde physique est rompu, et il entre dans le monde du désir. La forme ovoïde du corps du désir se modifie alors, et il prend la forme du corps dense abandonné. Il existe cependant une disposition particulière des éléments dont il est formé, laquelle revêt une haute signification quant au genre de vie que le décédé va mener dans ce monde.
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Le corps du désir de l'homme est composé de substances des sept régions du monde du désir, de même qu'un corps physique est construit de solides, liquides et gaz de ce monde. Mais la quantité de matière de chaque région dans le corps du désir de l'homme dépend de la nature des désirs qu'il nourrit. Les désirs grossiers sont composés de la matière émotionnelle la plus grossière, qui appartient à la région la plus basse du monde du désir; une personne qui possède de tels désirs construit un corps du désir grossier, où prédomine la matière des régions les plus basses. Si une autre personne rejette avec persistance loin d'elle les désirs grossiers, n'obéissant qu'aux désirs purs et bons, son corps du désir sera formé de matériaux des régions les plus élevées.
Actuellement, nul n'est totalement bon; nous sommes tous des mélanges de ces deux types de substance; mais il peut y avoir, et il y a en fait, des différences dans leurs proportions. Dans le corps du désir de quelques-uns il y a une prépondérance de la matière grossière, dans d'autres, prépondérance de la matière fine; et cela fait toute la différence dans le milieu et la situation du décédé à son entrée dans le monde du désir après la mort.
En effet, la matière du corps du désir, au moment où elle prend la forme du corps dense abandonné, prend en même temps la disposition suivante: la matière la plus subtile (qui appartient aux régions supérieures du monde du désir) forme le centre du véhicule, alors que la matière des trois régions les plus denses se place à l'extérieur. Quand la vie terrestre de l'Ego est finie, il développe une force centrifuge pour se libérer de ses véhicules, suivant en cela la même loi qui fait rejeter dans l'espace, par une planète, la partie d'elle-même la plus dense et cristallisée. L'Ego se débarrasse donc d'abord de son corps dense, puis lorsqu'il entre dans le monde du désir, cette force centrifuge agit également pour rejeter vers l'extérieur la partie la plus grossière du corps du désir: le décédé est ainsi forcé de rester dans les régions inférieures jusqu'à ce qu'il soit purifié des désirs grossiers qui étaient incorporés dans la matière émotionnelle la plus dense.
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Cette matière émotionnelle la plus grossière est donc toujours dans la partie extérieure du corps du désir pendant qu'il traverse le Purgatoire, et elle est graduellement éliminée par la force centrifuge, ou force de répulsion, qui l'expurge. Cette force arrache le mal du décédé et lui permet alors de monter dans la partie supérieure du monde du désir (Premier Ciel), où la force d'attraction règne seule et incorpore à l'Ego le bien de la vie passée sous forme de pouvoir de l'âme. La partie rejetée du corps du désir est abandonnée comme une "coque" vide.
Lorsque l'Ego a quitté son corps dense, celui-ci meurt rapidement. La matière physique devient inerte dès l'instant où elle est privée de l'énergie qui l'anime et lui donne la vie; elle se dissout en tant que forme. Il n'en est pas de même pour la matière du monde du désir; une fois que la vie lui a été communiquée, cette énergie y subsiste pendant un temps considérable après que l'influx vital a cessé, temps qui varie selon la puissance de l'impulsion donnée. Il en résulte qu'après l'abandon de l'Ego, ces "coques" subsistent pour un temps plus ou moins long. Elle vivent d'une vie indépendante; et, si l'Ego auquel elles appartenaient était très adonné aux désirs terrestres, peut-être arraché au printemps de la vie, plein d'ambitions puissantes et insatisfaites, cette coque sans âme fera souvent les efforts les plus désespérés pour revenir dans le monde physique: beaucoup de phénomènes des séances spirites sont dus à l'action de ces coques. Le fait que les communications reçues de ces soi-disant "esprits" sont complètement dénuées de sens est facile à expliquer, si nous savons que ce n'est pas un esprit, mais seulement une partie du vêtement d'un esprit démunie d'âme, et donc sans intelligence. Ils ont des souvenirs de la vie passée, dus au panorama qui a été imprimé après la mort, souvenirs qui leur permettent souvent d'en imposer aux parents en citant des faits inconnus d'autres personnes: il n'en reste pas moins qu'ils ne sont que le vêtement de l'Ego, rejeté par lui et doué momentanément d'une vie indépendante.
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Ce n'est pas toujours, cependant, que ces coques restent sans âme, car il y a dans le monde du désir différentes classes d'êtres, dont l'évolution appartient naturellement à ce monde. Ils sont bons et mauvais, comme le sont les êtres humains. On les classe tous généralement sous le même titre d' "élémentals", quoiqu'ils diffèrent énormément comme aspect, intelligence et caractéristiques. Nous ne nous occuperons d'eux que dans la mesure où leur influence touche à l'état de l'homme après sa mort.
Il arrive parfois, spécialement lorsqu'une personne a eu l'habitude d'invoquer les esprits, que ces élémentals prennent possession de son corps dense dans la vie terrestre et fassent d'elle un médium irresponsable. Généralement ils la séduisent d'abord par des enseignements qui paraissent élevés, mais l'amènent ensuite par degrés à une immoralité totale; enfin, pis que tout, ils peuvent prendre possession de son corps du désir après que l'Ego l'a quitté pour monter au ciel. Comme les impulsions contenues dans le corps du désir sont la base de la vie au ciel, et qu'elles sont aussi la sources de ce qui détermine l'Ego à se réincarner pour une croissance nouvelle, il s'agit là d'un fait très grave; car l'évolution tout entière d'une personne peut en être arrêtée pour longtemps, jusqu'à ce que l'élémental libère son corps du désir.
Ces élémentals sont les auteurs de nombreux phénomènes spirites, où est déployée une intelligence supérieure à celle que l'on peut attendre de l'action des coques sans âmes, particulièrement en ce qui concerne les matérialisations. Bien que les coques puissent y prendre part, ces phénomènes sont toujours dirigés par un être doué d'intelligence. La différence entre un médium à matérialisation et une personne ordinaire est que le lien entre le corps dense et le corps vital est plus relâché chez le médium, de telle façon qu'une partie du corps vital de ce dernier peut être extraite, et qu'aussi certains gaz et liquides du corps dense du médium peuvent être utilisés pour former les corps des apparitions. Cette extraction et le processus du revêtement des coques sont généralement accomplis par l'élémental, qui extrait le corps vital du médium par la rate.
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En conséquence, le corps du médium s'en trouve affreusement réduit. Lorsque le corps dense est ainsi privé de son principe vital, il est terriblement épuisé, et malheureusement le médium cherche souvent à regagner son équilibre par des boissons fortes, et devient un ivrogne invétéré.
Dans la dernière conférence, nous avons montré combien il est dangereux de permettre à un hypnotiseur de dominer notre volonté et de nous priver de notre liberté; mais dans ce cas la victime peut du moins voir et juger l'hypnotiseur qui la domine. Dans le cas du médium, le danger est multiplié par mille, parce que l'influence dominatrice ne peut être vue. La mort de l'hypnotiseur libère ses victimes, alors que le danger le plus grave pour le médium se révèle après la mort. Il faut donc considérer comme dangereux tout état négatif dans lequel le corps entier ou même seulement la main d'une personne sont utilisés automatiquement, en dehors de sa volonté propre.
On ne peut nier que quelquefois parviennent des communications authentiques émanant d'un esprit disparu, ou que des cas de communications bienfaisantes se produisent venant de certains être, en dehors de notre volonté; mais notre but est de mettre en évidence les dangers possibles pour ceux qui se mêlent de ce qu'ils ne connaissent pas. Les philanthropes ne se rencontrent pas plus dans le monde du désir que dans le nôtre. En vérité, ce ne sont point des êtres sages et bons, ou des anges, que ceux qui s'amusent à enfoncer le chapeau de quelqu'un jusqu'au oreilles, à lui verser de l'eau dans le cou, ou à faire les autres plaisanteries offertes dans les séances spirites ordinaires; ce sont évidemment, soit les coques sans âmes de vauriens, soit des élémentals en veine de plaisanteries.
Quand un homme s'éveille dans le monde du désir, il est, à une exception près, le même homme à tous égards qu'avant sa mort.
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Il serait reconnu de ses amis de la même manière que dans le monde physique. Il n'y a pas dans la mort de pouvoir de transformation; le caractère d'un homme n'a pas changé, le méchant et l'ivrogne le sont toujours, l'avare est toujours avare, le voleur est plus malhonnête que jamais; il n'y a en eux qu'un seul grand et important changement: ils ont tous perdu leur corps dense, mais c'est là ce qui fait toute la différence quant à la satisfaction de leurs divers désirs. L'ivrogne ne peut pas boire; il n'a pas d'estomac, et bien qu'il puisse, et le fasse souvent au début, pénétrer dans les barils de whisky, il n'y trouve nulle satisfaction, car le whisky dans un baril ne donne pas de vapeurs comme il le fait pendant sa combustion chimique dans le tube digestif. L'ivrogne essaie alors de pénétrer dans le corps dense d'ivrognes qui sont sur la terre. Il y parvient aisément, car le corps du désir est ainsi constitué qu'il n'éprouve aucun inconvénient à occuper le même espace qu'une autre personne. Les "morts", au début, sont parfois ennuyés lorsque leurs amis s'assoient sur une chaise qu'ils occupent; mais bientôt ils apprennent qu'il n'est pas nécessaire qu'ils se hâtent de quitter leur siège, parce qu'un ami encore vivant sur la terre s'approche pour s'y asseoir. Le corps du désir ne souffre pas du fait qu'on "s'assoit sur lui"; les deux personnes peuvent occuper la même chaise sans inconvénient pour les mouvements de l'une, ou de l'autre. L'ivrogne entre donc dans le corps de ceux qui sont en train de boire; mais même là il ne trouve aucune satisfaction réelle; et il souffre le supplice de Tantale, jusqu'à ce qu'enfin le désir disparaisse, consumé de lui-même, par manque de satisfaction, comme le sont tous les désirs, même dans la vie physique.
C'est cela le "Purgatoire"; nous voyons que ce n'est pas une divinité vengeresse qui mesure la souffrance, ou un diable qui exécute le jugement; ce sont seulement les mauvais désirs cultivés pendant la vie terrestre qui, ne pouvant être satisfaits dans le monde du désir, déterminent la souffrance, jusqu'à ce qu'un jour ils se consument d'eux-mêmes. Ainsi la souffrance est strictement proportionnée à la force de l'habitude mauvaise. PAGE 86
Prenez le cas de l'avare; il aime l'or aussi chèrement après la mort qu'avant, mais ne peut plus en amasser; il n'a plus de main physique pour saisir, et, ce qui est pire, ne peut même pas protéger ce qu'il possédait. Il peut s'asseoir devant son coffre pour veiller sur lui, mais les héritiers peuvent venir et passer leurs mains à travers lui pour emporter son or chéri, en se moquant peut-être du "vieil avare", pendant qu'il se convulse de rage et de vexation. Il souffre terriblement parce qu'il est incapable de les tenir en échec. A la longue, cependant, il apprend à se contenir; il est automatiquement purgé de son avarice, comme l'ivrogne de son ivrognerie, par la loi de cause à effet, qui extirpe les fautes de chacun d'une manière impersonnelle. Il n'y a en vérité aucune punition; toute souffrance est entièrement due à nos habitudes acquises et est strictement proportionnée à elles. Avec bienveillance, la loi nous débarrasse de nos fautes; grâce à cette purification, nous naissons innocents et pouvons plus aisément, lorsque nous sommes tentés de nouveau, cultiver la vertu en écoutant la voix qui nous avertit. Tout acte mauvais est donc un acte de libre volonté.
Tandis que nos habitudes mauvaises sont traitées de cette manière, nos actes spécifiquement mauvais de la vie passée sont traités avec le même automatisme, au moyen du panorama de la vie qui a été imprimé sur le corps du désir. Ce panorama commence à se dérouler, à rebours de la mort à la naissance, au moment de notre entrée dans le monde du désir. Il se déroule en arrière à l'allure d'environ trois fois la vitesse de la vie physique, de telle sorte qu'une personne âgée de soixante ans au moment de sa mort revivra sa vie passée tout entière dans le monde du désir en une vingtaine d'années.
Nous nous rappelons qu'en regardant ce panorama juste après la mort, le décédé n'avait à son sujet aucun sentiment; il était là simplement en spectateur, regardant les images pendant qu'elles se déroulaient. Il n'est est plus de même lorsqu'elles apparaissent dans sa conscience au Purgatoire.
