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personnages est datée: Mardi de la Semaine Sainte, le 22 mars, 1429!

 Ici, je retrouvais une lettre en forme d'ultimatum et qui portait cette même date : un 22 mars... en 1997. Pour l'Hôpital Montfort, la "lettre aux Anglais" était en fait, une pétition signée par plus de dix mille personnes. Ce 22 mars devait créer une solidarité nouvelle au sein de la population francophone de l'Ontario.

Dans l'enthousiasme que ces coïncidences avaient suscité chez moi, je me dis que... si j'avais à voir avec Jeanne d'Arc! Je voulais de Dieu un miracle comme preuve! Un miracle tout simple: Qu'il garde Montfort ouvert!

             Et puis, je me détachai du dossier.

            Plusieurs mois après la manifestation et la pétition du 22 mars, j’appris que le Ministre de la Santé de l’Ontario reculait un peu. Il gardait Montfort ouvert mais lui retirait des services... J'en vis un début de preuve. C'était déjà un gain à n'en point douter. Par la suite, le Premier ministre du Canada, Jean Chrétien, laissait entendre qu’il envisageait de faire passer l'Hôpital Montfort sous juridiction fédérale, pour continuer de lui assurer sa vocation première et le financement nécessaire à ses opérations. Et puis, tout récemment, d'autres rebondissements firent les manchettes. Des révélations concernant des considérations politiques prises en compte lors de ces décisions, allaient amener les choses devant les tribunaux, et donner aux citoyens d'Orléans un peu plus d'espoir concernant le sort, de moins en moins menacé de l'Hôpital Montfort.

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              Le 14 juin 1999 et les jours suivants, devaient régler définitivement le sort de l'Hôpital Montfort; une situation qui trouverait finalement son dénouement devant les tribunaux... Il restera ouvert... c'est cela le vrai miracle! Ainsi je fais cette prédiction avant que la décision finale ne soit rendue, car de nouveaux délais sont venus se rajouter et je ne peux attendre d'avantage... Ce livre doit paraître !

             Si j'ai fait ce grand détour du côté de Jeanne d'Arc et de l'Hôpital Montfort, c'est qu'avec le temps, un genre d'explication m'est venu concernant la Pucelle, versus "le tableau dans le miroir’’1. Je me suis dit que le miroir, en se glissant sous ma toile, avait voulu me communiquer quelque chose. Un miroir, c'est conçu pour refléter, n'est ce pas? En se glissant sous ma toile, ne voulait- il pas me dire: "Regarde cette toile... c'est toi’’ !

              Un autre fait amusant concernant ce tableau m'est arrivé un jour alors qu'une amie m'avait offert de prendre mes toiles en photo. J'avais alors installé "Délire Pastel’’ sur un crochet de la clôture à l'intérieur de ma cour. Quand elle m'en donna une copie, je remarquai qu'elle avait fait paraître une portion de la roue avant de mon vélo...  Roue en Délire Pastel… "Rouen", c'est cette ville qui vit périr Jeanne d'Arc... J'y ai reconnu un signe! (Fig.10.4)

              Je commençai alors l'analyse symbolique de ma toile.

             Cette jeune femme aux cheveux courts, en veston d'homme, c'était Jeanne d'Arc. Derrière, cette forme sans visage aux attitudes de Mater, c'est Isis. L'arbre du milieu de la toile, c'était 'l'Arbre aux fées’’ du " Bois chenu’’ près de Domrémy, où Jeanne enfant allait jouer. L'eau dont les remous formaient un cœur, c'était le cœur de Jeanne jeté avec ses cendres, à la Seine. Le corps nu, torturé, où la tête avait pris la forme d'une marguerite affligée, c'était le corps brûlé à vif de Jeanne, adombré par sa petite Sainte, sainte
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Marguerite. Avec tout le ciel, la cime de l’arbre et les cheveux de la fille en feu!

             Hier, dans mon bain, (souvent mes bonnes idées me viennent dans le bain), je repensais à ma toile "Délire Pastel’’ et je me demandais ultimement, pourquoi je lui avais donné ce titre?

             Je commençai à jouer d'emblée avec les lettres et tout de suite j'y vis le lien avec Jeanne d'Arc. Avec "Délire Pastel’', je pus écrire "Le départ du lis"... On se souvient que Jeanne fut anoblie par Charles VII et qu'il lui donna le nom de "Du Lys". (Dans ces différentes phrases j'ai remplacé certains e par u et répété à quelques reprises les mêmes lettres.) J'ai aussi trouvé cette autre, très éloquente au regard du martyre de Jeanne."Le lis prédaté"... Ensuite, cette autre: "Le Pâtre du lis". Et aussi "Le lis du Pater'’. Aussi; "Sale peste, délire", en parlant de l'Inquisition... ? "Elle, de lis parée". Et cette ultime, en latin "Per Stella Dei"... "Par l'étoile de Dieu'’.

              Récemment, dans "Jeanne D'Arc" de W.S.Scott, je suis tombée sur la photo d'une très ancienne tête qui faisait partie jadis d'une statue. Cette tête se retrouve aujourd'hui au Conservatoire du Musée Jeanne d'Arc, à Orléans. Selon les experts, cette tête serait sans doute la seule représentation réelle de la Pucelle, vers ses dix-neuf ans. Jeanne aurait, soit servie de modèle pour un moulage ou bien, l'artiste se serait inspiré d'elle pour réaliser son oeuvre. Cette tête n'est pas du tout conforme aux canons artistiques de l'époque. Les spécialistes situent sa création vers le milieu du quinzième siècle, moment où vivait la Pucelle.

             Ce qu'elle a de particulier, c'est qu'elle représente certains détails morphologiques propres à Jeanne. Des yeux proéminents et écartés.