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Là, le bien ne produit aucune impression. Mais tout le mal réagit sur le décédé de telle manière que, dans les scènes où il a fait souffrir un autre, il éprouve lui-même ce qu'a ressenti sa victime. Il souffre toute la peine et l'angoisse que sa victime a éprouvées dans sa vie; et, comme la vitesse de la vie est triplée, la souffrance l'est aussi. Elle est même encore plus aiguë, car le corps dense a des vibrations si lentes qu'il émousse même la douleur; mais dans le monde du désir, où nous sommes sans véhicule physique, la souffrance est plus aiguë. Et plus l'impression panoramique de la vie passée a été profondément gravée dans le corps du désir au moment de la mort, plus le décédé souffre et plus il sentira clairement dans les vies ultérieures que la transgression doit être évitée.
Cette souffrance peut avoir un caractère particulièrement désagréable. Si pendant sa vie un homme a lésé deux personnes en même temps, et que l'une vive à New York et l'autre en Californie au moment où leur spoliateur ressent au purgatoire les souffrances qu'il leur a causées, il se sent lui-même comme s'il était présent auprès de chacune d'elles en même temps, comme si une partie de lui-même se trouvait à New York et l'autre en Californie. Cela donne une étrange et indescriptible sensation d'être mis en pièces.
Il y a deux catégories de personnes pour lesquelles le processus du purgatoire ne commence pas d'emblée, à savoir les suicidés et les victimes d'un meurtre. Dans le cas des suicidés, il ne commence pas avant le moment où le corps serait mort du fait du cours normal des évènements; mais jusqu'à ce moment ils souffrent en raison de leur acte d'une manière qui est aussi terrible qu'étrange. Le suicidé éprouve une sensation d'être creux, ou d'habiter un vide douloureux, ce qui est dû à l'activité persistante de l'archétype de sa forme dans la région de la Pensée concrète.
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Dans le cas de personnes, jeunes ou vieilles, qui meurent naturellement ou par accident, l'activité archétypale cesse, Les véhicules supérieurs subissent à la mort une modification telle que la perte du corps dense par elle-même ne donne aucune sensation pénible. Mais le suicidé ne subit pas cette modification avant que l'archétype de son corps cesse de travailler, au moment où la mort serait normalement survenue. L'espace où devrait se trouver son corps dense est vide, parce que l'archétype est creux, et cela le fait souffrir d'une manière indescriptible. Il apprend ainsi qu'il n'est pas possible de manquer la classe à l'école de la vie sans provoquer des conséquences pénibles; et dans les vies ultérieures, quand le chemin lui paraîtra rude, il se souviendra en son âme que la lâche tentative de s'évader par le suicide n'apporte qu'une souffrance encore plus vive.
Certaines personnes se suicident, non pour des raisons égoïstes, mais pour délivrer les autres d'un fardeau; certes elles ont leur récompense d'une autre manière, mais elles n'échappent pas à la souffrance des suicidés, pas plus que l'homme qui entre dans une maison en feu pour y sauver quelque'un ne saurait être immunisé contre les brûlures.
La victime d'un meurtre échappe à la souffrance parce qu'elle est généralement dans un état comateux jusqu'au moment où se serait produite la mort naturelle; on prend soin d'elle à ce point de vue, comme des victimes de ce qu'on appelle les accidents, mais ces dernières sont toujours conscientes, soit aussitôt, soit peut de temps après la mort. Si le meurtrier est exécuté entre l'époque du meurtre et le moment où la victime devait mourir naturellement, le corps du désir comateux de cette dernière vient flotter auprès de son assassin par attraction magnétique, le suivant partout où il va sans un moment de répit. L'image du meurtre est toujours devant lui, lui faisant éprouver la souffrance et l'angoisse qui doit inévitablement accompagner l'incessante reconstitution de son crime dans tous ses horribles détails. Ceci continue pendant un temps qui correspond à la période de vie dont il a privé sa victime.
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Si le meurtrier a échappé à l'exécution et que sa victime ait quitté le Purgatoire avant qu'il ne meure, la "coque" de sa victime demeure pour jouer le rôle de Némésis, déesse du châtiment, dans le drame de la reconstitution du crime.
C'est ainsi que l'Ego se purifie du mal de toute nature; grâce a l'action impersonnelle de la loi de cause à effet, il est prêt à entrer au ciel pour y être fortifié dans le bien, comme il vient d'être découragé de mal faire.
Nous avons vu dans la dernière conférence comment nos actes mauvais de la vie terrestre et nos habitudes indésirables sont traitées par l'impersonnelle loi de cause à effet, et réparés dans les vies futures; et, pour donner des exemples, nous avons noté la manière dont opère cette loi, dans les cas de meurtriers, suicidés, ivrognes et avares. Toutefois, il s'agit ici de cas extrêmes, et beaucoup de gens ont vécu des vies moralement bonnes, entachées plutôt d'égoïsme mesquin (ce péché qui nous assiège si facilement - Hébreux 12:1) que de mal véritable; pour eux, le séjour dans les régions du monde du désir qui constituent le Purgatoire, est naturellement abrégé dans une mesure correspondante, et la souffrance subie est allégée. En temps voulu, tous passent donc dans les régions supérieures du monde du désir, où est situé le premier Ciel.
Celui-ci est le "Summerland" (pays de l'éternel été, du bonheur) des Spirites. C'est avec la matière de cette région que nos pensées, pendant la vie, construisent les formes réelle que nous avons dans notre imagination. Une caractéristique des mondes intérieurs est que leur matière est promptement façonnée par la pensée et la volonté.
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Toutes ces formes fantastiques créées par nous vont et viennent, animées par des élémentals, et durent aussi longtemps que durent la pensée et le désir qui les ont formés. Au moment de Noël, par exemple, Saint Nicolas vit réellement et se promène en traîneau. Il demeure en vigoureuse santé pendant un mois ou plus, jusqu'à ce que les désirs des enfants qui l'ont créé cessent d'affluer dans cette direction; il s'évanouit alors jusqu'au moment où il se recrée l'année suivante. La Nouvelle Jérusalem avec ses rues de perles et sa mer de cristal, et toutes les autres évocations pieuses et morales des gens d'église, existe aussi; le Purgatoire a son diable en forme-pensée, avec ses cornes et son pied fourchu, créé par les pensées des hommes.
Mais dans la partie supérieure du monde du désir, demeure seulement ce qui est bon et désirable dans les aspirations humaines. Ici l'étudiant a la joie de trouver des bibliothèques, et peut ainsi poursuivre ses études d'une manière plus effective que lorsqu'il était confiné dans un corps physique; s'il désire un livre, aussitôt ce livre est là. L'artiste, par son imagination, façonne ses modèles à la perfection; il peint avec des couleurs de vie et de feu, au lieu des nuances mortes et sombres de la terre, qui font le désespoir de l'artiste terrestre, car ici-bas il lui est impossible de reproduire les couleurs que lui montre sa vision intérieure. Mais le monde du désir est le monde de la couleur par excellence, aussi l'artiste réalise-t-il le désir de son coeur dans le premier ciel; il y reçoit l'inspiration et le pouvoir de poursuivre son travail dans les vies futures.
Le sculpteur, lui aussi, trouve dans cette partie de l'après-vie joie et exaltation; il modèle avec facilité les matériaux plastiques dans ce monde, pour en faire les statues qu'il a rêvées dans la vie terrestre. Le musicien aussi y ressent un grand bienfait, mais il n'est pas encore dans le vrai monde du son. Cet océan d'harmonie, où résonne la divine "musique des sphères", est dans la partie de la région de la Pensée que, dans la religion Chrétienne ésotérique, nous appelons le deuxième Ciel; aussi le musicien n'entend-il que les échos des accords célestes;
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mais ils sont plus doux qu'aucun de ceux qu'il entendit jamais sur la terre, et son âme se délecte de leur exquise harmonie, comme un avant-goût des meilleures choses à venir.
C'est aussi au premier Ciel que vont les enfants directement après leur mort: si leurs amis pouvaient les voir, ils ne se lamenteraient pas, car leur vie y est plutôt enviable. Ils sont toujours accueillis par quelque parent ou amis mort avant eux, et l'on prend soin d'eux à tous égards. Certains esprits amassent un véritable trésor pour eux-mêmes en consacrant beaucoup de leur temps à l'invention de jeux et jouets pour les petits; aussi la vie s'écoule-t-elle dans ce premier Ciel de la manière la plus belle pour les enfants. Leur instruction non plus n'est pas négligée; on les réunit en classes, non seulement selon leur âge et leurs capacités, mais aussi selon leur tempérament. On les instruit particulièrement sur les effets des désirs et des émotions, enseignement si facilement réalisé dans un monde où ces choses peuvent être objectivement démontrées. On leur apprend donc par des leçons de choses le bienfait du développement de désirs bons et altruistes; et plus d'une âme qui vit actuellement une vie morale le doit à la mort dans l'enfance, suivie de quinze ou vingt ans dans le premier ciel avant une nouvelle incarnation.
On se demande souvent pourquoi les enfants meurent. Nombreuses en sont les causes: l'une est la mort dans les conditions épouvantables d'un accident, par le feu, ou sur le champ de bataille, dans une vie antérieure; car dans de telles circonstances, l'Ego qui s'en va n'a pu se concentrer normalement sur la vue panoramique de sa vie passée; c'est aussi le cas lorsque les bruyantes lamentations de la famille l'en ont empêché. Le résultat est fatalement une faible impression des expériences de la vie sur le corps du désir, avec une vie insipide au purgatoire et au premier Ciel. Dans de tels cas, l'Ego ne récolte pas ce qu'il a semé; et il risquerait ainsi de commettre vie après vie les mêmes sottises et péchés.
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Pour éviter cette éventualité, la leçon nécessaire doit être gravée sur le nouveau corps du désir dont se munit l'Ego pour sa prochaine naissance. Pendant qu'il va vers une nouvelle naissance, l'Ego est toujours inconscient, aveuglé par la matière qu'il attire autour de lui, comme nous sommes aveuglés quand nous entrons dans une maison un jour de soleil; et c'est seulement après la naissance que la conscience revient dans une certaine mesure. Donc, lorsqu'à sa mort cet Ego arrive dans le premier Ciel, il y apprend objectivement, d'une manière différente, la leçon qu'il aurait dû apprendre pendant son passage sur la terre dans sa vie précédente. Quand cette leçon a été bien assimilée et gravée sur le corps du désir avant la naissance, l'Ego renaît sur terre et évolue de la manière ordinaire.
Les enfants qui meurent avant leur septième année n'ont réellement vécu qu'en ce qui concerne leurs corps physique et vital, et ils ne sont pas responsables devant la loi de cause à effet. C'est même jusqu'à l'âge de douze ou quatorze ans que le corps du désir n'est qu'en gestation, comme nous l'expliquerons plus complètement dans la prochaine conférence; et comme ce qui n'a pas été animé ne peut mourir, seuls les corps dense et vital sont détruits quand un enfant meurt. Cet enfant garde ses atomes-germes du corps du désir et de l'intellect jusqu'à la naissance suivante. Il ne passe donc pas tous les degrés que traverse habituellement l'Ego dans le cadre d'une vie, mais il monte seulement au premier Ciel pour y apprendre les leçons nécessaires; et après une attente de un à vingt ans, il naît à nouveau, souvent dans la même famille en tant qu'enfant cadet.
C'est une erreur de croire que le ciel est un lieu de bonheur sans mélange pour tous. Personne ne peut récolter plus de bonheur qu'il n'en a semé sur terre: notre joie au ciel sera mesurée par les bonnes actions que nous avons faites pendant notre vie terrestre. Le panorama d'après-vie, gravé sur notre corps du désir émotionnel, juste après la mort, forme la base de notre bonheur au ciel, de même qu'il commandait nos souffrances dans le purgatoire.
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Nous avons vu que, pendant que se déroulait au purgatoire le panorama de la vie passée, seules les scènes où nous avions nui à quelqu'un agissaient pour produire de la douleur. Dans le premier ciel, seuls les désirs bons et les actes dénués d'égoïsme peuvent produire des sentiments. Quand nous contemplons une scène où nous avons aidé quelqu'un, adoucissant son chagrin ou allégeant sa souffrance, nous n'éprouvons pas seulement la satisfaction personnelle la plus intense, mais nous éprouvons encore tout le soulagement physique et mental, et la gratitude que le bénéficiaire a ressentis pour son bienfaiteur. Il est sans importance qu'il ait pu savoir ou non qui lui venait en aide; les sentiments qu'il répandait sur nous pendant que nous l'aidions se réaliseront là, indépendamment de toutes circonstances. Inversement, si nous avons nous-mêmes été reconnaissants à nos bienfaiteurs, nous éprouverons à nouveau le même sentiment de soulagement de notre détresse et de gratitude pour l'aide qui nous fut donnée. Tous ces sentiments et ces désirs, au moment de leur réalisation au premier ciel, développent des forces spirituelles qui les fixeront dans l'Ego, où ils seront transformés en facultés utilisables dans des incarnations futures: on voit donc combien il est important pour le développement de notre âme que nous sentions et exprimions notre gratitude pour les faveurs que l'on nous accorde; car c'est ainsi que nous serons fondés à recevoir de nouvelles faveurs, à la fois dans cette vie et dans les vies futures. Il est dit que Dieu aime celui qui donne avec joie (II Corinthiens 9/7); il est également vrai que la "loi" de cause à effet aime le coeur reconnaissant.
Quand nous parlons de "donner", gardons-nous de l'idée fallacieuse que seul l'homme riche peut donner. Donner de l'argent sans discernement est une malédiction, à la fois pour celui qui donne et pour celui qui reçoit.
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C'est seulement lorsque le donateur offre en même temps sa pensée et son coeur que l'argent peut avoir quelque valeur. Qu'est-ce que l'argent donné avec indifférence, comparé à la sympathie? Exprimer sa confiance à quelqu'un peut lui donner le courage de recommencer et de vaincre; en excitant son ambition, nous l'aidons à s'aider lui-même, alors qu'une aide financière le rendrait irrémédiablement dépendant de notre générosité. Quand nous donnons, donnons-nous d'abord nous-mêmes.
L'éthique de la façon de donner et la leçon spirituelle qu'il procure au donateur sont admirablement mis en évidence dans "La Vision de Sir Launfal" de Lowell. Le jeune et ambitieux chevalier, Sir Launfal, revêtu d'une armure éclatante et montant un splendide destrier, quitte son château à la recherche du Saint-Graal. Sur son écu brille la croix, le symbole de la bonté et de la tendresse de notre humble et doux Sauveur; mais le coeur du Chevalier est rempli d'orgueil et d'arrogant dédain pour les pauvres. Il rencontre un lépreux demandant l'aumône et, avec un regard méprisant, lui jette une pièce, comme on jetterait un os à un chien affamé; mais le lépreux ne ramassa pas l'or tombé dans la poussière:
"Mieux vaut pour moi la croûte du pauvre,
Mieux vaut pour moi sa bénédiction,
Même si je quitte sa porte les mains vides.
L'aumône que la main peut tenir est sans valeur;
Celui qui donne par sentiment du devoir
Ne donne qu'un métal dont l'éclat est trop vain.
Mais celui qui partage son maigre avoir
Et donne à ce Tout qui échappe à la vue,
A cette trame qui unit le monde, la Beauté
Qui, reliant toute chose, à tout est étendue,
La main ne peut étreindre son don entier;
Le coeur se tend, avide, pour le recevoir,
Car un dieu accompagne cette aumône et la rend abondante
Pour l'âme qui, auparavant, mourait de faim dans l'ombre".
A son retour, Sir Launfal trouve quelqu'un d'autre en possession de son château; on le chasse de l'entrée.
"Vieux, courbé, épuisé et fragile,
Il revient de sa quête du Saint-Graal
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Il s'inquiète peu de la perte de son comté,
Sur son manteau, la croix n'est plus blasonnée,
Mais au fond de son coeur il porte la marque,
L'insigne des souffrants et des miséreux.
De nouveau, il rencontre le lépreux qui renouvelle sa demande d'aumône. Cette fois la réponse est différente:
Et Sir Launfal dit: Je contemple en toi
L'image de Celui qui mourut sur la croix;
Tu as eu, toi aussi, ta couronne d'épines,
Toi aussi, tu as essuyé les coups et les mépris du monde,
Et dans ta vie n'ont pas été épargnées
Les blessures aux mains, aux pieds et au flanc;
Doux fils de Marie, reconnais-moi;
Vois, à travers lui, c'est à Toi que je donne!"
Un regard dans les yeux du lépreux éveille un souvenir; il le reconnaît, et
Son coeur en lui était cendre et poussière;
Il partagea en deux son unique croûte,
Il brisa la glace au bord du ruisseau,
Et tendit à manger et à boire au lépreux.
Une transformation s'accomplit:
Le lépreux n'était plus accroupi à son côté, mais se tenait devant lui, glorifié. (...)
Non lorsque nous donnons, mais quand nous partageons,
Car le don, sans celui qui donne, est stérile.
Celui qui se donne avec son aumône nourrit trois personnes:
Lui-même, son prochain affamé et moi-même".
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Il est deux catégories de personnes pour qui l'existence après la mort est particulièrement morne et monotone: les matérialistes, et les gens qui ont été si absorbés dans leur travail matériel qu'ils n'ont jamais accordé une pensée aux mondes spirituels. Inutile d'en chercher bien loin la raison. Ils ont mené généralement des vies bonnes et morales, sans tomber dans aucun de ces vices qui subissent leur épuration dans le purgatoire du monde inférieur du désir; mais ils n'ont fait non plus aucun bien, de ce bien qui trouverait son épanouissement dans les sentiments de bonheur éprouvés au premier ciel. Avoir donné même de grosses sommes d'argent pour la construction d'églises, de bibliothèques ou de parcs ne servirait à rien làhaut, à moins que le donateur n'ait pris un intérêt particulier à sa donation et ne se soit ainsi donné lui-même avec son argent. Donner simplement de l'argent apportera l'abondance dans une vie future; mais se donner soi-même est mieux que l'argent, c'est du développement spirituel. C'est pourquoi l'homme d'affaires matérialiste va dans la quatrième région, qui est une sorte de région limitrophe entre le purgatoire et le premier ciel. Il est trop bon pour souffrir au purgatoire , et pas assez bon pour vivre au premier ciel. Il a encore un fort désir pour "les affaires"; et comme il n'a d'autre intérêt que des désirs impossibles à satisfaire en cette région, sa vie y est d'une monotonie peu enviable, bien qu'il ne souffre en aucune autre manière.
Le matérialiste complet, qui nie Dieu et pense que la mort est un anéantissement, est dans la pire détresse. Il voit son erreur; mais étant complètement étranger aux idées spirituelles, il ne peut croire qu'il s'agisse d'autre chose que d'un prélude à l'anéantissement. Ce doute terrifiant pèse affreusement sur ces gens, et il n'est pas rare de les voir aller et venir en murmurant: "Est-ce bientôt la fin?" Et même, si quelqu'un qui est au courant essaie de les renseigner, ils nient toujours l'existence de l'esprit, là autant que pendant leur vie sur terre, traitant de visionnaire l'esprit qui croit à l'existence dans l'au-delà.
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La tendance anturelle du corps du désir est de durcir et de solidifier toutes les choses avec lesquelles il entre en contact. La pensée matérialiste accentue cette tendance à tel point qu'elle aboutit souvent, dans les vies ultérieures, à cette redoutable maladie, la tuberculose pulmonaire, alors que les poumons devraient normalement rester mous et élastiques. Il arrive aussi parfois que le corps du désir écrase le corps vital dans la vie suivante, si bien que celui-ci cesse tout à fait de s'opposer au processus d'induration: nous avons alors la phtisie galopante. Dans certains cas, le matérialisme rend le corps du désir fragile et cassant; il ne peut alors mener à bien son travail normal de solidification du corps dense; le résultat en est le" rachitisme", où les os se ramolissent. Nous voyons donc quels dangers nous courons en entretenant des tendances matérialistes: tantôt l'induration de parties molles du corps comme dans la tuberculose, tantôt le ramollissement des tissus osseux durs, comme le rachitisme. Bien entendu, tous les cas de tuberculose ne signifient pas que le malade était un matérialiste dans une vie antérieure, mais la science occulte nous apprend que c'est là le résultat fréquent du matérialisme. Il est d'ailleurs, à l'existence de ce mal redoutable, une autre cause qui remonte au moyen âge.
Avec le temps, chaque décédé se prépare à monter au deuxième ciel, qui est situé dans la région de la pensée concrète. Toutes les bonnes aspirations et tous les bons désirs de la vie passée sont marqués et gravés sur l'intellect, qui contient alors tout ce qui possède une valeur permanente. L'Ego se retire du corps du désir, qui n'est plus désormais qu'une coquille vide; et, revêtu seulement du mental, il monte au deuxième ciel.
Nous avons vu que lorsque l'Ego, après la fin du panorama qui suit immédiatement la mort, a quitté le corps vital, il est passé par une période d'inconscience avant de s'éveiller dans le monde du désir.
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Il y a de même un intervalle entre l'abandon du corps du désir dans le premier ciel et le réveil dans le deuxième ciel. Mais cette fois il n'y a plus d'inconscience; chaque faculté est vive et éveillée; il existe un état d'hyperconscience pendant que l'esprit passe par cet intervalle, dénommé "Le Grand Silence". Peu importe à quel point un homme a pu être matérialiste sur la Terre, cet état de pensée a maintenant disparu; et c'est être sait qu'il est divin par nature, lorsqu'il atteint ce Grand Silence, qui est la porte de sa maison céleste. C'est alors comme un réveil après un rêve plein d'épouvante, suivi d'un soupir de soulagement de trouver que les éléments du rêves n'avaient rien de réel. Ainsi l'Ego, lorsqu'il entre dans le Grand Silence, s'éveille des erreurs et des illusions de la vie terrestre avec un sentiment d'allègement infini; il se sent plein d'une indéfectible sécurité; il éprouve à nouveau le repos plein de détente de se retrouver dans les bras éternels du Grand Esprit universel.
C'est là que parviennent à l'oreille de l'Ego les indescriptibles harmonies de la musique céleste qui remplit sans cesse cette Région. Ce n'est point un trait de notre imagination que de parler de musique céleste, bien qu'il soit inexact de penser que les morts qui possédaient peu ou point le sens de la musique pendant leur vie terrestre, aient pu soudain au moment de la mort développer une passion pour la musique, ainsi que la faculté de l'exprimer. En fait, le monde de la pensée où est situé le deuxième ciel, est aussi le domaine du son, comme le monde du désir est le monde de la lumière et de la couleur, et comme le monde physique est celui de la forme. L'artiste prend ses thèmes de couleur et ses effets de lumière dans le monde du désir; mais le musicien doit tirer ses inspirations du monde plus subtil de la pensée, et c'est là où nous trouvons la raison qui fait de la musique l'art le plus élevé que nous possédions. Le peintre puise dans un monde mieux à la portée de la main, et peut ainsi fixer sa création une fois pour toutes sur la toile, où elle sera vue de tous ceux qui ont des yeux, et n'importe quand.
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La musique ne peut être ainsi fixée; elle est plus insaissisable; elle doit être recréée chaque fois, et s'évanouit aussitôt dans le silence. En revanche, combien son pouvoir de nous parler est plus grand que celui du plus beau tableau! car elle vient directement du monde céleste, fraîche et parfumée des échos du domaine de l'Ego, éveillant le souvenir et nous mettant en contact avec ce que, si souvent, nous oublions dans notre existence matérielle. Voilà pourquoi la musique, au-dessus de tous les arts humains, a seule le pouvoir de toucher le plus endurci des êtres et de nous émouvoir comme rien d'autre ne saurait le faire.
Goethe était un initié, et son "Faust" met à deux reprises en évidence le fait que, dans les mondes célestes, tout peut être ramené à l'expression de sons. La scène d'ouverture est située au ciel, et l'Archange Raphaël est représenté disant:
"Le soleil, entonnant sa chanson de toujours, Parmi les chants rivaux de tous ses astres-frères Se hâte sur le cours que lui prescrit la Loi, En grondant, à travers les ans, comme un tonnerre". Et dans la seconde partie, nous lisons:
"Et c'est le son qui, à l'oreille de l'esprit, Proclame que le jour qui doit venir est proche. Des craquements secouent les barrières de roche, Et les roues de Phébus chantent dans les ornières; Quelle immense clameur apporte la lumière!"
La "musique des sphères" de Pythagore est une réalité au deuxième ciel; et pour certains musiciens ce n'est pas là une idée étrange, car ils savent que chaque ville, chaque lac est chaque forêt a sa tonalité particulière. Le babil du ruisseau, et le zéphir d'été qui agite les jeunes feuilles dans les bois, parlent le langage de l'âme universelle. Le vrai musicien entend cette grande voix majestueuse dans le torrent des montagnes et dans la tempête sur l'océan; aucune conception purement intellectuelle de Dieu, de la vie et des choses hyperphysiques ne pourra jamais monter jusqu'aux sublimes hauteurs qu'il atteint parce qu'il sait.
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Au purgatoire, les habitudes et actions mauvaises de la vie ont produit de la souffrance, qui s'est transformée en Sentiment juste au premier ciel. Le bien de la vie passée a été extrait dans ce premier ciel; et quand l'Ego entre au deuxième ciel, il médite sur ce bien de manière à le transformer en Pensée juste, qui sera son guide dans ses vies futures sur la Terre. Ainsi, à chaque nouvelle naissance, l'Ego apporte avec lui la sagesse accumulée puisée dans les expériences de toutes ses vies passées, sagesse qui est son capital. L'expérience de chaque vie nouvelle en constitue les intérêts qui, au deuxième ciel, sont ajoutés au capital.