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(Fig.10.4)

 DÉLIRE PASLEL : Oeuvre peinte par l'Auteure  en 1993, où l’on retrouve certains détails
morphologiques propres à Jeanne. (Fig.10.4)
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  (Fig. 10.5 A)

À gauche, TÊTE  sculptée dite de saint Maurice, représentant Jeanne d’Arc, conservée au
Musée Jeanne d'Arc, à Orléans, France.                

À droite, je me suis amusée à ouvrir les yeux de la statue... pour voir si la ressemblance   s'accentuait et cela m'a semblé concluant...

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             A la lumière de cette "tête" que j'avais sous la main, je pus, de visu, la comparer au personnage principal figurant sur ma toile "Délire Paste’’l.

           J'ai trouvé le rapprochement étonnant! Ces mêmes caractéristiques y figuraient, avec en plus, la même forme de visage, les sourcils hauts et la bouche bien dessinée.

          Je dois préciser au lecteur que je n'avais rien lu sur Jeanne d'Arc au moment où j'ai peint cette toile, en 1993... Création qui sortait tout droit de mon imaginaire et ne visait aucun sujet particulier.

          Sans le savoir, sans le vouloir, j'avais crée une allégorie de la passion de Jeanne!
         Et le miroir, à grand renfort de magie, d'une impossible mystification, me l'avait lancée au visage! " Quand on se met devant un miroir... généralement, on s'y voit!"

         "Alors", me disait le miroir, "regarde- toi... c'est toi" !

           Si jamais l'Hôpital Montfort retrouvait toute son importance, j'aurai gagné mon pari au-delà de toute espérance... par miracle… et je devrai accepter les conclusions que j'ai moi- même tirées... et croire!

L'OMBRE AU TABLEAU

           Je n'étais pas certaine d'avoir envie de raconter cette deuxième partie de l'histoire du ‘’tableau dans le miroir", car en fait, cet épisode constitue, comme son nom l'indique, "l'ombre au tableau". Ce nom n'a pas été choisi au hasard, il est le titre d'une de mes toiles peinte il y  a de nombreuses années et dont j'ai fait cadeau à ma mère. Elle représentait l'entrée d'une 

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maison par devant bordée d'une haute haie de cèdres et de deux vasques à fleurs. Les vasques à fleurs faisaient partie du paysage où j'habitais alors, mais le reste était pure fiction. Ce tableau tenait son titre d'une ombre triangulaire paraissant dans le coin droit de ma toile. Eh bien, comme par hasard, cette entrée ressemble étrangement à celle de notre maison actuelle, les vasques en moins! Et ceci vient tout juste de m'apparaître.

             J'ai eu l'occasion de revoir récemment cette peinture et je me suis rendu compte que mon souvenir n'était pas tout à fait conforme au dessin mais s'en rapprochait plus, par certains détails que j'avais oubliés, tel la clôture grillagée qu’on ne peut percevoir sur la photo... car les arbres ont poussé et se sont étalés plus largement depuis ces quelques dix années que nous y habitons. Il y avait d'ailleurs à l'époque où nous avons emménages, une ouverture dans la clôture rejoignant un petit chemin le long du bois et cet endroit s'avérait dégarni d'arbres tout comme il l'est sur le tableau, et le sentier formait avec l'autre chemin, un angle droit tel que figuré sur la toile. Quant au petit chemin asphalté beaucoup plus modeste à notre arrivée, il s'arrêtait là, formant ainsi la pointe de l'angle! La maison du parc apparaissant dans le fond du paysage était effectivement présente quoique complètement invisible puisque cachée par le bois. Elle est située à peu près au même endroit et conformément à la toile, elle est entourée d'espaces vallonnés rappelant un peu la Suisse...1

           Quoi qu'il en soit, j'aimerais revenir au matin du "tableau dans le miroir’’.
          
Après l'incident du "tableau", comme il faisait très doux, nous sommes allés Louis et moi, marcher dans la neige, jusqu'aux abords du boisé. Il faisait si doux ce matin-là,

1 Je m’excuse de ne pas mettre les photos, elles ne rendaient pas justice à mon énoncé… Le lecteur devra faire œuvre d’imagination !  

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et malgré qu’il y eut un peu de neige, nous étions sortis sans manteaux et sans bottes, en amoureux. Nous marchions paisiblement le long de la haie de cèdre en direction du boisé, quand nous avons vu, sortant d'à côté de l'Arbre-Porte, une femme et son chien. À peu près à l'endroit où figure l'ombre sur la toile!

            J'avais déjà aperçu cette femme à quelques reprises en circulant dans le quartier et elle m'avait fait une impression très bizarre. Elle semblait hors du commun.

             Elle dégageait ce je ne sais quoi de sombre, d'irréel, difficilement explicable; une étrangeté distante... comme une ombre. 

            Son chien vint vers nous.
            Elle tenta de le rappeler, sans succès, et nous engageâmes la conversation.

           Comme j'étais encore un peu sous le choc du " du tableau dans le miroir", de but en blanc je lui racontai le mystère qui venait de nous arriver. Y allant spontanément de son expertise et comme elle semblait très savante en ésotérisme Nouvel Âge... je l'invitai à la maison prendre un café.

           Nous vivions à cette époque, presque en retrait de la société. Par contre, notre demeure était un peu comme la maison du bon Dieu, où les mal aimés du monde débarquaient à l'occasion dans notre intimité et y trouvaient généralement la porte ouverte. Le sort avait voulu que nous vivions modestement et que malgré ceci, nous ayons la bonne fortune d'avoir du temps et de l'intelligence pour nos enfants et pour tous ceux qui s'estimaient être nos amis.

           Ainsi donc, notre invitée ne fit pas exception.

© Copyright - Chris Caron 1995. Tous droits réservés.

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