Là, l'homme se prépare aussi à sa prochaine immersion dans la matière; il s'apprête pour une nouvelle bataille contre l'ignorance, pendant son prochain jour de vie dans la grande école de Dieu. S'il n'avait pas pu réaliser certaines ambitions honorables, il voit en quoi il a fait erreur, ce qui lui apprend à mener à bien la prochaine fois ses desseins selon des voies meilleures. Le musicien emporte avec lui des mélodies plus sublimes lorsqu'il retourne réjouir les coeurs des hommes pendant leur exil dans la vie terrestre. Le peintre emporte de nouvelles aspirations, car il ne faudrait pas supposer que le deuxième ciel est dépourvu de couleur parce qu'on l'a dénommé la région du son. On y trouve à la fois la couleur et la forme, comme dans le monde physique, mais le son est le trait dominant du monde de la pensée. C'est la couleur surtout qui domine dans le monde du désir, et la forme dans le monde physique; Mais il est certain que couleurs et formes sont beaucoup plus belles dans le deuxième ciel que dans aucun de ces deux autres mondes.
Nous avons parlé de ce processus de méditation et d'assimilation de la partie bonne et durable des expériences de la vie passée, comme si ce processus était négatif;
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et beaucoup d'étudiants s'imaginent que l'existence au deuxième ciel est une expérience pleine de rêves et d'illusions. Rien n'est plus faux, car nombreuses sont les formes d'activité positive dans la vie au ciel. L'homme non seulement récapitule ou revit son passé, mais prépare aussi activement son avenir.
Nous avons l'habitude de parler d'évolution: mais avons-nous jamais analysé ce qui fait l'évolution, et pourquoi elle ne s'arrête pas, et ne demeure pas en état de stagnation? Nous devons nous rendre compte de l'existence de forces derrière le monde visible, qui produisent les altérations de la flore et de la faune ainsi que les changements climatiques et topographiques constamment en cours. Et il est tout naturel de se demander; que sont ou qui sont les forces ou agents de l'évolution?
Evidemment, nous savons que les hommes de science en donnent certaines explications mécaniques. Ils méritent une grande estime, ils ont accompli beaucoup de choses, si nous considérons que la science n'est qu'un petit enfant disposant seulement de cinq sens et d'ingénieux instruments. Ses déductions sont merveilleusement justes - mais cela ne veut pas dire qu'il n'y ait point des causes profondes qu'elle ne peut encore percevoir, mais qui donnent une meilleure compréhension de la question que les simples explications mécaniques. Un exemple illustrera ce point.
Deux hommes sont en conversation quand soudain l'un d'eux, frappant l'autre du poing, le jette à terre. Nous avons là un événement, un fait, et nous pouvons l'expliquer de manière mécanique en disant: "J'ai vu l'un des hommes contracter les muscles de son bras, donner un coup à l'autre et le jeter à terre". C'est une version exacte, jusque-là; mais le savant occultiste verrait aussi la pensée de colère qui a inspiré le coup, et donnerait une version plus complète en disant que l'homme a été jeté à terre par une pensée, car le poing fermé n'a été que l'instrument irresponsable de l'agression. Si la force impulsive de la pensée de colère avait manqué, la main serait restée inerte et le coup n'aurait jamais été porté.
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Ainsi la science occulte rapporte toutes causes à la région de la pensée concrète, et dit comment elles sont créées par des esprits humains ou suprahumains.
Les modèles ou archétypes, créateurs de tout ce que nous voyons dans le monde des sens, sont dans le monde de la pensée qui est le monde du son: ceci nous amène à comprendre que les forces archétypales jouent constamment sur ces archétypes, leur faisant émettre certains sons; ou même, lorsqu'un certain nombre d'entre eux ont été groupés pour créer une espèce de plante, ou des formes animales ou humaines, les différents sons se fondent en un grand accord unique. Cet unique son, ou accord selon le cas, est alors la tonique de la forme ainsi créée, et tant qu'elle résonne, la forme ou l'espèce peut durer; quand elle cesse, la forme unique meurt ou l'espèce s'éteint.
Un mélange de sons n'est pas plus de la musique que des mots réunis au hasard ne forment une phrase; mais le son rythmiquement ordonné est le vrai constructeur de tout ce qui existe, comme Jean le dit dans les premiers versets de son Evangile: "Au commencement était le Verbe... et rien n'a été fait sans Lui"; et encore: "Le Verbe a été fait chair".
Nous voyons donc que le son est le créateur et le soutien de toutes les formes; et au deuxième ciel l'Ego s'unit avec les forces de la Nature: Avec elles, il travaille sur les archétypes des terres et des océans, sur la flore et la faune, pour accomplir les changements qui graduellement modifient l'aspect et l'état de la Terre; ainsi se forme un nouveau milieu créé par l'Ego lui-même, et dans lequel il pourra récolter de nouvelles expériences.
Il est dirigé dans ce travail par de grand maîtres appartenant aux Hiérarchies créatrices, qui portent les noms d'Anges, d'Archanges ou d'autres noms, et qui sont les ministres de Dieu. Ils l'instruisent alors consciemment dans l'art divin de la création, en ce qui concerne à la fois le monde et les objets qu'il contient.
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Ils lui apprennent comment construire une forme pour lui-même, lui donnant pour aides les "esprits de la nature", et l'homme fait ainsi son apprentissage de Créateur chaque fois qu'il va au deuxième ciel. C'est là qu'il construit l'archétype de la forme qu'il extériorisera plus tard à sa naissance.
Dans la troisième conférence, nous avons parlé des quatre éthers, et nous avons dit que les forces d'assimilation travaillent dans l'éther chimique. Ce sont les Egos du monde céleste qui constituent ces forces: ces mêmes gens que nous appelons les morts sont donc précisément ceux qui construisent nos corps et nous aident à vivre. Notons aussi que personne ne peut avoir un corps dense supérieur à celui qu'il peut construire. Ceux qui font des erreurs au ciel s'en aperçoivent lorsqu'ils en viennent à user de ce corps défectueux sur la Terre; et ils apprennent ainsi à corriger l'erreur la fois suivante.
Ceci nous remet en mémoire une phase intéressante de la Loi de cause à effet, dans le cas d'Egos qui ont besoin d'un corps de construction particulière; chez les musiciens, par exemple, non seulement la main, mais aussi l'oreille, doivent être spécialement ajustées; les trois canaux semi-circulaires doivent en effet pointer aussi exactement que possible vers les trois dimensions de l'espace, et les fibres de Corti être exceptionnellement délicates. Un tel instrument ne peut être formé de matériaux trop grossiers, aussi un tel Ego doit-il naître dans une famille où d'autres l'ont déjà construit selon des données semblables - ce qui n'est pas toujours facile à trouver.
Et maintenant, supposons qu'une occasion s'offre cent ans avant le moment où un tel Ego devrait normalement renaître, et que les Anges de Justice qui ont la charge d'appliquer la Loi de cause à effet voient qu'une autre occasion ne se présentera pas avant peut-être trois cents ans: cet Ego peut alors être amené à naître cent ans avant le temps normal; et la perte du temps passé au ciel sera compensée une autre fois. Nous voyons donc que vivants et soi-disant morts agissent sans cesse les uns sur les autres, tandis qu'ils avancent sur le chemin de l'évolution.
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Ayant ainsi progressé à travers le deuxième ciel, l'Ego se retire enfin de la gaine que lui formait le mental; désormais complètement libre et sans entraves, il entre dans le troisième ciel, qui est le point le plus élevé auquel l'homme puisse atteindre dans son degré actuel de développement. C'est là que nous le suivrons dans notre prochaine conférence.
DIAGRAMME: "UN CYCLE DE VIE" -- CLIQUER ICI.
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Lorsque nous avons quitté l'Ego au cours de son pèlerinage à travers les mondes invisibles, nous avions atteint le point où il entrait dans le troisième ciel, après avoir abandonné son corps dense à la mort, son corps vital peu de temps après, et son corps du désir en quittant le purgatoire et le premier ciel; finalement, avant de sortir du deuxième ciel, il abandonne aussi derrière lui la gaine de l'intellect, pour entrer dans le troisième ciel, absolument libre et sans rien qui l'encombre. Tous les véhicules abandonnés se détruisent, seul persiste l'Esprit, baignant pendant un temps dans le grand réservoir de force spirituelle que nous appe lons le troisième ciel, de manière à se fortifier pour sa prochaine renaissance à la vie sur Terre.
Sir Edwin Arnold a merveilleusement traduit cette idée dans son "Chant Céleste":
Jamais l'Esprit n'a eu besoin de naître,
Jamais l'Esprit ne pourra cesser d'être.
Ne connaissant pas de bornes dans le temps.
Fin et genèse aussi ne sont que rêves;
Ni né ni mort, l'Esprit vit à jamais,
La mort en rien n'a jamais pu l'atteindre
Même quand sa demeure nous paraît morte.
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Ainsi que l'homme, ayant ôté
Son vieil habit longtemps porté,
En en prenant un autre, dit:
"Aujourd'hui je mets celui-ci";
Ainsi l'Esprit va se défaire
De l'habit de chair, doucement;
Prendre son vol, pour hériter
D'une demeure plus belle.
La loi de cause à effet détermine notre existence après la mort selon la vie que nous avons menée ici-bas. Si dans la vie terrestre nous nous sommes surtout adonnés aux désirs bas et aux passions basses, notre existence au purgatoire sera la partie la plus animée de notre évolution après la mort, et l'existence dans les différents ciels sera terne et insipide. Si nous avons eu des émotions élevées, la vie dans le premier ciel sera le plus riche de nos différents séjours. Si nous aimions à faire des projets en vue d'améliorations et que notre mental ait élé constructif dans la vie terrestre, nous tirerons un grand bénéfice de notre séjour dans le deuxième ciel, où la pensée concrète est la base des choses concrètes sur Terre. Mais pour avoir une existence consciente dans le troisième ciel, nous devons avoir consacré du temps et des efforts à des pensées abstraites sans relation avec le temps et l'espace.
La plupart d'entre nous sont incapables de pensées abstraites, et c'est pourquoi la conscience nous manque dans le troisième ciel. Si nous pensons à l'"Amour", nous l'associons à quelque personne. Nous n'aimons pas les mathématiques parce qu'elles sont sèches, sans émotion et abstraites. Aucune sensation n'accompagne l'énoncé que deux fois deux font quatre, mais c'est le fait en lui-même qui revêt une valeur, car lorsque nous nous élevons au-dessus du sentiment, nous laissons derrière nous nos tendances, et la vérité se révèle aussitôt. Personne ne dirait que deux fois deux font cinq, ou ne se querellerait sur la proposition que le carré de l'hypoténuse est égal à la somme des carrés des deux autres côtés d'un triangle. Telle est la raison pour laquelle Pythagore et d'autres maîtres spirituels demandaient que les candidats à l'enseignement eussent d'abord quelques connaissance en mathématiques.
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Un mental habitué à être aux prises avec les mathématiques est entraîné à suivre une pensée et capable de distinguer la vérité de l'erreur; et seul un tel mental peut recevoir en toute sécurité un enseignement ésotérique.
La grande majorité des gens n'ont pas encore dépassé le degré où ils progressent convenablement dans une direction dite "pratique", et pour eux le troisième ciel n'est qu'un lieu d'attente où ils sont inconscients, comme dans le sommeil, jusqu'à ce que les temps soient mûrs pour une nouvelle naissance. L'homme, par exemple, qui a vécu une vie basse vouée à la satisfaction des sens, qui aime détruire, aura une vie de souffrances au purgatoire, parce qu'il a été très mauvais; il passe rapidement et inconsciemment à travers le premier ciel parce qu'il n'a fait aucun bien. Ses tendances destructives rendent sa vie au deuxième ciel à peu près inconsciente; et il ne peut avoir absolument aucune existence au troisième ciel, où les Egos avancés développent des idées originales qui se manifesteront sous forme de génie pendant leur vie sur Terre. Un tel Ego arriéré reste donc endormi jusqu'au moment d'une nouvelle incarnation, où il se réveille pour un nouveau jour à l'Ecole de la Vie, et avec une nouvelle chance d'amélioration.
Nous entendons souvent des gens dire, au premier exposé de cette doctrine:" Oh, mais je ne veux pas revenir!" C'est là le cri d'un coeur las et fatigué, conséquence d'une vie dure; mais dès que l'expérience de cette même vie a été assimilée au ciel, la loi de cause à effet et le désir d'obtenir plus de connaissance ramènent l'Ego vers la Terre, comme un aimant attire l'aiguille, et il commence à envisager une renaissance.
Ici encore, la loi de cause à effet est le facteur déterminant, la nouvelle naissance étant conditionnée par nos vies passées.
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Comme nous avons vécu de nombreuses fois, il est évident que nous avons rencontré bien des gens et eu avec eux des relations variées, les touchant en bien ou en mal; ou au contraire ce sont eux qui ont agi sur nous. C'est ainsi que sont nées entre eux et nous des relations de cause à effet, dont beaucoup sont restées en quelque sorte "en friche", vu l'impossibilité de produire leurs effets pour une raison ou pour une autre.
L'invariabilité de la Loi exige que ces causes trouvent un jour leur consommation; et c'est pourquoi les Anges de Justice, qui sont les grandes Intelligences chargées de la loi d'ajustement, passent en revue le passé de chaque homme lorsqu'il est prêt pour une nouvelle naissance; ils recherchent aussi quels sont ses amis ou ennemis vivants à ce moment, et où ils se trouvent. Comme nous avons eu un nombre énorme de telles relations dans notre passé, il y a généralement plusieurs groupes de ces personnes qui vivent sur la terre; s'il n'existe aucune raison spéciale pour prendre un de ces groupes en particulier, les Anges de Justice donnent à l'Ego le choix dans les occasions qui se présentent. Ils sélectionnent dans chaque cas toute la causalité mûre que l'Ego y devra mener à bien; ils montrent à l'Ego en une série d'images un panorama de ce que serait sa prochaine existence dans chacune des vies proposées, l'Ego pouvant choisir n'importe laquelle. Ces panoramas vont du berceau à la tombe et donnent les grandes lignes de la vie; mais ils laissent à l'Ego le soin d'en remplir les détails en agissant selon son libre arbitre.
L'Ego a donc une certaine latitude en ce qui concerne le lieu de sa naissance; aussi peut-on dire que, dans la grande majorité des cas, nous nous trouvons où nous sommes par notre propre choix. Peu importe que nous ne le sachions pas; l'Ego, encore faible, incapable de percer librement le voile de la chair, dépend largement encore de sa personnalité inférieure pour l'aider à grandir. Mais plus nous nous déciderons à vivre pour le moi supérieur, plus tôt viendra le jour où l'Ego brillera à travers ce voile, et alors nous pourrons savoir.
Quand l'Ego a fait son choix, il est lié par ce choix pour mener à bien le règlement des dettes contractées dans les vies antérieures et maintenant mûres pour leur liquidation.
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Ainsi est formée la destinée, c'est-à-dire les conditions rigoureuses de la vie, qui sont impossibles à changer. Toute tentative pour le faire sera sûrement déjouée. Mais que personne ne tombe dans l'erreur de croire que sa destinée l'oblige à faire le mal! La loi ne joue que pour le bien; comme nous l'avons vu, le mal de chaque vie est la première chose qui soit corrigée après la mort; il ne reste qu'une tendance vers ce mal particulier, mais avec un sentiment d'aversion créé par la souffrance éprouvée pendant le travail d'épuration. Quand nous vient, dans une vie ultérieure, la tentation de commettre un acte mauvais de même genre, cette sensation de douleur passée, que nous appelons la conscience, nous avertit et nous empêche de succomber à la tentation. Si nous succombons en dépit de cet avertissement, la douleur que nous éprouverons au purgatoire s'ajoutera à la sensation antérieure et la renforcera, jusqu'à ce que la conscience ait atteint la stabilité nécessaire pour résister au mal en question; à partir de ce moment, celui-ci cessera d'être une tentation pour nous.
Nous voyons donc que nul n'est jamais prédestiné à faire le mal; chaque acte mauvais est un acte de libre arbitre, commis malgré la résistance de la conscience que nous avons antérieurement pu développer.
La question réglée en ce qui concerne sa prochaine renaissance, l'Ego descend d'abord dans la région de la pensée concrète, et commence à rassembler lui-même les matériaux d'un nouvel intellect.
Comme nous l'avons déjà vu, l'homme dans le cours de son existence d'après-vie abandonne ses différents corps, et ces corps se détruisent; mais de chacun d'eux est conservé un atome, ainsi qu'un atome de l'intellect; et ce sont ces "atomes-germes" qui constituent les noyaux des nouveaux corps dans lesquels l'esprit apparaîtra dans sa vie future.
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Et maintenant, quand l'Ego descend dans la région de la pensée concrète, les forces latentes dans l'atome-germe de l'intellect des vies antérieures entrent en activité; il commence à attirer les maétriaux nécessaires pour créer un nouvel intellect, comme un aimant attire la limaille de fer autour de ses pôles. Si nous tenons un aimant au-dessus d'un amas de débris de cuivre, de fer, d'or, de plomb, d'argent, de bois, nous verrons qu'il prend seulement la limaille de fer, et aussi qu'il n'en prend qu'une certaine quantité, selon sa puissance. Sa force attractive est limitée à une certaine quantité d'une matière particulière. Il en est de même pour l'atome-germe: il ne peut attirer dans chaque région que les matériaux avec lesquels il est en affinité, et seulement en quantité définie. Ces matériaux prennent la forme d'une grande cloche, ouverte à la base, et portant l'atome-germe à son sommet. On peut comparer le tout à une cloche à plongeur, plongeant dans un océan de densité graduellement croissante. Les matériaux pris dans chaque monde et incorporés à la cloche sjoutent à son poids, l'obligeant à s'enfoncer ainsi de plus en plus jusqu'à ce qu'elle atteigne le fond.
Ainsi donc, l'Ego qui revient s'enfonce à travers la région de la pensée concrète, et au passage l'atome-germe rassemble les matériaux du nouvel intellect.
La descente continue. L'Ego, revêtu de substance mentale en forme de cloche, plonge dans le monde du désir; les forces de l'atome-germe, extrait du corps du désir antérieur, sont éveillées et placent l'atome à l'intérieur et au sommet de la cloche. De là, il attire la qualité et la quantité de matériaux nécessaires pour fournir, à l'Ego qui revient, un nouveau corps du désir approprié à ses besoins particuliers. Quand la région la plus dense du monde du désir est atteinte, la cloche présente deux couches, la couche de matière mentale à l'extérieur et les matériaux du corps du désir à l'intérieur.
Le prochain pas dans la descente amène l'Esprit dans la région éthérique, où il rassemble les matériaux d'un nouveau corps vital; d'une partie de ces matériaux, les agents des Anges de Justice façonnent un moule qui est placé dans l'utérus de la mère pour donner une forme appropriée au nouveau corps dense, tandis que l'atome-germe est placé dans la semence paternelle.
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Sans la présence de ces deux facteurs, aucune union sexuelle ne donnerait de résultats; et quand un mariage est stérile, bien que les deux conjoints soient en bonne santé et désireux d'avoir des enfants, cela signifie simplement qu'aucun Ego en voie d'incarnation n'est attiré vers eux.
Dès que le corps vital a été mis en place, l'Ego qui revient, revêtu de son enveloppe en forme de cloche, plane continuellement près de la future mère. Celle-ci fait seule le travail sur le nouveau corps pendant les dix-huit à vingt et un jours qui suivent la fécondation; puis l'Ego entre dans le corps de la mère, coiffant le foetus de son enveloppe en forme de cloche; l'ouverture de la base se ferme, et l'Ego est à nouveau enfermé dans la prison du corps dense.
Le moment de l'entrée dans le sein maternel est un des plus importants de la vie. Quand l'Ego qui s'incarne entre en contact avec le moule du corps vital dont nous venons de parler, il y revoit le panorama de la vie qui l'attend; celui-ci a été gravé sur le corps vital par les Anges de Justice pour donner à l'Ego les tendances nécessaires pour s'acquitter de la destinée mûre qu'il doit liquider dans sa vie nouvelle.
A ce moment, l'Ego est déjà tellement aveuglé par le voile de matière qu'il ne peut reconnaître, aussi clairement que lorsqu'il faisait son choix dans la région de la pensée abstraite, le bien final envisagé pour lui. Aussi quand une vie particulièrement dure se révèle à la vision de l'Ego qui revient, au moment d'entrer dans la matrice, il arrive parfois que l'Ego en est tellement saisi et effrayé qu'il tente de s'échapper. La liaison ne peut cependant être rompue, mais elle peut être relâchée; au lieu du corps vital concentrique au corps physique, la tête du corps vital se trouve au-dessus de la tête du corps dense; il en résulte l'idiotie congénitale.
Dans les conditions les plus favorables, l'effort est déjà grand pour l'Ego de traverser la période de gestation; et les parents devraient tout faire pour ne pas l'aggraver plus qu'il n'est nécessaire.
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Nous ne pouvons jamais savoir où est le point de rupture; l'absence d'harmonie dans les relations des parents pendant les périodes critiques de la gestation, particulièrement la première période, peut avoir parfois des conséquences graves.
Avant l'événement que nous appelons la naissance, l'homme futur est enfermé dans un autre corps, celui de la mère, et ne peut donc prendre contact directement avec le monde des sens. Cette retraite est nécessaire pour amener l'organisme au point voulu de maturité, où il sera apte à recevoir lui-même toutes les impressions. Quand ce point est atteint, l'enveloppe protectrice de l'utérus s'ouvre et la nouvelle créature humaine fait son entrée sur la scène du monde.
Comme nous l'avons vu, l'homme est bien autre chose qu'un simple corps dense; et il ne faut pas s'imaginer que ses autres véhicules sont tout aussi mûrs lorsqu'il naît dans le monde physique. En effet, ils ne le sont pas; le corps vital grandit et mûrit à l'intérieur de son enveloppe d'éther jusqu'à la septième année, ou jusqu'au changement de dentition. Le corps du désir a besoin d'être protégé contre les attaques du monde du désir jusqu'à sa naissance, vers la quatorzième année, au moment que nous appelons la puberté. Quant à l'intellect, il n'est pas assez mûr pour être libéré de son enveloppe protectrice avant que l'homme atteigne sa majorité à vingt et un ans. Ces périodes ne sont qu'approximatives, car chaque personne diffère des autres en ce qui concerne leur exactitude, mais celles que nous donnons sont assez précises.
La raison de ce lent développement des véhicules supérieurs repose sur le fait qu'ils sont des apports relativement récents à l'organisme de l'Ego; et le corps dense, au contraire, a la plus longue évolution, et il est de loin l'instrument le plus parfait et le plus précieux que nous possédions. Parfois certaines personnes qui ont récemment appris l'existence des véhicules supérieurs, parlent ou rêvent sans cesse de la joie de s'envoler dans le corps du désir, et de quitter leur "bas" et "vil" corps dense;
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cela montre qu'elles n'ont pas encore appris à apprécier la différence entre "supérieur" et "parfait". Le corps dense est une merveille de perfection, avec son squelette solidement articulé, ses délicats organes des sens, son mécanisme coordonnateur de nerfs et cerveau qui le rend supérieur à tout autre mécanisme du monde. Considérez-le en détail; examinez par exemple le grand os de la cuisse, le fémur, et regardez ses épaisses extrémités. Si vous le fendez, vous verrez que seule une mince couche extérieure est faite d'os compact. Celui-ci est renforcé par des rayons et des traverses d'os spongieux qui lui donnent une solidite prodigieuse et une légèreté qui dépassent les possibilités du plus grand architecte au monde.
Nous nous rendons compte qu'un jour, dans un lointain avenir, nos véhicules supérieurs atteindront à une perfection bien au-dessus de celle de notre corps dense: mais nous devons nous rappeler qu'actuellement ils sont plus ou moins organisés, et de peu de valeur quand il sont détachés de notre parfait organisme physique. Nous devrions en toutes choses rendre grâces aux Etres Sublimes qui nous ont aidés à développer ce splendide instrument, grâce auquel nous fonctionnons maintenant dans le monde comme des êtres humains conscients et menons à bien nos destinées, vie après vie, en devenant chaque fois un peu plus semblables à notre Père Céleste.
Nous voyons donc que la naissance comporte quatre phases successives; pour bien remplir notre devoir d'éducateurs, il est absolument nécessaire que nous sachions et connaissions les faits qui en découlent. Nous ne pouvons pas arracher de la matrice le foetus avant la naissance, et l'exposer aux chocs du monde extérieur; agir ainsi le tuerait. Il est également dangereux de rompre les matrices des corps invisibles et d'exposer l'enfant avant maturité aux chocs du monde moral et mental; bien qu'une telle façon d'agir ne tue pas toujours le corps dense, elle trouble toujours ses facultés, car ce qui blesse un corps est toujours nuisible aux autres véhicules.
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Pour bien élever un enfant, il est donc nécessaire d'avoir une notion de l'effet de l'éducation sur les différents véhicules, et des justes méthodes à employer; il faut cependant constamment avoir présent à l'esprit que les règles générales ne sont pas toujours applicables à des cas individuels .
Nous avons vu que, quand l'Ego a terminé son temps à l'école de la vie, la force centrifuge de répulsion lui fait rejeter à la mort son véhicule physique, puis le corps vital qui est le plus dense après lui. Au purgatoire ensuite, la matière-désir la plus dense accumulée par l'Ego pour y incorporer ses désirs les plus bas, a été expurgée par cette force centrifuge. Dans les mondes supérieurs seulement, la force d'attraction domine et conserve le bien par action centripète, qui tend à tout attirer de la périphérie vers le centre.
C'est aussi cette force centripère d'Attraction qui gouverne pendant que l'Ego revient vers sa nouvelle naissance. Nous savons que nous pouvons jeter une pierre plus loin qu'une plume. C'est pourquoi la matière la plus dense a été rejetée à l'extérieur après la mort par la force de répulsion. Pour la même raison, la matière la plus dense, dans laquelle l'Ego qui revient incorpore sa tendance au mal, est projetée en tourbillons à l'intérieur, vers le centre, par la force centripète d'Attraction. Résultat: à la naissance d'un enfant tout ce qui est le meilleur et le plus pur apparaît à l'extérieur. Le mal latent ne se manifeste pas habituellement avant la naissance du corps du désir, vers l'âge de quatorze ans, où les courants dans ce véhicule commencent à s'épancher vers l'extérieur, venant du foie. A ce moment l'Ego commence à "vivre" sa vie individuelle et montre ce qu'il contient.
Les astres sont l'horloge de la destinée: ils montrent les tendances cachées. Alors que les astrologues peuvent se tromper dans la prédiction des événements, un bon astrologue peut révéler exactement le caractère d'une personne dans 99 pour 100 des cas. Les parents peuvent ainsi obtenir un guide pour le côté caché de la nature d'un enfant.
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Mais il faut bien peu d'aptitudes pour établir un thème astrologique, et il est toujours préférable pour les parents d'apprendre à le faire plutôt que d'avoir recours à des tiers; ils auront ainsi une compréhension bien plus profonde du caractère de leur enfant.
A la naissance physique, le corps dense commence à sentir les contacts avec le monde extérieur, qui agit sur lui comme le faisaient auparavant les forces du corps maternel. Ce que celles-ci faisaient pendant la vie prénatale, les contacts avec les éléments continuent à le faire pendant toute la vie physique. Jusqu'à la septième année, ou au changement de dentition, se développe une activité particulière qui est largement différente des activités des époques suivantes de la vie. Les organes des sens prennent certaines formes définies qui leur donnent leurs structures de base et déterminent leur orientation dans une direction ou une autre. Ils grandissent plus tard, mais leur développement suit les voies tracées pendant ces sept premières années, et les fautes ou occasions négligées ne pourront jamais être réparées ou recouvrées après dans la vie. Si membres et organes ont pris des formes justes, l'ensemble après la croissance sera harmonieux; mais si une malformation s'est produite, le petit corps sera plus ou moins mal fait. C'est le devoir des parents de donner à l'enfant le milieu qui lui convient pendant cette période, comme la nature le fait avant la naissance; car cela seul peut donner à cet organisme sensible une direction et une croissance correctes.
Il y a deux mots magiques qui montrent la manière dont l'enfant entre en contact avec les influences formatrices de son entourage: "Exemple" et "Imitation". Il n'est pas de créature plus imitative que le petit enfant, et dans cette imitation réside la force qui donne tendances et direction à ce petit organisme. Tout, dans l'entourage de l'enfant, laisse son impression en bien ou en mal; et nous devrions nous rendre compte que le plus petit de nos actes peut faire un mal ou un bien incalculable dans la vie de nos enfants.
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Nous ne devrions jamais, en présence de l'enfant, faire un geste que nous ne voudrions pas le voir imiter.
Il est inutile de lui dire de ne pas faire attention, ou de moraliser durant cette période: "l'exemple" est le seul maître dont il ait besoin et qu'il écoute. Il ne peut pas plus s'empêcher d'imiter que l'eau de descendre la pente, car c'est là sa seule méthode de développement, à cette époque de sa vie. L'enseignement de la morale et de la raison vient plus tard; ce système d'éducation ressemblerait au fait de sortir un enfant du sein maternel avant terme; tout ce que l'enfant doit acquérir comme pensées, idées et imagination doit venir de lui-même, comme les yeux et les oreilles se sont développés avant la naissance du corps dense.
Il faut donner à l'enfant des jouets sur lesquels il puisse exercer sa faculté d'imitation; quelque chose de vivant, ou une poupée articulée qui puisse être mise en différentes positions, et que l'enfant habillera lui-même; de cette façon il exerce sa volonté créatrice de la bonne manière. Donnez aux garçons des outils et des modèles, ou des moules et de l'argile. Ne leur donnez jamais rien de fini, où ils n'aient rien à faire qu'à regarder: cela ne donnerait au cerveau aucune chance de se développer; or à cette époque l'objet des soins et le but de l'éducation doivent être de fournir à l'enfant les moyens de développer harmonieusement ses organes physiques.
En ce qui concerne la nourriture, il faut prendre beaucoup de soins pendant cette période, car l'appétit sera bon ou mauvais pendant toute la vie, selon la manière dont il aura été développé au cours du premier septénaire. Ici aussi l'exemple est un grand maître. Des plats trop assaisonnés abîment l'organisme; plus la nourriture est simple et exige une mastication soignée, plus elle développe un robuste appétit qui guidera l'homme à travers la vie et lui donnera une santé corporelle et une tranquillité d'esprit inconnues du gourmand. De toute façon, évitons d'avoir un plat pour nous-mêmes et un plat pour nos enfants. Nous pouvons empêcher ceux-ci d'en manger à la maison, mais nous créons une envie qui cherchera sa satisfaction quand l'enfant sera assez âgé pour avoir sa volonté personnelle: c'est alors que s'affirmera la faculté d'imitation.
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En ce qui concerne les vêtements, il faut toujours s'assurer que l'habillement de l'enfant ait bien la taille voulue, et le remplacer avant qu'il ne devienne trop petit et le gêne. Nombre de tendances immorales qui ont gâché une vie ont été d'abord éveillées par le frottement de vêtements trop petits, particulièrement chez les garçons. L'immoralité est une des plaies les plus graves et les plus tenaces de notre civilisation. Pour sauver nos enfants, nous devons y faire très attention, et chercher par tous les moyens à garder l'enfant inconscient de ses organes sexuels jusqu'à la septième année. Les punitions corporelles sont aussi un facteur extrêmement important du renforcement de la nature sexuelle, et l'on ne saurait trop les déplorer.
En ce qui concerne l'éducation du tempérament, il est certain que les couleurs ont la plus grande importance - bien qu'en la matière il faille non seulement connaître les effets des couleurs, mais plus particulièrement ceux des couleurs complémentaires; car ce sont ces dernières qui agissent dans l'organisme de l'enfant. Si nous avons affaire à une nature chaude et orageuse, nous pouvons la calmer et l'adoucir en l'entourant de rouge: chambre, meubles vêtements rouges produiront dans l'enfant l'effet rafraîchissant du vert, et calmeront ses nerfs. Par contre nous exciterons à agir et à vivre une nature mélancolique et léthargique en l'entourant de bleu ou de bleu-vert, qui crée dans les organes de l'enfant la chaleur vive du rouge et de l'orange.
Les rondes enfantines ont la plus grande importance pendant cette période. Le sens des paroles importe moins que le rythme; celui-ci a une importance capitale, car il construit les organes dans une harmonie que ne peut réaliser aucun autre moyen. C'est pourquoi le rythme, et aussi une atmosphère de gaieté, constituent les plus grands de tous les moyens d'éducation, et peuvent même suppléer dans une large mesure à l'absence de certains autres.
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Vers la septième année, le corps vital de l'enfant a acquis une perfection suffisante pour lui permettre de prendre contact avec le monde extérieur. Il quitte sa gaine protectrice d'éther et commence sa vie libre. Vient alors le temps où l'éducateur peut travailler sur le corps vital et l'aider à former mémoire, conscience, bonnes habitudes et une constitution harmonieuse. "Autorité" et "Instruction" sont les mots d'ordre de cette période, où l'enfant doit apprendre la signification des choses. Dans la première époque, il apprend que les choses existent, mais il ne faut pas l'ennuyer avec ce qu'elles signifient, sauf dans ce qu'il glane de lui-même. Dans la seconde époque, au contraire, de sept à quatorze ans, il est essentiel que l'enfant apprenne la signification des choses; mais il doit apprendre à les admettre selon l'autorité des parents et des maîtres, en fixant leurs explications dans sa mémoire plutôt qu'en raisonnant par lui-même; car la raison appartient à un stade ultérieur de développement et, bien que l'enfant puisse le faire de lui-même avec profit, il est mauvais à cette période de le forcer à penser.
Pour que l'enfant tire le meilleur profit de l'instruction que lui donnent parents et maîtres, il est naturellement nécessaire qu'il ait la plus grande vénération pour eux et admiration pour leur savoir. Il faut donc que nous nous comportions d'une manière qu'il puisse toujours retenir; car s'il voit en nous de la frivolité. s'il entend parler légèrement et observe une conduite généralement relâchée, nous le privons du meilleur soutien de l'effort dans la vie: la foi et la confiance dans les autres. C'est à cet âge que se font les désabusés et les sceptiques. Nous sommes responsables devant Dieu des vies confiées à nos soins, et nous aurons à répondre devant la loi de cause à effet si nous négligeons, par nonchalance, l'occasion qui nous est donnée de guider les premiers pas d'un de nos semblables dans le droit chemin; et l'exemple est toujours meilleur que les préceptes.
Les avertissements ont peu d'utilité. Montrons à l'enfant de vivants exemples des effets des vertus et des vices;
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peignons devant sa jeune imagination l'image d'un ivrogne ou d'un voleur, et aussi celle de saints personnages: cela affectera son corps vital de telle manière qu'il éprouvera une aversion pour les uns et un ardent désir d'imiter les autres.
A cette période, l'enfant doit aussi être instruit de l'origine de son être, afin qu'il soit bien préparé pour le temps orageux de la passion, qui rend l'adolescence si dangereuse; ces informations doivent aussi lui être données sous formes d'images mentales et d'exemples tirés de la nature, mais de manière à bien pénétrer l'enfant de la sainteté de cette fonction. C'est un devoir et une obligation pour lea parents d'éclairer convenablement l'enfant. Ne pas le faire serait comme le placer, les yeux bandés, parmi d'innombrables pièges, en lui recommandant de n'y pas tomber. Arrachez au moins le bandeau; l'enfant sera suffisamment handicapé sans lui.
Une fleur pourra être prise comme sujet d'étude, car comprendre le processus de la génération chez les plantes, c'est le comprendre chez l'animal et aussi chez l'homme. Evitons la faute de mettre l'enfant aux prises avec trop de noms comme étamines, anthères, pistil, etc. Nous manquerions notre objectif en fatiguant les enfants par cette étude. Ils aiment les contes de fées, et l'habile instructeur peut rendre l'histoire de la fleur plus fascinante qu'aucun conte de fées; il peut en outre donner à l'acte de la procréation un halo de beauté et de sainteté qui accompagnera l'enfant pendant toute sa vie pour le garder de la tentation quand les flammes de la passion surgiront autour de lui.
Nous savons qu'étamines et pollen sont masculins, carpelles et ovules féminins, et qu'on les trouve groupés dans une même fleur, comparable à une famille ayant à la fois des garçons et des filles. Nous savons aussi que les abeilles ont sur les pattes de petits paniers à pollen, et qu'elles portent le pollen aux pistils d'autres fleurs. Là, le pollen suit son chemin jusqu'à l'ovule, qui est alors fécondé et capable de grandir jusqu'à former une nouvelle plante avec ses fleurs.
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Avec ces données et quelques fleurs, rassemblons les enfants, et montrons-leur comment les fleurs ressemblent à des familles. Comme chacun sait, aucun garçon ne penserait à épouser quelqu'un de sa famille. Les garçons-fleurs (pollen) sont aussi aventureux que les garçons humains, ils parcourent le vaste monde sur des coursiers ailés (abeilles), comme les chevaliers des anciens temps, à la recherche de la princesse murée dans son château magique (l'ovule dans la carpelle). Le petit chevalier garçon-fleur descend de sa monture (abeille) et trouve son chemin jusqu'à la chambre secrète où repose la princesse (ovule). On les marie alors et ils ont quantités de petits garçons-fleurs et filles-fleurs.
Cette narration peut être variée et embellie selon la fantaisie de l'éducateur, et peut plus tard être augmentée d'histoires d'oiseaux et d'autres animaux. Elle éveillera chez l'enfant une compréhension de la genèse de son propre corps, qui revêtira l'histoire d'amour de papa et maman de toute la poésie des garçons-fleurs et filles-fleurs; elle s'opposera ainsi à la plus petite pensée de discrédit touchant la naissance, dans l'esprit de l'enfant.
Le corps du désir naît vers la quatorzième année, au moment de la puberté. C'est le moment où émotions et passions commencent à exercer leur pouvoir sur les jeunes gens et jeunes filles, car la gaine de matière-désir qui protégeait auparavant le corps du désir naissant a disparu. C'est là, dans la plupart des cas, un temps d'épreuves; il est donc bon pour l'adolescent d'avoir appris à considérer avec respect ses parents et ses maîtres, car il puisera en eux la force de résister à l'assaut des émotions. S'il a été habitué à avoir confiance en ses aînés, et s'il a reçu d'eux un enseignement sage, il aura développé à ce moment un sens intime de la vérité qui lui sera un guide sûr. Au contraire, dans la mesure même où il ne l'aura pas fait, il risquera d'aller à la dérive.
C'est maintenant qu'il faut lui apprendre à étudier les choses par lui-même, et à se former ainsi des opinions personnelles.
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Pénétrons-le de la nécessité d'un examen approfondi avant tout jugement, et aussi du fait que plus il gardera de mobilité à ses opinions, mieux il sera capable d'étudier des faits nouveaux et d'acquérir des notions nouvelles. Il atteindra ainsi sa majorité à 2l ans, moment où l'intellect à son tour est entièrement libre; et il sera capable de prendre place dans le monde en citoyen complet, en adulte accompli, faisant honneur à ceux dont les soins aimants l'ont protégé pendant ses années de croissance.
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Dans les précédentes conférences, nous avons constamment essayé de faire ressortir la valeur du corps physique: c'est bien la plus précieuse de nos possessions matérielles et, chose surprenante, c'est aussi celle que nous négligeons le plus. Pour protéger des biens sans valeur, nous risquons notre vie, jetant le blé pour garder l'ivraie. Mais notre plus grand crime n'est pas de commettre cette erreur à l'occasion; le plus grand dommage provient de la négligence et de l'insouciance dont nous faisons preuve chaque jour, dès avant la naissance et jusqu'au moment de la mort.
En effet, nous prenons le plus grand soin de la reproduction de notre bétail et de nos chevaux; nous veillons à ce que les animaux soient en parfaite santé et nous recherchons pour eux l'union qui, selon notre bon sens et notre expérience, donnera la meilleure progéniture; nous étudions soigneusement le pedigree d'un chien ou d'un étalon, avant de le choisir pour féconder nos animaux, mais nous n'avons pas une pensée pour nos enfants à venir.
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Nous nous marions pour obtenir la richesse, un foyer, une situation sociale, etc., et non pour avoir un partenaire mentalement, moralement et physiquement apte à devenir le père ou la mère d'une génération plus évoluée; et ce qui est pire, le mariage est généralement considéré comme une possibilité de rapports sexuels illimités qui, dans beaucoup de cas, sont poursuivis sans interruption pendant toute la période de gestation. Comment s'étonner que la passion domine l'enfant dès son jeune âge. Mariage et enfantement sont des devoirs sociaux pour toutes les personnes en bonne santé et qui en ont les moyens; mais l'excès est un crime, un cancer qui ronge la vie même de la société comme le vautour rongeait le foie de Prométhée, et cet excès ne peut être assez sévèrement condamné.
C'est ainsi que nos ancêtres nous ont amenés en ce monde avec des désavantages sérieux dans notre vie; et nous faisons du tort à nos enfants de la même manière par notre manque de réflexion et de retenue, tout en nous demandant avec étonnement pourquoi la maladie et la souffrance existent. Si nous prenions seulement, pour la sélection des mères et pères de nos enfants, la moitié de la peine que nous prenons pour nos animaux, le progrès serait immense, particulièrement si la mère n'était pas importunée pendant toute la période de gestation.
Non seulement nous nuisons à nos enfants avant leur arrivée en ce monde, mais dès la première enfance nous leur donnons, par ignorance, des habitudes nocives pour leur santé et leur bien-être, particulièrement en les nourrissant mal; en leur apprenant à vivre pour manger au lieu de manger pour vivre, et à regarder plutôt ce qui plaît à l'oeil que ce qui est sain; en leur inculquant le goût des plats très assaisonnés qui excitent la nature passionnelle au plus haut degré. Supposez qu'un constructeur essaie d'édifier une maison avec de vieux chiffons, des bidons de fer-blanc, vieux bouts de planches et autres rebuts, et d'y vivre. Serions-nous surpris qu'elle s'écroule et le blesse? Non! nous serions surpris du contraire; et quand la catastrophe se serait produite, nous dirions qu'il n'avait qu'à s'en prendre à lui-même de ce défi aux lois naturelles.
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Il en est de même pour nous; lorsque nous employons de semblables méthodes et construisons nos corps avec n'importe quels matériaux, sans savoir s'ils nous conviennent, nous seuls sommes à blâmer pour les mauvais résultats.
Il n'y a point de "foi révélée une fois pour toutes", dans aucune branche de la connaissance; la vérité a de multiples aspects, et de nouvelles voies s'ouvrent sans cesse aux chercheurs. Mais il existe cependant certaines lois et certains faits fondamentaux qui restent toujours vrais: tels sont ceux que nous allons étudier, parce qu'ils s'appliquent à tous sans exception, et qu'ils peuvent contribuer à la santé de tous, ceci bien que la santé soit strictement individuelle, indépendante de l'apparence et conditionnée seulement par le fait que l'Ego se sent "à l'aise" dans le corps. Si l'Ego se sent "mal à l'aise", le corps est malade, même s'il présente ce que nous appelons "l'image de la santé".
Quand commence la vie prénatale de l'être humain, l'embryon n'est qu'un petit globule mou composé d'albumine (blanc d'oeuf). Un changement se produit: on voit apparaître à l'intérieur des particules variées de substance plus solide, qui grandissent, deviennent plus fermes et finalement entrent en contact. A ces points de contact s'établissent des "articulations" et graduellement se forme le squelette. En même temps les parties molles s'organisent, et c'est le "foetus", un enfant dans l'utérus.
La croissance continue, et la naissance révèle un enfant muni d'un petit corps mou, cependant infiniment plus dense et solide que n'était l'embryon. La première enfance, la seconde et la jeunesse accroissent la solidification; et plus tard le maximum de la solidité est atteint dans la vieillesse, laquelle se termine par la mort.
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Au cours de chacune de ces époques de la vie humaine, le corps devient plus dur qu'il ne l'était auparavant; la chair et les os, les tendons et les ligaments, toutes les parties du corps deviennent également dures et raides. La synovie devenant trop épaisse pour couler ne lubrifie plus les articulations qui, de ce fait, se raidissent et commencent à craquer. Le sang, qui dans l'enfance et la jeunesse coulait sans obstacles à travers les artères, les veines et les plus petits capillaires (qui sont tous au début de la vie aussi élastiques que des tubes de caoutchouc) coule lentement et stagne dans les artères contractées, indurées et rigides de la vieillesse. Ainsi, le corps fléchit, la chair se flétrit par manque de nutrition, les cheveux tombent; à la fin le coeur fatigué n'a plus la force de pousser le sang, et le corps meurt. Le cours entier de la vie, du berceau à la tombe, est un processus ininterrompu de solidification; la première et la seconde enfance, la jeunesse, la maturité et la vieillesse n'en sont que les étapes successives. La seule différence entre le corps jeune et le corps âgé est que l'un est mou et élastique, alors que l'autre est dur et rigide. Et la question qui se pose est: quelle est la cause de cette ossification? peut-elle être arrêtée ou au moins diminuée, de manière à prolonger les beaux jours de la jeunesse?
A la dernière partie de cette question, on peut répondre sans réserve qu'il est possible de diminuer le processus de solidification, et de vivre le temps qui nous est dévolu avec beaucoup plus d'avantages que si nous vivions étourdiment comme le font malheureusement la plupart des gens.
En ce qui concerne la cause de l'ossification qui durcit les tissus de nos corps, l'analyse chimique a prouvé que tendons, muscles, sang, urine, sueur, salive, et en fait toutes les parties du corps que nous examinons, contiennent un montant considérable de matières calcaires ou de chaux qui n'existe pas dans l'enfance.
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Par exemple, alors que les os de l'enfant sont composés de trois parties de gélatine et d'une partie de phosphate de chaux ou matière osseuse, dans la vieillesse la proportion est exactement inversée: il n'y a plus qu'une partie de gélatine pour trois parties de matière osseuse - et c'est là la raison pour laquelle les os du vieillard se soudent mal après une fracture. Les os de l'enfant se soudent promptement parce qu'ils possèdent en quantité les matériaux d'union, et au contraire très peu de phosphate de chaux (matière osseuse), de sulfate de chaux (gypse) et de carbonate de chaux (craie commune) qui sont les substances incrustantes, causes principales de la rigidité et de la vieillesse.
Et maintenant surgit une autre question: quelle est la source de ces matières calcaires qui se déposent partout? Il semble incontestable que tous les solides du corps sont construits par le sang, qui nourrit chaque partie de l'organisme, et que tout ce que contient le corps doit s'être trouvé d'abord dans le sang. Le sang est renouvelé par le chyle, le chyle par le chyme et donc, en fin de compte, par les aliments et la boisson. Aliments et boissons qui nourrissent nos corps doivent dont être en même temps la source des dépôts minéraux qui obstruent le passage, produisant ainsi la vieillesse et la décrépitude.
L'analyse chimique confirme cette déduction, car elle a montré que le sang artériel venu tout droit du coeur, pur et rouge, est plus chargé en matières minérales que le sang veineux qui contient les impuretés de l'organisme, Il est ainsi prouvé que le courant générateur de vie qui coule dans toutes les partie du corps pour le renouveler et le construire, nous rapproche en même temps de la mort, car à chaque cycle circulatoire, il laisse derrière lui une nouvelle accumulation de composés calcaires qui durcissent les tissus.
C'est là l'écueil sur lequel toutes les théories de la "vie perpétuelle" échouent, car il est nécessaire de manger pour vivre, et cependant chaque morceau de nourriture contient en lui-même à la fois la vie et la mort.
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Mais si nous ne pouvons éviter dans notre organisme des substances porteuses de mort, nous pouvons du moins régler notre alimentation de façon à en prendre le moins possible. Très différentes en effet sont les quantités qu'en contiennent les différents aliments: la poudre de cacao, par exemple, est un des aliments les plus nourrissants; mais c'est en même temps un des plus grands facteurs d'obstruction, qui contient trois ou quatre fois plus de cendres que le plus mauvais de tous les autres aliments. Le chocolat, au contraire, est encore plus nourrissant que le cacao, mais ne contient aucune matière calcaire. Tant que nous pouvons apporter du combustible à un foyer et en enlever les cendres, le feu brûle et chauffe. Il en est de même de notre corps, qui est un foyer chimique: tant que nous lui donnons une nourriture appropriée et restons capables d'éliminer les déchets par les reins, la peau et le rectum, nous pouvons le garder sain et vigoureux. En prenant seulement des aliments qui contiennent une quantité minimum de substances calcaires, nous pouvons différer le jour néfaste où rigidité et vieillesse prendront la place de l'élasticité et de la jeunesse. Il ne tient qu'à nous de le faire, grâce aux tables de valeurs nutritives publiées par le gouvernement des Etats-Unis (voir ci-après), qui donnent les constituants chimiques des différents aliments.
En gros, et du point de vue chimique, il y a deux catégories d'aliments: les hydrates de carbone, qui comprennent les sucres et les graisses; et les aliments azotés, comprenant les protéines.
Les hydrates de carbone sont les combustibles d'où nous tirons chaleur et force musculaire; ils proviennent de l'amidon et du sucre des légumes, ainsi que du beurre, de la crème, du lait, de l'huile d'olive, des fruits oléagineux, des fruits proprement dits et des jaunes d'oeufs. Ces aliments contiennent très peu de matières minérales; beaucoup d'entre eux, particulièrement les légumes verts frais et les fruits, en sont totalement dépourvus.
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DIAGRAMME "VALEURS NUTRITIVES DES PARTIES COMMESTIBLES DES ALIMENTS"
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DIAGRAMME "VALEURS NUTRITIVES DES PARTIES COMMESTIBLES DES ALIMENTS"
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Les protéines sont les matériaux que nous utilisons pour réparer les pertes du corps consécutives au travail et à l'usure. On les trouve dans les graines de légumineuses, les fruits oléagineux, le lait et le blanc d'oeuf.
La plupart des gens pensent qu'un repas sans viande est incomplet, car de temps immémorial on a regardé comme un axiome que la viande est l'aliment le plus fortifiant que nous ayons. Tous les autres aliments sont considérés comme de simples accessoires des différentes viandes du menu. Rien n'est plus faux: la science a prouvé par l'expérimentation qu'en toutes circonstances la nourriture tirée des végétaux a un pouvoir de soutien supérieur; la raison en est facile à voir si nous considérons les choses du point de vue occulte.
La loi d'assimilation est la suivante: "Aucune particule nutritive ne peut être intégrée dans le corps par les forces dont c'est la tâche (sixième conférence) avant d'avoir été dominée par l'esprit intérieur"; car celui-ci doit être le maître absolu et indiscuté dans le corps, gouvernant les cellules comme un autocrate, sinon chacune suivrait sa propre voie comme elles le font dans la décomposition qui suit le départ de l'Ego.
Il est évident que, plus la conscience d'une cellule est obscure, plus il est aisé de la maîtriser et plus longtemps elle restera en sujétion. Dans la troisième conférence, nous avons vu que les différents règnes avaient des véhicules différents. Le minéral n'a qu'un corps dense et une conscience semblable à celle de l'état le plus profond de léthargie: le plus facile serait donc de soumettre de la nourriture prise directement dans le monde minéral; la nourriture minérale est celle qui resterait en nous le plus longtemps, supprimant la nécessité de manger si souvent. Mais malheureusement, il se trouve que l'organisme humain vibre à une fréquence si rapide qu'il est incapable d'assimiler directement le minéral inerte. Le sel et les substances analogues sont éliminés immédiatement de l'organisme, sans avoir été aucunement assimilés;
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l'air est plein d'azote qui nous est nécessaire pour réparer nos pertes: nous l'aspirons dans l'organisme, mais nous ne pouvons l'assimiler, pas davantage que tout autre élément minéral du règne, avant qu'il ait été transformé dans le laboratoire de la nature et intégré dans les plantes.
Comme nous l'avons vu dans la troisième conférence, les plantes ont avec leur corps dense un corps vital, qui les rend capables d'accomplir ce travail; nous avons vu aussi que leur conscience est celle d'un sommeil profond et sans rêves. Aussi est-il facile pour l'Ego de maîtriser les cellules végétales et de les garder longtemps en sujétion, d'où le grand pouvoir de soutien des aliments végétaux.
Dans la nourriture animale, les cellules se sont déjà mieux individualisées: l'animal possède en outre un corps du désir qui lui donne une nature passionnelle. Lorsque nous mangeons de la viande, il est donc plus difficile de dominer ces cellules dont la conscience animale ressemble à l'état de rêve; de même ces particules ne resteront pas longtemps en sujétion, aussi une alimentation carnée demande-t-elle des rations plus fortes et des repas plus fréquents qu'une nourriture végétarienne. Il en résulte que si nous mangions la chair d'animaux carnivores, nous serions continuellement affamés: car chez eux les cellules sont extrêmement individualisées, aussi chercheront-elles leur liberté et l'obtiendront-elles beaucoup plus rapidement. Ce fait est bien illustré par les exemples du loup, du vautour et du cannibale dont la faim est devenue proverbiale. Comme le foie de l'homme est trop petit, même pour le régime carné ordinaire, si le cannibale vivait uniquement de chair humaine au lieu d'en user comme d'une occasionnelle "friandise", il succomberait rapidement. Un excès d'hydrates de carbone, sucres, amidons et graisses ne fait que peu ou pas de mal à l'organisme, car il est expiré par les poumons sous forme de gaz carbonique ou éliminé sous forme liquide par les reins et la peau; un excès de viande est également consumé, mais laisse en nous le poison de l'acide urique.
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Il est aujourd'hui de plus en plus reconnu que moins nous mangeons de viande, mieux nous nous portons physiquement.
Considérons maintenant la question de manger de la viande du point de vue moral: il est contraire aux conceptions élevées de tuer pour manger. Dans les temps anciens, l'homme chassait, sauvage et insensible comme toutes les bêtes de proie; maintenant il chasse chez le boucher, où il n'est incommodé par aucune des visions écoeurantes de l'abattoir. Si chacun de nous était obligé d'aller dans cet endroit sanglant, où toutes les horreurs décrites par Upton Sinclair se déroulent quotidiennement pour satisfaire une habitude qui cause plus de maladies et de souffrances que l'alcoolisme lui-même; si chacun était obligé de manier le couteau sanglant et de le plonger dans la chair palpitante de sa victime, combien mangeraient de la viande? Bien peu! Pour éviter de faire nous-mêmes, au besoin, ce travail rebutant, nous obligeons un de nos semblables à vivre tous les jours dans ce lieu sanglant et à tuer des milliers d'animaux chaque jour de la semaine; nous faisons de lui une telle brute que la loi ne lui permet pas de siéger dans un jury pour un procès capital, parce qu'il a cessé d'avoir aucun égard pour la vie. Quand il se mêle à une bagarre, ce qui est souvent le cas dans le quartier des halles de Chicago et d'autres villes d'abattoirs, il emploie toujours son couteau, et toujours inconsciemment en tranchant avec cette torsion particulière qui rend ses coups mortels.
Et n'allons pas dire qu'il n'est pas obligé de le faire. Quand la faim commande, un homme ne refuse aucun moyen de gagner sa vie; et nous, Société, qui réclamons cet aliment, nous forçons certains de nos semblables à nous le procurer, et sommes donc responsables de leur dégradation. Nous avons charge de nos frères à la fois individuellement et collectivement en tant que Société.
Les animaux que nous abattons crient aussi très haut contre cette tuerie; il y a un nuage de tristesse et de haine sur toutes les grandes cités à abattoirs. La loi protège chats et chiens contre la cruauté; tous noua aimons à voir les petits écureuils, dans les parcs des villes, venir manger dans nos mains.
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Mais dès que la chair ou la fourrure d'un animal peut être un moyen de gagner de l'argent, l'homme cesse de prendre en considération son droit de vivre; il devient alors son plus dangereux ennemi, le nourrisant et l'élevant par amour du gain, imposant souffrances et peines à un de ses semblables par amour de l'argent. Nous avons une lourde dette à payer aux créatures inférieures dont nous devrions être les guides, et dont nous sommes les meurtriers. Et la bonne loi qui travaille sans cesse à corriger les méfaits, mettra sans doute un jour au rebut, comme une pratique surannée, l'habitude de manger des animaux tués, comme l'est aujourd'hui le cannibalisme.
Nous ne préconisons pas l'alimentation végétarienne pour tout le monde. Une longue habitude du régime carné, et certaines particularités du tempérament de beaucoup de personnes, font que la suppression de la viande ne leur convient pas; mais d'autres, comme l'auteur, n'éprouvent aucun mal à vivre et même à engraisser avec deux repas sans viande. Les oeufs, le poisson et d'autres formes inférieures sont nécessaires aux uns, d'autres peuvent vivre des mois et des années uniquement de fruits. L'alimentation, comme la santé, est déterminée individuellement, et aucune règle générale ne peut être établie; mais en tous cas, nous pouvons dire avec certitude que moins nous avons de viande, meilleure sera notre santé générale. Mais si nous voulons nous en passer entièrement, il est absolument essentiel d'étudier une table des valeurs alimentaires, pour que nous tirions les protéines nécessaires des végétaux que nous mangeons. Nul ne saurait trouver une nourriture suffisante s'il mange seulement les légumes fournis comme accessoires de la viande; il lui faut des haricots, des pois, des fruits oléagineux et autres aliments riches en protéines, pour remplacer la viande qu'il abandonne, ou il dépérira. Comme suggestion pour les travailleurs intellectuels, disons que les carottes contiennent environ quatre fois plus d'acide phosphorique qu'aucun autre aliment; leurs feuilles peuvent être mangées en salade, et elles ont trois fois plus d'acide phosphorique que les carottes elles-mêmes.
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Plus dangereuse pour l'homme qu'aucun aliment, en tant qu'agent d'engorgement et de durcissement de l'organisme, est l'eau: quelque claire et pure qu'elle paraisse, la meilleure contient une quantité énorme de matières calcaires et de magnésie, et ni filtration ni ébullition ne les font disparaître. La quantité de minéraux contenue dans l'eau est facile à reconnaître par la manière dont elle s'incruste dans notre bouilloire à thé; c'est une erreur de croire que le dépôt provient de l'eau versée de la bouilloire pour faire le thé ou le café: ce dépôt est le résidu solide de l'eau évaporée, et l'eau qui reste est justement la plus dure. La seule chose qui nous permette de vivre au-delà de l'enfance est l'énorme pouvoir éliminateur des reins; sans eux nous serions vieux dès l'enfance. Et si nous voulons préserver notre santé et rester jeunes à un âge avancé, nous devons cesser de boire et d'utiliser en cuisine ce liquide porteur de mort, n'employant pour tous usages internes que l'eau distillée qui est absolument dépourvue des nuisibles composés calcaires.
Les seuls solvants de nature toujours bénéfique que connaisse l'auteur sont le babeurre et le jus de raisin, pris de préférence en mangeant le raisin, ou non fermenté. Un traitement systématique par le jus de raisin ou le babeurre rouvre les capillaires fermés et stimule le sang: c'est ainsi que même des personnes âgées, dont les chairs ont séché et se sont ratatinées, s'épanouiront à nouveau et reprendront l'aspect de la jeunesse, pourvu qu'elles ne soient pas d'une nature trop tourmentée et pessimiste, car rien ne prévaut conte un tel tempérament: celui-ci, la crainte, et l'ignorance dans le choix des aliments, sont en fait les causes de la plupart des maladies et les ennemis les plus opiniâtres du médecin.
Deux choses nous aident grandement à trouver la santé; elles nous rendent capables de tirer de tels bénéfices de notre nourriture, que tous les gens désireux d'acquérir ou conserver la santé devraient y recourir: ce sont la mastication complète et le plaisir en mangeant.
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Ils feront plus pour le bien-être du corps que toutes les drogues ou tous les médecins du monde; et comme toutes les autres habitudes, ils peuvent être cultivés.
Les "Comptoirs de repas express" sont un des plus grands péchés de notre nation. Un homme court à la hâte de son bureau à la haute chaise inconfortable qu'on trouve dans ces endroits; en cinq minutes, il avale une quantité de mets, rentre en trombe à son bureau, et s'étonne alors de se sentir gêné et somnolent. Peut-être ensuite se sentira-t-il forcé de prendre des stimulants alcooliques pour "se remonter". Tout cela peut être évité en prenant le temps de manger confortablement.
La question n'est pas de savoir combien nous mangeons, mais combien nous assimilons. Quand nous avalons une grande quantité d'aliments presque entiers, nous y trouvons moins de nourriture que si nous prenons le temps nécessaire pour mâcher et pleinement goûter notre repas. N'en faisons pourtant pas un travail; mais considérons qu'en mangeant nous accueillons un ami dans notre maison, où nous faisons avec joie tout ce qui est en notre pouvoir pour son confort. Nos corps sont en fait comparables à de grands hôtels, dont nous sommes les propriétaires et où les cellules de nos aliments sont les hôtes. Ils vont et viennent, restant plus ou moins longtemps, et sont pour le propriétaire un profit ou une perte, selon que grâce à lui ils se sentent ou non chez eux.
Imaginez deux hôtels, dont l'un est dirigé avec le sens de la cordialité et de la complaisance, où le propriétaire accueille aimablement chaque hôte à la porte, et où un personnel idéal, heureux et avenant, cherche à aller au-devant du moindre voeu de ses clients. Bien entendu, tout ira à souhait dans cet hôtel; les clients s'y sentiront satisfaits et y resteront longtemps, peu enclins à quitter un hôte si aimable. De même, si nous accueillons notre nourriture avec joie, nous nous apercevrons qu'elle nous réussit mieux. Si nous la mâchons avec un réel plaisir, nous organisons son confort, comme le propriétaire de l'hôtel le fait pour son client en préparant un bain ou d'autres commodités.
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Prendre plaisir à sa nourriture est une attitude mentale encore plus importante que la mastication. L'homme qui trouve à redire à son repas est comme un propriétaire d'hôtel qui accueillerait ses clients à la porte avec une figure renfrognée, et leur demanderait: "Que venez-vous faire ici? Je ne vous aime pas; je suit obligé de prendre des clients comme vous pour que mon hôtel continue à marcher, mais vous devez savoir que je n'aime pas cela". Quoi d'étonnant si des voyageurs, obligés d'entrer dans cet hôtel, se fâchent, protestent et tâchent de s'en aller aussi vite que possible; quoi d'étonnant à ce que l'homme qui blâme sa nourriture attrape une indigestion? Qui donc est responsable de son malheur, sinon lui-même? La critique et l'aversion écartent de nous ce qu'il y a de bon dans nos aliments, autant qu'ils éloignent de nous nos amis; apprécier nos aliments comme nos amis resserre au contraire nos liens avec les uns et les autres. La somme de travail, spirituel aussi bien que matériel, que nous pouvons faire dans le monde, dépend de la condition de notre corps: il est donc de la plus grande importance que nous cultivions notre santé, en prolongeant notre jeunesse jusqu'à la limite de notre séjour ici-bas, si possible En suivant les directives générales données ici, chacun éprouvera bientôt dans sa condition corporelle une amélioration qui donnera un plus grand et plus libre essor à ses facultés mentales.
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